Biathlon : Lou Jeanmonnot, un statut de favorite à apprivoiser

Avec pas moins de neuf médailles déjà récoltées en huit courses, dont quatre en or, l’équipe de France de biathlon survole ces championnats du monde à Lenzerheide (Suisse). Malgré cette razzia, qui laisse espérer un total équivalent ou supérieur à celui réalisé l’an passé à Nove Mesto (13) en République tchèque, la meilleure Française cette saison, Lou Jeanmonnot, passe un peu à côté de ses Mondiaux.

Sixième du sprint, quatrième de la poursuite, la plus fine gâchette des Bleus a arraché le bronze sur l’individuel, mardi 18 février, remporté par Julia Simon. Un bilan mitigé, rehaussé par l’or décroché par équipe dans le relais mixte (2 x 6 km), qui ne correspond au potentiel de la Franc-Comtoise, perturbée par la pression dont elle ne fait pas mystère.

Six victoires individuelles cette saison

La native de Pontarlier, qui compte six victoires individuelles au compteur en Coupe du monde cette saison (3 en poursuite, 1 en sprint et 2 sur l’individuel), dont quatre sur les cinq dernières courses, a l’occasion de se rattraper avec le relais féminin, samedi, mais surtout la mass start, ultime épreuve individuelle, dimanche, qui concerne les 30 meilleures biathlètes.

Présentée comme l’une des grandes favorites de ces Mondiaux, la biathlète de 26 ans a du mal avec ce nouveau statut, elle qui dispute seulement sa troisième saison complète en Coupe du monde. « Il va falloir que je gère bien cette attente », s’inquiétait-elle avant le début des championnats du monde.

Depuis l’ouverture de la saison à Kontiolahti (Finlande), Lou Jeanmonnot (89 % de réussite au tir la saison dernière) rend coup pour coup à l’Allemande Franziska Preuss, leader au général avec 92 points d’avance. Mais parfois, la pression l’accable au lieu de la révéler. « Savoir que je peux jouer devant m’a déjà fait réaliser quelques contre-performances depuis le début de saison : le sprint à Hochfilzen (Autriche), le passage au Grand-Bornand… » énumère celle qui a connu un grand trou d’air dans la station de Haute-Savoie, avec trois courses loin de ses standards habituels (14e au mieux, en mass start).

Le 19 janvier à Ruhpolding, en Allemagne, après avoir remporté l’individuel trois jours plus tôt, la Française joue la gagne dans la mass start avec un sans-faute jusqu’au dernier tir debout, au cours duquel elle manque deux cibles, laissant Franziska Preuss prendre le large au général.

« Je n’ai pas eu souvent un maillot de couleur, que ce soit jaune (leader du général – NDLR) ou rouge (leader de la discipline – NDLR). (…) Je ne suis pas super à l’aise avec l’impression d’être regardée. Je suis plus à l’aise fondue dans la masse », confie la Doubiste, qui a commencé le biathlon à l’âge de 14 ans au club Olympic Mont d’Or, où elle est toujours licenciée. Pour évacuer ce stress, elle travaille depuis avec une psychologue du sport, avec qui elle évoque son « appréhension personnelle de la course, du public, des enjeux médiatiques ».

Une collaboration qui fonctionne, comme en témoigne le week-end parfait à Anterselva (Italie) fin janvier, juste avant les Mondiaux. À un an des JO 2026 de Milan-Cortina, la biathlète a marqué les esprits avec deux belles victoires en autant de courses (poursuite et sprint), réduisant ainsi son retard au classement général avec Franziska Preuss, impressionnante de régularité avec quasiment toujours une place sur le podium. Pour son entraîneur, Cyril Burdet : « Lou est encore en train d’apprendre, mais elle apprend vite. »

La même carabine depuis ses débuts

Avec encore trois étapes et sept courses individuelles à disputer après les Mondiaux, Lou Jeanmonnot, qui à chaque fin de saison se fait tatouer un nouveau dessin sur la peau (fleur, flocon, tête de tigre et un motif maori), peut revenir sur Franziska Preuss. « Pour le classement général, tout peut se passer, il reste un tiers de la saison. Franziska est tellement régulière, elle arrive à faire de ses mauvaises courses des courses très correctes, alors que mes mauvaises courses sont très mauvaises », déplore celle qui utilise la même carabine 22 long rifle depuis douze ans, que seul son père a le droit de réparer.

L’an dernier, la Française avait fini en trombe, montant sur le podium des six dernières courses individuelles avec un succès à la clé lors de la dernière mass start, à Canmore au Canada, pour finir à seulement 23 points de la lauréate du gros globe de cristal, l’Italienne Lisa Vittozzi. Distancée depuis décembre en raison d’une infection au Covid, qui l’avait privée de deux courses et de précieux points, elle concourait sans pression. « J’ai bien fini parce que j’étais complètement libérée de l’enjeu. Là, c’est différent. Ça va être stressant. Presque angoissant. Il y a des choses qui vont pouvoir peut-être me tétaniser… » Ou, au contraire, la galvaniser.

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