CARTES. Frappes aériennes, populations déplacées... Visualisez les zones de la Cisjordanie occupée visées par l'offensive de l'armée israélienne
"La Cisjordanie est dans une situation de violence sans précédent", a alerté mercredi 5 février Jonathan Fowler, porte-parole de l'agence de l'ONU pour les réfugiés palestiniens (Unrwa) auprès de franceinfo. Depuis le 21 janvier, les frappes aériennes israéliennes sur la région occupée par les troupes de l'Etat hébreu et les affrontements avec des groupes armés palestiniens se sont intensifiés. Le ministère de la Santé palestinien fait état de 70 personnes tuées par Israël en Cisjordanie occupée depuis le 1er janvier, a rapporté l'AFP cette semaine.
Cette vaste opération militaire dans le nord de la Cisjordanie occupée, baptisée "Mur de fer", a commencé deux jours après l'entrée en vigueur d'un cessez-le-feu à Gaza. Entre le 21 et le 31 janvier, plusieurs frappes aériennes israéliennes et de nombreux affrontements ont été référencés par l'organisation Armed Conflict Location and Event Data (Acled), spécialisée dans la collecte d'informations sur les conflits armés dans le monde, et que vous pouvez visualiser dans la carte ci-dessous. De nouvelles frappes dans la région de Jénine ont aussi eu lieu dans la nuit du 1er au 2 février, selon un communiqué israélien, détruisant de nombreux bâtiments.
L'objectif, selon le Premier ministre israélien, est "d'éradiquer le terrorisme" dans les régions du nord, bastions de groupes armés palestiniens. L'armée israélienne a affirmé mardi que ses forces avaient tué "environ 55 terroristes" et interpellé 380 individus recherchés en Cisjordanie en janvier.
Des méthodes "similaires à celles observées à Gaza"
Depuis le début de l'offensive, l'Etat hébreu a déployé bulldozers, drones et véhicules blindés dans le camp de Jénine, tuant au moins 17 civils aux alentours de la ville selon l'ONU. "On voit une multiplication de l'utilisation d'armements de guerre comme des drones ou des frappes aériennes, qui causent d'importantes démolitions de bâtiments, des méthodes similaires à ce qu'on a pu observer à Gaza", note le porte-parole de l'Unrwa.
Ahmed Benchemsi, porte-parole de l'ONG Human Rights Watch (HRW), dénonce quant à lui l'intensification "des restrictions d'accès" sur le territoire palestinien. Douze nouveaux points de contrôles ont été comptabilisés en Cisjordanie depuis le début de l'année, des mesures qui "accentuent la différence de traitement entre les Palestiniens et les Israéliens", d'après l'organisation internationale de défense des droits humains qui évoque un "apartheid". En juillet 2024, dans un avis, la Cour internationale de justice, plus haute juridiction de l'ONU, a jugé "illégale" l'occupation par Israël de territoires palestiniens occupés, établissant une "discrimination systémique fondée, notamment, sur la race, la religion ou l’origine ethnique".
D'importants déplacements de population
Face à la violence, le camp de Jénine, "rendu inhabitable" par les frappes israéliennes, a été en grande partie vidé des 24 000 personnes qui s'y trouvaient, selon l'ONU. Des témoignages d'habitants ayant fui le camp rapportent de bombardements israéliens. Du côté de Tel-Aviv, le ministre de la Défense a affirmé le 29 janvier lors d'une visite à Jénine que Tsahal se maintiendrait dans le camp même après l'opération "afin de s'assurer que le terrorisme ne revienne pas". A Tulkarem, dans un autre camp de réfugiés géré par l'Unrwa, 2 500 foyers ont été déplacés, explique Jonathan Fowler. Cela représente environ 12 500 personnes.
"Nous rencontrons de grandes difficultés à fournir de l'aide humanitaire", déplore l'Unrwa, qui a dû fermer ses 13 écoles dans la région de Jénine et ses centres de santé, faute de sécurité. "Le camp a été tellement endommagé qu'il est quasiment inhabitable", explique Jonathan Fowler, précisant que depuis le début de l'opération Mur de fer, 23 bâtiments du camp ont été totalement détruits et une centaine d'autres sont désormais inhabitables.
L'ONU a dénoncé, le 24 janvier, l'utilisation par Israël de "méthodes de guerre" et "le recours illégal à la force létale" dans le nord de la Cisjordanie. L'organisation internationale Médecins sans frontières a dénoncé dans un rapport publié début février l'escalade des attaques israéliennes et les "immenses pressions" sur le système de santé en Cisjordanie depuis un an et demi. L'ONG fait état d'"attaques au cours desquelles les forces israéliennes ciblent les hôpitaux, détruisent des centres médicaux de fortune dans les camps de réfugiés, mais aussi harcèlent, arrêtent, blessent et tuent des secouristes et travailleurs médicaux".
Selon le ministère de la Santé, depuis octobre 2023, au moins 850 Palestiniens ont été tués par l’armée israélienne ou par des colons israéliens en Cisjordanie, rapporte l'AFP. Dans le même temps, Israël a déploré la mort de 29 de ses ressortissants, dont des soldats, victimes d'attaques palestiniennes ou dans des opérations militaires.