France-Allemagne : les frontaliers payent cher l’escalade anti-migratoire du nouveau gouvernement Merz
Première décision concrète du nouveau gouvernement du Chancelier Friedrich Merz, un durcissement de la politique migratoire assorti d’un contrôle renforcé à toutes les frontières, fait resurgir files d’attente et autres désagréments que l’on croyait disparus. Fidèle aux annonces tonitruantes qui l’avaient conduit à s’affranchir du cordon sanitaire adopté par toutes les autres formations, pour pactiser fin janvier dans l’ancien Bundestag avec l’AfD, le gouvernement Merz a mis en place, aussitôt arrivé à la chancellerie, des mesures de contrôles aux frontières, de renvois des demandeurs d’asile « illégaux » et de restriction du regroupement familial.
Ces dispositions ont provoqué aussitôt la réapparition de gigantesques bouchons, assortis de contrôles dans les trams au-dessus du Rhin entre Strasbourg et Kehl, au grand dam des maires français et allemand des deux cités qui ont voulu dénoncer ensemble et publiquement ces restrictions à la liberté de circulation entre les deux pays.
« J’ai l’impression de revenir 20 ans en arrière »
Jeanne Barseghian (les Verts), maire de Strasbourg et Wolfram Britz (sans étiquette) ont déclaré : « Nous ne pouvons accepter que le nouveau gouvernement fédéral renforce les contrôles au point de compliquer la vie de milliers de frontaliers, ainsi que de familles réparties des deux côtés du Rhin ». La décision prise au moment des célébrations du 8 mai et de ses messages de paix et de réconciliation, « témoigne, à notre avis, ajoutent les deux maires, d’un manque de conscience historique et de tact. »
Même tableau, plus de 1 000 kilomètres à l’Est, à la frontière polono-germanique, Bartlomiej Bartczak, ex-maire de Gubin, avait l’habitude d’aller se promener en Allemagne de l’autre côté de la Neisse, sans même prendre ses papiers. Interrogé par l’AFP, il s’insurge : « J’ai l’impression de revenir 20 ans en arrière. » La libre circulation entre pays de l’espace Schengen est, de fait, abolie. Le nouveau ministre de l’intérieur, le très droitier Alexander Dobrindt de la CSU bavaroise, est des plus explicite. Rejoignant les « arguments » de l’AfD comme l’avait fait Merz en janvier il martèle : « La charge de l’immigration est trop lourde. Les communes sont débordées, le système de santé est débordé, le système social est débordé ».
Comme en écho de l’autre côté de la mer du Nord, les autorités travaillistes du Royaume-Uni ont annoncé ce 12 mai leur intention de renforcer drastiquement les mesures anti-migrants. « L’immigration diminuera », a déclaré Keir Starmer, le premier ministre britannique, avant de glorifier : « Nous créerons un système qui est contrôlé, sélectif et juste. »
Ces arsenaux anti-migrants sont présentés dans les deux pays comme des moyens de limiter les influences de partis d’extrême droite en plein essor. Il y a tout lieu pourtant de penser qu’elles vont, au contraire, constituer de nouveaux stimulateurs pour l’AfD d’Alice Weidel en Allemagne ou pour le parti de la Réforme UK du populo-souverainiste Nigel Farage au Royaume-Uni. Car elles donnent crédit et légitimité à leurs démarches foncièrement racistes et destinées à livrer les migrants en boucs émissaires de l’intense malaise qui s’est répandu sur ces sociétés capitalistes taraudées par la crise.
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