Inondations : « Il existe des leviers d’adaptation efficaces au changement climatique »

Quels sont les liens de ces précipitations avec le changement climatique ?

Cet événement, annoncé par Météo France, est historiquement le plus important depuis une quarantaine d’années dans la région. Mais il fait partie de la variabilité normale du cycle de l’eau : en 2025 à Rennes, en 2024 dans le Pas-de-Calais… Il y a une composante parfaitement naturelle, avec une succession de pluies fortes qui amènent les rivières à déborder.

On peut néanmoins s’interroger sur des facteurs aggravants comme le changement climatique. La thèse de Ronan Abhervé, publiée en 2022, présentait une analyse rétrospective de l’évolution dans le temps des précipitations annuelles de 1960 à 2020 dans la région rennaise. Elle montrait qu’au cours des dernières décennies, les hivers ont tendance à devenir plus arrosés et les étés moins, au contraire.

On constate une intensification des contrastes hydrologiques entre la saison humide et la saison sèche. Toutes ces signatures de l’anthropocène, des activités humaines se retrouvent partout à des degrés divers, selon les climats, la densité de population et les types d’agriculture. Et cela constitue une perturbation très importante du cycle de l’eau, qui s’aggrave.

Les fortes pluies actuelles sont cohérentes avec ce schéma, sans qu’on puisse être sûr qu’elles n’auraient pas eu lieu même en l’absence de changement climatique. Le changement climatique n’est pas la cause unique de ces événements, mais il est probablement responsable du fait qu’ils soient très importants. Il a tendance à rendre les épisodes pluvieux plus intenses, et à rendre ceux qui sont moins forts plus fréquents.

Quid des autres impacts des activités humaines ?

L’agglomération de Rennes s’est fortement densifiée : il serait surprenant que l’imperméabilisation des sols n’ait pas augmenté. Lorsque les surfaces d’un bassin versant sont davantage imperméables, l’eau s’infiltre moins et ruisselle plus vite. Elle atteint donc les cours d’eau beaucoup plus rapidement et cet excès cause les inondations. C’est ce qui s’est passé à Valence, en Espagne, en octobre, d’une manière plus dramatique qu’à Rennes.

Et, en général, à l’amont d’une ville importante, il y a un bassin versant avec une partie agricole. Quand les paysages y ont été très simplifiés, cela accélère les écoulements de l’eau. Ces simplifications, en milieu rural, sont souvent liées à l’intensification agricole. La suppression des haies en Bretagne est très bien documentée, les bocages ont quasiment disparu.

Or, les haies ralentissent le ruissellement le long des pentes, ce qui favorise l’infiltration de l’eau au niveau des bosquets. De plus, l’eau qui ne s’infiltre pas ne recharge ni les sols ni les nappes, et manque quelques mois plus tard lors de la saison sèche. Enfin, dans les paysages ruraux, les rectifications des cours d’eau font également partie des simplifications. Leurs méandres ont été rectifiés pour utiliser plus facilement les bordures, notamment pour passer les engins agricoles.

Comment lutter contre ces inondations ?

Il y a des expériences, qui fonctionnent souvent, de renaturaliser des tracés des petits cours d’eau pour rétablir les méandres et ainsi ralentir l’écoulement de l’eau. Il est également possible de renaturer le lit majeur des cours d’eau, c’est-à-dire les zones basses autour des cours d’eau qui ont été utilisées par l’agriculture avec du drainage.

Autre piste : laisser des champs d’inondation à proximité des petits cours d’eau, pour atténuer les inondations à l’aval le long des grands cours d’eau plus urbanisés, avec plus de personnes vulnérables. Une inondation a moins de conséquences nuisibles sur un champ qu’un bâtiment.

Mais cela pose des problèmes pour les agriculteurs : si leurs parcelles sont trop humides, ils ont du mal à les exploiter, avec des pertes de rendement. Il y a un équilibre à trouver. Il faut réaugmenter les capacités de stockage et d’infiltration d’eau par les sols agricoles, à la fois pour lutter contre les inondations à l’aval et avoir plus d’eau pour faire face aux sécheresses.

Dans une région donnée, on a prise sur l’artificialisation, l’imperméabilisation, la simplification des paysages, le mode d’agriculture. Cela offre des leviers d’adaptation efficaces au changement climatique et des solutions au problème des extrêmes hydrologiques de crues et de sécheresse, qu’on peut mobiliser en assez peu de temps. Alors que lutter contre le changement climatique… j’en rêve ! Mais, pour l’instant, on ne voit pas venir grand-chose.

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