Guerre au Soudan : les FSR accusés de massacres alors que l’armée progresse à Khartoum
Trois jours de massacres et un bilan de plusieurs centaines de morts au Soudan imputé aux Forces de soutien rapides (FSR). Au moins 200 personnes ont péri en trois jours lors d'attaques des paramilitaires des contre deux villages au sud de Khartoum, a indiqué, mardi 18 février, un groupe d'avocats prodémocratie dénonçant des "exécutions, enlèvements, disparitions forcées et pillages" contre des civils non armés.
Des faits corroborés par le ministère des Affaires étrangères soudanais qui de son côté dénombre "433 morts, dont des bébés".
Ces attaques contre les villages d'Al-Kadaris et d'Al-Khelwat, dans l'État du Nil Blanc, ont eu lieu du 15 au 17 février à quelque 90 km au sud de la capitale. Des milliers d'habitants ont pris la fuite, ont raconté des témoins, alors que l'ONU affirme avoir reçu des "rapports terrifiants" faisant état de plusieurs dizaines de viols.
Intensification des combats dans la capitale
Depuis deux ans, le pays est plongé dans une guerre fratricide opposant l'armée régulière du général Abdel Fattah al-Burhan et les Forces de soutien rapide du général Mohamed Hamdane Daglo, dit Hemedti. Un conflit qualifié par l'ONG International Rescue Committee de"plus grande crise humanitaire jamais enregistrée", qui a fait des dizaines de milliers de morts et déplacé plus de 12 millions de personnes, selon l'ONU.
L'État du Nil blanc, où ont eu lieu ces nouveaux massacres, s'étend de la zone au sud de Khartoum jusqu'à la frontière avec le Soudan du Sud. L'armée soudanaise contrôle le sud, notamment Rabak, la capitale de l'État, ainsi que deux grandes villes et une base militaire stratégique.
Les FSR, de leur côté, tiennent le nord, limitrophe de la capitale soudanaise, une région où se trouvent notamment les villages récemment attaqués.
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Ces nouveaux massacres interviennent alors que l'armée tente de reprendre aux FSR le contrôle total de Khartoum. Des affrontements particulièrement meurtriers dont a été témoin Christopher Lockyear, secrétaire général de l'ONG Médecin sans Frontières, présente dans la capitale. "Il y a quelques jours, un obus s'est abattu dans la zone d'un marché très fréquenté. Des dizaines et des dizaines de blessés graves et de cadavres ont été emmenés vers les services de soin et les morgues, immédiatement débordées par cet afflux massif", déplore-t-il sur l'antenne de France 24 en anglais.
Pays coupé en deux
Dans cette bataille sanglante pour le contrôle de la capitale, l'armée gagne du terrain. "Elle a repris une bonne partie de la Khartoum. Les FSR sont toujours présentes mais elles sont sur la défensive" explique Suliman Baldo, fondateur du centre de réflexions Suivi de la politique et de la transparence au Soudan. Pour le chercheur, cette offensive accentue un peu plus la division du Soudan en deux blocs avec d'un côté les États du Darfour et une bonne partie des États du Kordofan sous contrôle des FSR et de l'autre l'est, le centre et le nord majoritairement contrôlés par l'armée.
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Depuis le début du conflit les deux parties font régulièrement l'objet d'accusations de crimes de guerre contre les civils. Mardi, alors qu'étaient dévoilées les nouveaux massacres dans l'État du Nil blanc, des représentants des FSR – dont le numéro deux des paramilitaires, Abderrahim Hamdan Daglo – étaient à Nairobi, où ils ont annoncé la création prochaine d'un gouvernement parallèle.
Un programme complet sera présenté d'ici au 21 février ainsi qu'une nouvelle charte politique, a promis le porte-parole de la coalition "Le nouveau Soudan", dont l'objectif est de fédérer des groupes politiques et organisations de la société civile autour des FSR.
"Cette initiative vise à créer un gouvernement dans les zones contrôlées par les FSR" souligne Suliman Baldo, expliquant que les paramilitaires cherchent ainsi à "concrétiser" la division entre les territoires qu'ils contrôlent et ceux aux mains de l'armée. Une démarche catégoriquement rejetée par le gouvernement qui a dénoncé une "violation de l'intégrité territoriale" du pays.
Dans ce contexte, la fin des combats demeure un lointain présage. "Les deux parties cherchent une issue militaire. Mais il n'y en a pas. La guerre va donc perdurer", déplore l'expert.
Avec AFP