Guerre en Ukraine : J.D. Vance, l'incarnation de l'hostilité des Etats-Unis vis-à-vis de Kiev
Il est celui qui a fait basculer la réception de Volodymyr Zelensky à la Maison Blanche, vendredi 28 février, d'une rencontre diplomatique tendue à un affrontement verbal invraisemblable entre dirigeants internationaux. Assis à côté de Donald Trump dans le Bureau ovale, J.D. Vance, vice-président américain depuis le 20 janvier, a houspillé le président ukrainien, venu à Washington conclure un accord décisif sur les minerais, après trois ans d'un conflit meurtrier et destructeur pour Kiev.
"Vous pensez qu'il est respectueux d'attaquer l'administration qui tente d'empêcher la destruction de votre pays ?", a notamment lancé l'élu républicain de 40 ans. "Avec tout le respect que je vous dois, je pense qu'il est irrespectueux de votre part de venir dans le Bureau ovale et d'essayer de plaider cette question [de la diplomatie] devant les médias américains", a-t-il taclé. "En ce moment même, vous forcez les conscrits à rejoindre les lignes de front parce que vous avez des problèmes d'effectifs. Vous devriez remercier le président [Trump]."
Après l'altercation avec Volodymyr Zelensky, abondamment commentée par la presse américaine, le numéro 2 de l'administration Trump a été hué par des centaines de manifestants pro-Ukraine lors d'un week-end au ski. J.D. Vance a également été accusé d'être un "traître" et de défendre les intérêts de Moscou. "Va skier en Russie !", lui ont ainsi lancé des opposants.
Une opposition de longue date au soutien à l'Ukraine
Les phrases prononcées à la Maison Blanche, sous les yeux de médias du monde entier, traduisent en tout cas l'attitude plus qu'hostile de J.D. Vance vis-à-vis de la résistance ukrainienne face à la Russie. Cette position est loin d'être nouvelle : l'ancien militaire n'a jamais été un soutien de Kiev depuis l'invasion du pays décidée par le Kremlin, en février 2022. Cinq jours avant le franchissement de la frontière ukrainienne par des forces russes, celui qui était alors sénateur de l'Ohio affirmait ne pas se préoccuper du conflit latent. "Pour être honnête, je ne me soucie pas vraiment de ce qui arrive à l'Ukraine d'une manière ou d'une autre", avait-il également affirmé dans un podcast Real America's Voice.
"Je trouve ridicule qu'on se focalise sur cette frontière en Ukraine."
J.D. Vance, alors sénateur de l'Ohioau podcast "Real America's Voice", en février 2022
En avril 2024, dans le New York Times, l'avocat et homme d'affaires s'était justifié sur son refus de voter en faveur d'une aide de 60 milliards de dollars pour l'Ukraine. "J'ai voté contre ce paquet au Sénat et je reste opposé à toute proposition visant à ce que les Etats-Unis continuent à financer cette guerre", écrivait-il.
Au-delà de ses propos véhéments envers Volodymyr Zelensky, J.D. Vance milite avant tout pour un cessez-le-feu rapide entre Russie et Ukraine, ce qui lui vaut d'être accusé par ses opposants de faire le jeu de Vladimir Poutine. "Nous voulons parvenir à une paix durable et non pas à une paix qui entraînera un conflit en Europe de l'Est dans quelques années", avait assuré J.D. Vance après un entretien avec le président ukrainien, lors d'une conférence sur la sécurité à Munich, mi-février.
Un partisan de la doctrine "America First"
C'est lors de ce rendez-vous en Allemagne que J.D. Vance avait médusé l'Europe et irrité nombre de ses partenaires diplomatiques. A travers un discours très offensif, il avait tour à tour dénoncé le recul supposé de "la liberté d'expression" sur le Vieux Continent, affiché son opposition au cordon sanitaire contre l'extrême droite allemande et fustigé les actions de l'UE contre les ingérences étrangères. "Si votre démocratie peut être détruite avec quelques centaines de milliers de dollars de publicité numérique d'un pays étranger, alors elle n'était pas très forte", avait-il par exemple lancé.
Ukraine, Proche-Orient, Asie du Sud-Est... L'auteur à succès (son livre autobiographique Hillbilly Elegy s'est vendu à 3 millions d'exemplaires depuis 2016) applique fièrement la doctrine "America First" du camp républicain, qui fait des Etats-Unis une priorité absolue, en menaçant de se désengager financièrement et militairement des divers théâtres d'opération dans le monde. Le tout en affichant des visées expansionnistes, notamment au sujet du Canada, du Groenland ou du Panama.
Quarante jours après avoir investi la Maison Blanche, l'ancien sénateur continue de prendre position sur de nombreux sujets, un rôle très différent de celui de Mike Pence, vice-président plus discret de Donald Trump durant son premier mandat à la tête du pays, entre 2017 et 2020. Au point de faire de l'ombre au chef de l'Etat – qu'il avait qualifié d'"Hitler de l'Amérique" en 2016 – et d'apparaître comme un candidat républicain crédible en novembre 2028 ? Donald Trump, à qui la Constitution interdit de briguer un troisième mandat, a récemment été interrogé par le journaliste Bret Baier de Fox News pour savoir s'il soutenait d'ores et déjà une candidature de son bras droit. "Non, mais il est très compétent", a-t-il répondu, jugeant qu'il était "trop tôt" pour se prononcer.