Que veut dire "mettre en place une économie de guerre" ?

Les mots sont dans la bouche de tous les états-majors politiques : "Davantage de pays européens vont augmenter leurs dépenses de défense", affirme le secrétaire général de l'Otan, Mark Rutte, dimanche 2 mars. "L’objectif des Européens doit être de porter les dépenses de défense entre 3 et 3,5% du PIB", déclare pour sa part le président de la République, Emmanuel Macron, sur le Figaro.fr. Tout le monde est en ordre de bataille.

Concrètement, que veut dire "mettre en place une économie de guerre" ? C’est mobiliser les industries nationales. À ce sujet, la France n’est pas dépourvue avec des groupes comme Thales, Safran, Dassault Aviation. C’est aussi monopoliser certaines chaînes de production comme en Belgique où le gouvernement n’exclut pas de demander à Audi (filiale de Volkswagen en difficulté) de transformer son usine bruxelloise en site de fabrication de véhicules militaires. Et puis c'est aussi de la commande publique que doivent passer les États aux industriels. Pas uniquement au niveau national... et tant, qu'à faire, acheter européen. Est-il normal qu'un pays comme la Pologne achète des avions F-35 aux Américains ?

L’économie de guerre, c’est aussi et surtout de l’argent public. Pour ce qui est de la France, le ministre de l’Économie et des Finances, Éric Lombard, promet d’annoncer son plan de bataille le 20 mars. Avec le ministre des Armées, Sébastien Lecornu, il rendra compte publiquement de la mobilisation des banques et des investisseurs français pour faciliter cet effort de défense. L’objectif est de mobiliser davantage l’investissement privé pour venir en appui du budget de la Défense nationale (50 milliards d’euros cette année / 68 milliards d'euros en 2030. La loi de programmation militaire 2024-2030 prévoit 413 milliards d'euros en cumul), insuffisant aux dires du ministre Sébastien Lecornu sur franceinfo jeudi 27 février.

Un contexte budgétaire difficile

Les finances de tous les États européens sont exsangues. L’idée fait son chemin : sortir les dépenses de Défense du calcul des déficits publics. Cela revient à rendre caduques les objectifs fixés par le traité de Maastricht (limiter les déficits publics à 3% du PIB). "Caduque", le terme a été utilisé par la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, il y a quelques jours. Même la rigoriste Allemagne y est prête : "il faut assouplir les règles budgétaires pour dégager des moyens supplémentaires", assure la cheffe de la diplomatie allemande, Annalena Baerbocka.

Reste l’abondante épargne des Français. Quelque 6 000 milliards d’euros placés dans l’assurance-vie, les actions à la bourse et les produits défiscalisés comme le livret A. Le président de la République, Emmanuel Macron, n’exclut pas d’y faire appel. Financer l’économie de guerre tout en maîtrisant notre dette ? Le concours Lépine des mesures fiscales est lancé.