Pour le Nouveau Front populaire, y aura-t-il une vie après le budget ?
Le fond de l’air est plus frais en ce début février, y compris à gauche, où il se fait glacial. Alors que François Bayrou veut imposer son budget à coups de 49.3, les formations alliées au sein du Nouveau Front populaire (NFP) sont parties pour faire chemin séparé lors du scrutin crucial de ce mercredi 5 février : les socialistes n’entendent pas voter la censure du gouvernement, contrairement aux insoumis, aux écologistes et aux communistes. Ce désaccord aura-t-il la peau du NFP ?
Beaucoup, à la France insoumise, considèrent que le choix du PS acte une rupture. « Le budget est le seul texte présenté à l’Assemblée nationale qui détermine si vous appartenez à la majorité ou à l’opposition », prévient Éric Coquerel, député FI. Sa présidente de groupe, Mathilde Panot, estime même que « ceux qui ne voteront pas les motions de censure seront des soutiens de fait du gouvernement ». Pour les prochaines législatives, le mouvement de Jean-Luc Mélenchon envisage d’ailleurs de présenter des candidats « fidèles au programme du NFP » face aux députés de gauche qui ne voteraient pas la censure.
« Le NFP n’est pas un parti unique »
Le PS, pour sa part, explique ne pas avoir changé de ligne programmatique et assure ne pas avoir tourné le dos au NFP. Si les socialistes considèrent que ce n’est pas sur le budget qu’il faut faire tomber le gouvernement Bayrou, ils se déclarent toujours comme membres de l’opposition.
« Nous avons dit que si le budget était présenté, nous voterions contre », rappelle Emmanuel Grégoire, député de Paris, qui justifie la non-censure dans l’immédiat : « Nous ne voulons pas prendre le risque de ne pas doter la nation d’un budget. » Des élus PS soulignent également qu’il faut savoir entendre « les appels multipliés de maires et de présidents d’association qui confient à quel point ils sont en difficulté faute de budget ».
Il n’empêche que les communistes et les écologistes fulminent eux aussi devant la copie du gouvernement et regrettent le choix du PS. Sans pour autant considérer que cette division acte la mort du NFP, ou bien sa poursuite sans les socialistes. « Nous avons déjà eu des désaccords sur la stratégie parlementaire, tempère Léa Balage El Mariky, porte-parole des députés écologistes. Le NFP n’est pas un parti unique, mais une coalition électorale. Ce n’est pas un cahier des charges avec 92 questions. C’est la promesse faite aux électeurs que nous avions la capacité de gouverner, de changer leur vie. »
« Ce désaccord ne marque pas une rupture »
« Ce désaccord ne marque pas une rupture. Dans une coalition, il est normal que nous ayons des différences, sinon ce serait un parti », relève Stéphane Peu. Le communiste rappelle que le NFP n’était pas à l’unisson concernant la participation aux discussions sur le budget avec le gouvernement. « Nous ne le sommes pas non plus sur la question de la censure », modère-t-il. « Je regrette la décision des socialistes. Je ne la sous-estime pas. Mais je ne suis pas pour que le NFP éclate », ajoute Alexis Corbière.
L’élu de l’Après (Association pour une République écologique et sociale) souligne que cette union de la gauche « est née afin de contrer l’extrême droite » et mesure que les coups portés au NFP peuvent venir de différents côtés, en rappelant, par exemple, que la volonté de la FI de ne fusionner ni au premier, ni au second tour de l’élection municipale partielle de Villeneuve-Saint-Georges (Val-de-Marne) ces derniers jours conduit à la fois à la division et à la défaite.
Plusieurs élus écologistes, PCF, Génération.s ou membres de l’Après signalent enfin qu’ils refusent l’idée selon laquelle il existerait deux « gauches irréconciliables » et appellent le NFP à rester uni. La FI, de son côté, travaille déjà à une candidature derrière Jean-Luc Mélenchon pour 2027, ce que les autres forces du NFP refusent.
Les votes du PS et de la FI sur la censure ou non du gouvernement sont d’ailleurs également à analyser de ce point de vue : les insoumis entendent provoquer la tenue d’un scrutin présidentiel le plus vite possible (une chute de François Bayrou pouvant entraîner, selon eux, celle d’Emmanuel Macron), quand les socialistes craignent d’être pris de vitesse ou de voir le RN l’emporter en pareil cas.
Les divergences de ton et de stratégie, le PS estimant que la FI s’est abîmée et qu’une place est à prendre pour incarner une gauche dite « respectable » et « de gouvernement », composent aussi l’équation. Reste une question tout entière : si la gauche venait à exploser à terme du fait de ses désaccords, lui resterait-il seulement une chance pour la gauche de battre la droite et l’extrême droite ?
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