Israël : la Knesset décide de contrôler les juges pour protéger Benyamin Netanyahou et avoir le champ libre pour annexer les territoires palestiniens

La Knesset a adopté, le 27 mars, une loi élargissant le pouvoir des députés de nommer les juges, au mépris des protestations qui durent depuis des années contre les tentatives de Benyamin Netanyahou d’imposer des réformes judiciaires. La veille, des milliers de personnes avaient manifesté devant le Parlement pour protester alors que d’autres se rassemblaient devant le domicile du premier ministre.

Actuellement, les juges en Israël, y compris ceux de la Cour suprême, sont sélectionnés par un comité de neuf membres, composé de juges et de législateurs, sous la supervision du ministre de la Justice. La nouvelle loi, qui entrerait en vigueur au début de la prochaine législature, renforcerait le contrôle politique sur les nominations. Le comité compterait toujours neuf membres : trois juges de la Cour suprême, le ministre de la Justice et un autre ministre, un député de la coalition, un député de l’opposition et deux représentants du public, l’un nommé par la majorité et l’autre par l’opposition. Une modification adoptée par 67 voix pour et une contre, l’opposition ayant décidé de boycotter le vote.

Benyamin Netanyahou se déploie sur tous les fronts

Pour le ministre de la Justice, Yariv Levin, parrain du projet de loi, cette mesure vise à « rétablir l’équilibre » entre les pouvoirs législatif et judiciaire. Dans son discours de clôture avant le vote, Levin a critiqué la Cour suprême, affirmant qu’elle avait « de fait invalidé la Knesset. Elle s’est arrogé le pouvoir d’annuler des lois, et même des lois fondamentales ». « C’est du jamais vu dans aucune démocratie au monde », a-t-il déclaré.

En réalité, le gouvernement de droite et d’extrême droite ne supporte plus aucune contrainte, aucun regard porté sur ses décisions politiques et surtout, aucune autorité capable d’empêcher l’application d’une loi. Israël étant un pays ne possédant pas de Constitution, la Cour suprême joue le rôle de Cour constitutionnelle.

Pour Claude Klein, expert en droit public à l’Université hébraïque de Jérusalem, l’adoption de cette loi serait catastrophique, comme il l’a fait savoir à l’AFP : « Ils veulent s’emparer du pouvoir. Netanyahou pense que la Cour suprême l’empêche de diriger le pays à sa guise. » Le premier ministre veut se mettre à l’abri judiciairement, alors qu’il est empêtré dans des affaires de corruption, en modifiant les lois et pouvoir annexer les territoires palestiniens.

Benyamin Netanyahou se déploie sur tous les fronts, avançant imperturbable. Front militaire, bien sûr, avec le génocide à Gaza qui a repris, le nettoyage ethnique en Cisjordanie et, en Israël même, le front anti-juges. Une bataille chère à l’extrême droite en général de par le monde (voir ce qui se passe en Italie par exemple).

Reprenant les délires de son allié Donald Trump, le chef du gouvernement israélien a mis en garde contre ce qu’il appelle le vrai danger, un « État profond » qui travaille contre le gouvernement élu. Le ministre des Finances, le suprémaciste juif Bezalel Smotrich, a salué l’adoption de la loi, la qualifiant d’« étape significative et importante de notre plan ». Son plan, il ne le cache pas : en finir une fois pour toutes avec la question palestinienne.

Une opposition qui se rassemble

Le premier ministre israélien n’a jamais caché son aversion pour la Cour suprême. Il est actuellement en conflit avec elle concernant ses tentatives de destituer la procureure générale, Gali Baharav-Miara et Ronen Bar, le directeur de l’agence de sécurité intérieure, le Shin Bet. Ce dernier enquête sur les proches collaborateurs du premier ministre pour des atteintes présumées à la sécurité nationale, notamment la divulgation de documents classifiés à des médias étrangers et l’acceptation présumée de fonds du Qatar. En 2023, les changements apportés au système judiciaire ont déclenché l’un des plus grands mouvements de protestation de l’histoire d’Israël.

Devant le danger que représente cette nouvelle attaque de la coalition au pouvoir, l’opposition a décidé de se rassembler. Et pour la première fois, les formations sionistes opposées à Netanyahou, ont accepté de s’entendre avec les députés de la liste Hadash (communiste)-Taal (nationaliste arabe) et les islamistes du parti Raam.

Ensemble, ils ont annoncé que « suite à une discussion commune des présidents des factions de l’opposition, il a été décidé que celle-ci agirait avec la pleine coopération de tous ses membres à la Knesset et combattrait résolument la législation anti-coup d’État judiciaire menée par la coalition. Ce gouvernement sape les fondements de la démocratie – et l’opposition tout entière se dressera comme un rempart contre lui, jusqu’à ce que toute tentative de transformer Israël en dictature soit stoppée. » Ils ont d’ailleurs déposé une requête auprès de la Cour suprême pour contester le vote.

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