Mobilisation de la Coordination rurale à Paris : «On ne bloque pas, on ne perturbe pas», insiste Annie Genevard

Environ 200 agriculteurs et une cinquantaine de tracteurs de la Coordination rurale (CR) partis du Nord de la France sont aux portes de Paris ce lundi 6 janvier, a affirmé la ministre de l’Agriculture, Annie Genevard, dans l’émission «Bonjour ! La matinale» sur TF1. À la veille du coup d’envoi de la campagne électorale pour les chambres d’agriculture, les bonnets jaunes du deuxième syndicat agricole veulent faire entendre leur voix : contre les accords de libre-échange, contre la concurrence déloyale, y compris intra-européenne, et contre les contrôles dans les fermes. «

Leur inquiétude est parfaitement compréhensible. La Coordination rurale a fait le choix des manifestations ce week-end. Je respecte le droit de manifester», a réagi la ministre. Malgré tout, Annie Genevard se veut intransigeante sur le fait de ne pas bloquer Paris. «On ne bloque pas, on ne perturbe pas», surtout «un jour de rentrée scolaire», a-t-elle déclaré. «Pas de blocages qui compromettent finalement l’image des agriculteurs auprès des Français. Et pas de violence.»

Selon l’AFP, une dizaine de tracteurs et une quinzaine de voitures qui stationnaient au niveau de la zone industrielle d’Ablis Nord (Yvelines) ont forcé le passage et se sont engagés sur la route nationale N10, avant d’être bloqués au niveau des Essarts-le-Roi. Un autre convoi était bloqué à Orveau, dans l’Essonne. Il a été débloqué, affirme la Coordination rurale. En revanche, de petits convois progressaient de nouveau en Seine-et-Marne (sur la RN4 en direction de Paris) et dans le Rhône, où une trentaine de tracteurs se déplaçait sur la route départementale 342 en direction de Vourles, vers l’autoroute A7.

Un rendez-vous avec le premier ministre espéré avant le 13 janvier

La Coordination rurale a maintenu son appel à manifester à «Paris» et «partout en France» à partir de dimanche, jugeant la date de rencontre avec le premier ministre François Bayrou, qui leur a donné rendez-vous le 13 janvier, encore trop lointaine. «On nous propose un rendez-vous avec François Bayrou le lundi 13 janvier. Ils se moquent de nous, ils ne font que gagner du temps. Il n’y a pas de volonté d’avancer», a ainsi tancé vendredi dernier Patrick Legras. «On maintient notre appel à manifester, partout en France, (...) à monter sur Paris, en voiture ou en tracteur. L’idée est d’y être dimanche après-midi pour manifester lundi», avait encore poursuivi le porte-parole. 

Bien qu’ils soient aux portes de la capitale, la ministre de l’Agriculture a indiqué que le premier ministre François Bayrou ne les recevrait pas avant la semaine prochaine, comme prévu. «Il s’y est engagé», a souligné Annie Genevard, qui rappelle avoir reçu les agriculteurs à plusieurs reprises ces quatre derniers mois. «L’urgence qu’ils mettent en avant pour être reçus maintenant, ici tout de suite», ne se justifiait pas vraiment, a ajouté la ministre. Celle-ci a également précisé que la loi agricole serait «parmi les premiers textes» à être «présentés au Parlement» après la loi sur le budget. «L’agriculture est une priorité, c’est un domaine essentiel à la vie des Français et tout le travail des gouvernements de Michel Barnier et François Bayrou, est d’entendre cette colère, ces revendications.»

De son côté, la présidente de la région Île-de-France, Valérie Pécresse s’est également exprimée sur le sujet au micro de France Info, estimant que les agriculteurs devraient directement se plaindre auprès du Rassemblement national, proche du secteur, qu’elle juge en partie responsable de la situation. «C’est à cause du RN et de la motion de censure que les aides n’ont pas pu être votées avant Noël. J’aurais un petit conseil à donner à la Coordination nationale : au lieu de bloquer les routes franciliennes, ils devraient aller bloquer le siège du RN», a-t-elle déclaré.

«Forcer les barrages»

Sur le terrain, les manifestants déploraient d'être bloqués du seul fait de «porter un bonnet jaune» et se disaient déterminés à avancer. «Nous allons forcer les barrages», a déclaré lundi matin Sébastien Héraud, membre du comité directeur de la CR sur France Info. Le secrétaire général du syndicat, Christian Convers, dit avoir envoyé un message au ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau et au chef de cabinet du premier ministre pour demander «un point de chute dans Paris». Les autorités peuvent faire «l'encadrement qu'il faut mais nous, on assure qu'il n'y aura aucun problème de débordement», a-t-il ajouté. «Que les parlementaires puissent venir discuter un moment avec nous, et on repartira. On n'est pas là pour camper à Paris, on n'est pas là pour embêter les Parisiens», a-t-il dit sur RMC. 

Pour l'heure, aucun convoi n'est entré dans la capitale, où la circulation était habituelle ce lundi matin. La préfecture de police de Paris a interdit les rassemblements non déclarés de dimanche 18 heures à lundi 12 heures dans un large périmètre du centre de Paris, incluant notamment Matignon et le ministère de l'Agriculture, «considérant les appels à manifester le 5 janvier 2025 lancés par un syndicat agricole en vue de “bloquer la capitale”». La préfecture du Val-de-Marne en a fait de même autour du marché de Rungis et sur l'autoroute A6.

Cette mobilisation intervient avant les élections professionnelles, organisées du 15 au 31 janvier, qui détermineront les nouveaux rapports de force entre syndicats agricoles : la CR, qui a gagné en visibilité à la faveur d'actions coups de poing depuis l'hiver dernier, espère ravir une quinzaine de chambres à l'hégémonique alliance FNSEA-Jeunes Agriculteurs.