À Salbris, Alexandre Avril en guerre ouverte contre les demandeurs d’asile
Quand on livre bataille, il n’y a pas de petite mesquinerie : c’est ce qu’a dû se dire Alexandre Avril, le maire ciottiste de Salbris (Loir-et-Cher), en guerre ouverte contre le centre d’accueil de demandeurs d’asile (CADA) hébergé dans la ville. Longtemps, une convention a permis à la soixantaine de demandeurs d’asile présents de bénéficier d’un accès au gymnase de Salbris, dans le cadre d’un dispositif pilote, le DIPS, pour « dispositif d’inclusion par la pratique sportive ».
Depuis 2014, la région Centre-Val-de-Loire est pionnière, en partenariat avec la DRJSCS (Direction régionale jeunesse, sports et cohésion sociale), déléguant notamment ses moyens sur le terrain à l’Ufolep (Union Française des Œuvres Laïques d’Éducation Physique), créée en 1928 au sein de la Ligue de l’enseignement, un mouvement d’éducation populaire.
Le dispositif qui emploie dix éducateurs sportifs et une trentaine de travailleurs sociaux a vocation à faire de la pratique sportive « un vecteur d’inclusion sociale, de remobilisation personnelle, de renforcement de l’estime de soi et de préservation de l’état de santé ». Ses animateurs interviennent en résidences sociales, en accueils de jour, auprès de victimes de violence ou en situation d’isolement ou d’exclusion lourde. Et auprès de demandeurs d’asile.
Xénophobie électorale et priorité aux associations locales
Et c’est là où cela coince sans doute pour Alexandre Avril, qui a fait du CADA de Salbris, ouvert en 2016, un argumentaire de xénophobie électorale. Géré par l’association Coallia, il héberge des personnes étrangères qui disposent d’une autorisation provisoire de séjour le temps que l’office français de protection des réfugiés et des apatrides statue sur leur dossier. Pourtant, relève un habitant de Salbris qu’avait interrogé l’Humanité en juin 2024, exiger la fermeture de cette structure, « c’est absurde. Le CADA, avec les familles qui y sont hébergées, nous apporte quelques baguettes en plus à la boulangerie, d’excellents joueurs de foot dans les équipes avec nos gamins, et ça permet surtout d’éviter des fermetures de classes supplémentaires. »
Depuis 2022, la ville refuse aux animateurs du dispositif d’insertion par le sport la mise à disposition d’un gymnase. Officiellement en raison de charges de chauffage devenues trop lourdes (le club de gymnastique a toutefois hérité en 2022 d’une enceinte plus économe), et de la priorité donnée désormais aux associations locales. Le maire, poulain du milliardaire d’extrême droite Pierre-Édouard Stérin qui voit en lui un possible candidat pour la présidentielle de 2032, a pourtant l’intention de permettre aux élèves du futur internat catholique traditionaliste qui va ouvrir à la rentrée prochaine d’accéder à la piscine de Salbris, alors même que ce futur collège et lycée privé ne relève pas de l’intercommunalité « Sologne des rivières », dont dépend la piscine. Sollicité, Alexandre Avril n’a pas répondu à nos questions.
« Je ne dis pas que les migrants sont forcément dangereux, mais… »
Les observateurs locaux de l’éducation populaire pensent que, plutôt que le chauffage, c’est bien la présence de demandeurs d’asile au sein du dispositif de l’État qui coince. Dans un courrier signé en commun en mai 2024 avec le député RN du cru Roger Chudeau, et adressé au préfet de Loir-et-Cher, l’édile demande le déplacement du CADA. Et tant qu’à le déplacer, autant que ce soit dans la ville voisine de Lamotte-Beuvron, une manière pour Alexandre Avril de régler des comptes politiques avec son maire, Pascal Bioulac, qui a quitté LR pour Horizons, le parti d’Édouard Philippe.
Pour les locaux du CADA sis dans l’ancienne gendarmerie de Salbris, Alexandre Avril affirme avoir des projets de développement économique. Il assure aussi que la présence du centre « pèse sur l’offre de logements ». Sur les réseaux sociaux, le maire dramatise à l’envi, écrivant, au sortir d’une visite au centre d’accueil, fin décembre 2024 : « Le CADA est en plein milieu des écoles. Je ne dis pas que les migrants sont forcément dangereux, mais on ne sait rien d’eux. Nous n’avons d’information sur leur passé et leurs antécédents que de manière déclarative. Ils sont à proximité directe d’une cour de récréation ».
Dans la foulée, Alexandre Avril annonçait « saisir maintenant Bruno Retailleau (le ministre de l’Intérieur) pour demander la fermeture » du centre, « en attendant la fin de cette folle politique, quand l’alternance sera venue ». L’alternance : comprendre l’arrivée au pouvoir soit d’une droite dure, soit du RN, pour celui qui est vice-président du parti d’Éric Ciotti, fondateur de l’Union des droites pour la République. Une formation qui n’est plus à un retournement d’alliance près.
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