"Eddington", le western baroque et asphyxiant d'Ari Aster pour dénoncer les dérives de l'Amérique de Trump

Le nouveau pape de l'épouvante, Ari Aster, réalisateur d'Hérédité (2018), Midsommar (2019) ou Beau is Afraid (2023) était cette année pour la première fois en compétition au Festival de Cannes avec Eddington, un western qui oppose le shérif et le maire d'une petite ville du Nouveau-Mexique, sur fond d'installation d'un data center en plein désert. Le film sort dans les salles mercredi 16 juillet en France.

Joe Cross (Joaquin Phoenix) est le shérif d'Eddington, une petite ville perdue dans le désert du Nouveau-Mexique. Un projet d'installation d'un gigantesque data center divise les habitants de cette petite bourgade, à quoi s'ajoute l'arrivée du Covid. Le shérif, qui souffre d'asthme, n'est pas le plus prompt à faire respecter l'obligation de porter le masque.

Joe Cross est marié à Louise (Emma Stone), une jeune femme dépressive qui passe ses journées enfermée, occupée à fabriquer des poupées bizarres, et lui impose à demeure une belle-mère complotiste. Joe Cross est en conflit ouvert avec le maire de la ville, Ted Garcia (Pedro Pascal), qui se trouve aussi être l'ex-petit ami de sa femme.

Sur un coup de tête, Joe Cross annonce sa candidature aux prochaines élections municipales. Ce shérif et mari peu charismatique a tout à coup l'idée de défier son vieux rival. Avec ses deux acolytes de travail, il transforme le bureau du shérif en QG de campagne, se lance dans la confection d'affiches, customise sa voiture et arpente la ville, haut-parleur en main, pour convaincre les administrés de voter pour lui.

Joe Cross compte gagner en empêchant la construction du data center, grand projet de son rival. Pour compliquer encore les choses, le mouvement Black Lives Matter gagne la jeunesse d'Eddington, donnant lieu à des manifestations de plus en plus virulentes…

À bout de souffle

Après trois films d'épouvante plutôt réussis, Ari Aster donne cette fois dans le western mâtiné de comédie et de thriller. Le résultat est un film en surcharge. Dans un scénario qui part dans tous les sens, le film aborde toutes sortes de questions, de l'écologie au racisme, en passant par l'envahissement du numérique dans la sphère privée et publique, le complotisme, la manipulation politique, le pouvoir des réseaux sociaux, les abus sexuels sur les enfants, le suprémacisme blanc, l'appropriation culturelle, l'autoflagellation de la jeunesse, le goût prononcé des Américains pour les armes...

Même si on comprend qu'Ari Aster cherche à dénoncer les travers de l'Amérique d'aujourd'hui, que les comédiens, autour de Joaquin Phoenix, jouent le jeu, et qu'on rit souvent, on a bien du mal à comprendre, même en s'accrochant, ce qu'Ari Aster cherche à nous dire avec ce scénario foutraque. La forme, déployée dans la même démesure, ne nous aide pas beaucoup.

Le réalisateur s'amuse à pasticher le western, le drame psychologique, le film politique, la comédie, et même, pour les scènes finales, à nous projeter dans une esthétique de jeu vidéo. Tout cela déployé dans des plans sans cesse parasités par la multiplication des écrans et des messages à décrypter. Résultat, on sort de la projection dans le même état que Joe Cross : complètement asphyxié.

Ari Aster cherche peut-être avec ce film d'horreur en forme de farce à nous montrer à quel point l'Amérique est devenue un foutoir incompréhensible, et dans ce cas, c'est très réussi.

L'affiche du film "Eddington" d'Ari Aster, avec Joaquin Phoenix et Pedro Pascal, qui sort en salles le 16 juillet 2025. (A24 FILM)
L'affiche du film "Eddington" d'Ari Aster, avec Joaquin Phoenix et Pedro Pascal, qui sort en salles le 16 juillet 2025. (A24 FILM)

La fiche

Genre : Comédie, Thriller, Western
Réalisation : Ari Aster
Avec : Joaquin Phoenix, Pedro Pascal, Emma Stone et Austin Butler.
Pays : États-Unis
Durée :
2h25
Sortie :
16 juillet 2025
Distributeur :
Metropolitan FilmExport
Synopsis : Mai 2020, à Eddington, petite ville du Nouveau-Mexique, la confrontation entre le shérif et le maire met le feu aux poudres en montant les habitants les uns contre les autres.