La migration est une richesse. L’immigration a même contribué à l’augmentation du produit intérieur brut (PIB) de la France en ajoutant 1,02 % de croissance par an entre 2006 et 2018, selon l’OCDE. En cette période de discussions parlementaires au sujet des projets austéritaires de lois de finances de l’État (PLF) et de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2026, France terre d’asile propose de tirer partie de ce constat en renversant les perspectives : les personnes venues d’ailleurs ne sont pas un coût comme l’affirme l’extrême droite soutenue par une partie des LR.
« Une politique migratoire plus humaine et efficace rapporterait 3,3 milliards d’euros par an », affirme l’association de défense du droit d’asile dans une étude publiée ce vendredi 7 novembre.
« Dans l’intérêt de la France »
« Notre politique migratoire actuelle est un double gâchis : un gâchis humain, indigne de notre République, et un gâchis financier qui coûte des milliards aux contribuables. Il est temps d’avoir le courage politique de faire rimer nos principes de fraternité avec l’efficacité économique. Ce plan montre que c’est possible et que c’est dans l’intérêt de la France », insiste Najat Vallaud-Belkacem, présidente de l’ONG.
Ces 3,3 milliards d’euros par an en gains nets pour l’État et la Sécurité sociale, France terre d’asile les trouvent à cinq niveaux :
- Côté hébergement des demandeurs d’asile, développer le nombre de places dédiées à l’asile (Cada/Huda) reviendrait moins cher qu’avoir recours à des places d’urgence généralistes (CHU/CHRS), dispositif plus onéreux et moins adapté. Economie attendue pour le budget de l’État : 14 millions d’euros par an. En 2024, 72 % seulement des demandeurs d’asile ont été accueillis dans des places dédiées. L’augmentation des moyens budgétaires prévus dans le PLF 2026 est en trompe-l’œil : les places en CADA et HUDA vont passer de 122 582 en 2024 à 111 855 en 2026 (113 258 en 2025).
- Côté emploi, les demandeurs d’asile ont interdiction de travailler durant six mois. 139 millions d’euros pourraient être gagnés en faisant sauter cette interdiction, cette période de travail déclarée générant des cotisations sociales supplémentaires et un moindre versement d’allocations et aides à l’hébergement.
- Un examen rationnel des procédures d’Obligations de quitter le territoire français (OQTF) démontre que beaucoup de moyens sont engagés, pour un taux d’exécution très faible, « car nombre d’entre elles sont émises sans considération pour la situation des personnes », relève l’association. « Réduire le nombre d’OQTF émises et réallouer les moyens vers l’instruction des dossiers de demande de titre de séjour », ferait économiser 41 millions d’euros par an.
- 156,2 millions d’euros sont budgétés dans le PLF 2026 en crédits de paiement pour l’augmentation des places en Centres de rétention administrative (CRA), pour porter la capacité de rétention de 1 959 places actuellement à 2 299 en 2026. « À plus de 600 euros par jour et par place », l’efficacité de cet enfermement est limitée, note France Terre d’asile qui propose de rompre avec l’objectif de 3 000 places en 2027. Une politique de « rétention ciblée et restreinte », plus efficace, permettrait à l’inverse d’économiser 219 millions d’euros par an.
- Enfin, régulariser 250 000 travailleurs irréguliers présenterait deux vertus. D’une part, de mettre fin à une hypocrisie alors que ces travailleurs œuvrent déjà dans l’économie informelle et qu’aux dires mêmes du Medef, « 3,9 millions » de salariés étrangers seraient nécessaires à l’économie française d’ici 2050. D’autre part, ce transfert vers l’économie formelle ferait gagner 2,9 milliards d’euros par an en impôt sur le revenu et cotisations sociales supplémentaires.
« Notre plan répond à ces absurdités par le bon sens. Il montre que cesser de gaspiller l’argent public dans des politiques inefficaces et investir dans l’intégration rapide des personnes n’est pas seulement humain : c’est la seule approche budgétaire véritablement responsable », souligne Vincent Beaugrand, directeur général de France terre d’asile.
Des moyens publics captés pour le répressif
Malheureusement, le PLF 2026 n’en prend pas le chemin. Les crédits de paiement (CP) de la mission « Immigration, asile et intégration », enregistrent une hausse de 3,83 % par rapport à 2025. Mais cette hausse va vers le « programme 303 immigration et asile » (+ 4,5 %), qui regroupe aussi bien le volet hébergement que les moyens de rétention et de reconduite à la frontière. Le « programme 104 Intégration et accès à la nationalité française », qui ne représente déjà que 20 % des crédits totaux, voit ses moyens augmenter d’un petit 0,65 %, donc en dessous de l’inflation.
Cette priorisation vers le répressif a été mise en lumière par le projet de décret visant à restreindre l’accès à l’AME concernant l’Aide médicale d’État. Préparé par l’ancien gouvernement Bayrou, ce texte suit toujours son processus de consultations. Il vise à introduire de nouvelles contraintes administratives, comme la fourniture obligatoire d’un document avec photo pour prouver l’identité du bénéficiaire et celles des personnes à sa charge.
Or, selon le rapport d’information sénatorial de juillet dernier sur l’aide médicale citant le Samu social et l’IRDES, « près de 50 % des personnes éligibles n’ont pas recours » à ce dispositif de prise en charge médical, qui offre actuellement une couverture à 100 % pour certains soins médicaux aux étrangers en situation irrégulière et à revenus très faibles.
« Le cadre qu’il pose est clairement coercitif et témoigne d’une volonté politique de restreindre, plutôt que de garantir, l’accès aux soins pour toutes et tous », dénoncent dans un communiqué commun la CFDT, la CGT, FO et l’UNSA, après que le conseil de l’Assurance maladie, sorte de Parlement de l’institution, a rejeté ce jeudi le texte (la CFTC aurait voté pour, la CFE-CGC se serait abstenue, tout comme le Medef côté patronal, selon l’AFP).
Ce projet de décret n’a pour l’heure pas été repris à son compte par le gouvernement Lecornu. En revanche, l’exécutif prépare un autre projet de décret, permettant « aux consulats d’accéder à la base des bénéficiaires de l’AME ». La mesure vise à « éviter l’octroi de visas à des touristes médicaux », a indiqué lundi la ministre de la Santé Stéphanie Rist à la commission des Affaires sociales de l’Assemblée.
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