INFOGRAPHIES. Achat, annexion, conflit armé... Comment les Etats-Unis se sont agrandis, de la Louisiane à l'Alaska
Donald Trump le répète à qui veut l’entendre : il veut mettre la main sur le Groenland, "d'une manière ou d'une autre". Ce qui n’a rien de nouveau : on en parle à la Maison-Blanche depuis 1867 ! Et lors de son premier mandat (2017-2021), Donald Trump avait déjà soulevé l'idée d'acheter ce territoire, dépendant du Danemark. Autres cibles répétées des visées expansionnistes du président américain : le Canada, pour qui, à l'en croire, la "seule chose sensée" à faire est de devenir le "51e Etat américain" ; ou encore le Panama, dont il souhaite "reprendre" le canal.
Menacer, annexer ou sortir le chéquier pour s’agrandir, les États-Unis l’ont déjà fait, et souvent de façon autoritaire. Retour sur les principales acquisitions territoriales américaines depuis la déclaration d'indépendance, en 1776.
1 L’achat de la Louisiane
Au-delà des 13 premiers États, dont les contours sont arrêtés avec la Grande-Bretagne par le traité de Paris, qui fixe en 1783 les frontières des États-Unis, l’expansion territoriale américaine commence par un achat. Celui de la Louisiane, un territoire français alors énorme qui s’étend des rives du Mississippi, à l'est, aux Rocheuses, à l'ouest, et du golfe du Mexique, au sud, jusqu’à ce qui deviendra la frontière de la fédération canadienne, au nord.
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Pour 15 millions de dollars, Robert Livingston négocie auprès de Talleyrand l’achat de cette possession française, conclue en 1803. Une opération qui permet aux États-Unis de Thomas Jefferson de se placer au troisième rang mondial en termes de superficie.
2 L’annexion de la Floride
La stratégie d’expansion territoriale américaine n’est pour autant pas inscrite dans la seule logique financière. En témoigne le contentieux sur la Floride. En 1810, la partie occidentale, disputée avec l’Espagne, est déclarée possession américaine par le président James Madison. Il faudra attendre 1819 pour que soit négocié le rachat global de la région dans le cadre du traité d'Adams-Onís. En 1821, pour 5 millions de dollars, la Floride devient américaine.
3 Le Mexique grignoté
Dans les années 1830, le Texas est encore un État du Mexique, ce jeune pays qui vient d’obtenir son indépendance. Mais l’implantation de colons américains crée les conditions d’une sécession à partir de 1835. Et dix ans plus tard, la république du Texas est annexée puis devint le 28e État des États-Unis.
"Une déclaration de guerre", estime le président mexicain Antonio López de Santa Anna, qui n’arrêtera pas Washington, bien décidé à élargir son territoire à l’ouest. Mais le Mexique ne veut pas d’une transaction. C’est le début de la guerre américano-mexicaine, un conflit qui durera deux ans.
Le Mexique s'incline. En plus du Texas, selon les termes du traité de Guadalupe Hidalgo, le jeune pays se défait en 1848 des territoires recoupant les actuels États de Californie, de l’Utah, du Nevada, de l’Arizona et du Nouveau-Mexique. Rien d’une opération financière ? Presque : les États-Unis concèdent quand même une compensation de 18 millions de dollars pour cette "cession mexicaine".
Rien de comparable, toutes proportions gardées, avec les 10 millions de dollars de "l'achat Gadsden", qui donne aux États-Unis une maigre bande de terre le long de la frontière avec le Mexique, en 1853. Le passage du chemin de fer est-ouest n’a pas de prix !
4 L’Alaska, jackpot du Grand Nord
72 millions de dollars. C’est la plus grosse somme consentie par les États-Unis pour agrandir son territoire. Mais pour un morceau de choix, et sans faire parler la poudre. En 1867, l’empire de Russie du tsar Alexandre II est en grande difficulté financière. Incapable, en tout cas, de maintenir ou de défendre ses colonies les plus excentrées. C’est le cas de l’Alaska, territoire du Grand Nord très éloigné de Saint-Pétersbourg, impossible à coloniser durablement ou à préserver des appétits de son voisin au sud, la Grande-Bretagne, souveraine au Canada.
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Les conditions sont donc réunies pour ouvrir des négociations avec les États-Unis, où le projet ne fait pas l’unanimité. On critique la "glacière [du secrétaire d’État] William Henry Seward" ou "Le jardin aux ours polaires [du président] Andrew Johnson ". Mais la raison l’emporte : poisson, or, fourrures… Toutes ces ressources valent bien l’investissement, ratifié le 9 avril 1867. Avec ce territoire, les États-Unis gagnent 20% en superficie.
5 Porto Rico, Guam et les Philippines, les scories de l’empire colonial espagnol
À la fin du XIXe, les États-Unis entretiennent avec Cuba d’intenses échanges économiques. Les investisseurs américains sont très implantés dans la production, le raffinage et le commerce de canne à sucre, notamment. Mais l’empire espagnol s’accommode mal de ces relations avec sa colonie. Et des différends récurrents conduisent à la guerre hispano-américaine, en 1898. Un conflit de cinq mois dont l’Espagne sortira perdante.
Porto Rico, Guam, les Philippines passent sous souveraineté américaine. Les États-Unis versent 20 millions de dollars à l'Espagne en compensation. Cuba obtient au passage son indépendance, mais reste bien fragile face à l'appétit des Etats-Unis, qui imposent un protectorat militaire et une occupation de l'île jusqu'en 1909.
Aujourd'hui, Porto Rico est un "Etat libre associé" des États-Unis, et ses habitants ont la nationalité américaine. Guam est un "territoire non incorporé organisé", et une importante base aéronavale américaine dans le Pacifique. Les Philippines, elles, sont indépendantes depuis 1946.
6 Les îles Vierges, achetées au Danemark
En 1917, Washington achète les îles Vierges à la couronne danoise pour 25 millions de dollars. Une opportunité stratégique aux yeux des Américains qui lorgnaient depuis des décennies sur ces îles des Antilles, proches du canal de Panama. Elles sont aujourd'hui un "territoire non incorporé organisé" des Etats-Unis, sous le nom d'îles Vierges des Etats-Unis pour les différencier des îles Vierges britanniques voisines.
Cette acquisition est le signe que, moyennant finances, le Danemark a déjà consenti à céder des territoires. Mais jamais, à ce jour, Copenhague n’a envisagé de vendre le Groenland, pourtant convoité depuis 1867. Devenu territoire autonome du Danemark, en marche pour son indépendance, résistera-t-il aux sirènes américaines ? Les élections législatives du 12 mars ont porté au pouvoir une formation de centre droit favorable à l’indépendance à terme et plutôt hostile aux projets de Donald Trump.