« J’ai vu des enfants qui meurent de faim » : à Gaza, la famine atteint un « point de rupture », alerte l’ONU

La bande de Gaza, où l’Onu a officiellement reconnu la semaine dernière qu’une famine causée par le gouvernement israélien y affectait plus d’un demi-million de personnes, est arrivée à un « point de rupture », a déclaré ce jeudi la cheffe du Programme alimentaire mondial (PAM), Cindy McCain.

« Le désespoir est à son comble et j’en ai été le témoin direct » a-t-elle exprimé, de retour après une visite de plusieurs jours sur place.

« J’ai rencontré des enfants qui meurent de faim recevant des traitements pour malnutrition grave, et j’ai vu des photos d’eux quand ils étaient en bonne santé. Ils sont (aujourd’hui) méconnaissables », a affirmé dans un communiqué la cheffe de l’agence onusienne, qui s’est notamment rendue à Khan Younès et à Deir el-Balah, où elle a visité une clinique maintenant en vie des enfants souffrant de malnutrition et a aussi rencontré des mères déplacées.

La cheffe du PAM s’est aussi rendue en Israël, où elle s’est notamment réunie avec Benyamin Netanyahou, qui nie l’existence de la famine à Gaza. Complètement renfermé dans un discours orwellien, le Premier ministre israélien assure que son gouvernement avait au contraire « une politique de prévention de la famine », imputant ce qu’il appelle « des pénuries temporaires » aux « vols systématiques de l’aide » par le Hamas.

Quant à son ministère des Affaires étrangères, il accuse l’ONU d’utiliser un rapport « fabriqué de toutes pièces » et « sur-mesure pour [le] Hamas ».

La semaine dernière, le responsable du Haut-Commissariat aux droits de l’Homme, Volker Türk, rappelait les possibles conséquences juridiques pour les responsables israéliens partant du fait que « recourir à la famine comme méthode de guerre constitue un crime de guerre » (lire l’Humanité du 25 août 2025).

« Un catalogue sans fin d’horreurs »

Ce mercredi, tous les membres du Conseil de sécurité des Nations unies, à l’exception des États-Unis, ont déclaré dans une déclaration commune que la famine à Gaza était une « crise provoquée par l’homme », tout en rappelant à leur tour que le recours à la famine comme arme de guerre était interdit par le droit international humanitaire.

Le lendemain, le secrétaire général des Nations Unies, Antonio Guterres, a affirmé lors d’une conférence de presse que « la famine (à Gaza) n’est plus une menace à venir – c’est une catastrophe bien réelle, aujourd’hui », fustigeant des souffrances endurées par les Gazaouis qui seraient « le résultat de décisions délibérées qui bafouent l’humanité la plus élémentaire ».

Dénonçant « un catalogue sans fin d’horreurs » à Gaza, peu après que la Défense civile y ait rapporté la mort de 26 personnes tuées par l’armée israélienne depuis l’aube, Guterres a rappelé certaines des « obligations claires » d’Israël, en tant que puissance occupante : assurer nourriture, eau, médicaments, protéger les civils et infrastructures, mais aussi « cesser de détruire ce qui est indispensable à la survie de la population ».

« Gaza est un amas de ruines, un amas de corps, et jonchée d’exemples de ce qui pourrait constituer de graves violations du droit international », a déclaré le chef de l’ONU près de 700 jours après le début d’une guerre qui a ravagé le territoire palestinien et aurait provoqué la mort de près de 63 000 gazaouis, selon les autorités sanitaires locales, en majorité des civils.

Un niveau de mort et de destruction « sans équivalent »

Dans un contexte de « niveaux de mort et de destruction sans équivalent dans l’histoire récente », Guterres a jugé proprement « inhumain » de contraindre des centaines de milliers de civils, déjà épuisés, affamés et traumatisés, à prendre à nouveau la fuite, en raison de l’intensification de l’offensive israélienne.

Malgré des pressions grandissantes, aussi bien à l’international qu’au sein de la société israélienne, pour mettre un terme le génocide en cours, l’armée israélienne a déclaré jeudi matin que ses soldats « poursuivent leurs opérations contre les organisations terroristes dans toute la bande de Gaza ».

Ce jeudi, le ministre israélien des Finances, Bezalel Smotrich – figure d’extrême droite opposée à la conclusion d’un accord avec le Hamas pour mettre fin à la guerre – a appelé le gouvernement à commencer à annexer la bande de Gaza si le mouvement islamiste continuait de refuser de déposer les armes.

Alors qu’Israël a déjà annoncé son intention d’occuper la ville de Gaza, la situation n’est guère moins préoccupante en Cisjordanie où continue l’expansion criminelle des colonies israéliennes.

Antonio Guterres a dénoncé le feu vert donné par le gouvernement de Netanyahou au plan de construction de milliers de colonies dans la zone E1, à l’est de Jérusalem, en plein territoire palestinien occupé. Un projet illégal qui couperait le territoire palestinien en deux, en « séparer [ant] de fait le nord et le sud de la Cisjordanie » ce qui représenterait « une menace existentielle pour la solution à deux États », selon le numéro un de l’Onu.

Depuis New York, le Guterres a conclu sa conférence de presse avec un ultime appel, rapporté par le site d’informations de l’Onu : « Il n’existe pas de solution militaire à ce conflit. […] Plus d’excuses. Plus d’obstacles. Plus de mensonges ».

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