REPORTAGE. "La moitié de l'appartement a été soufflée" : des habitants de Kiev témoignent de la violence de la frappe russe qui a fait neuf morts

Neuf morts, plus de 70 blessés, dont neuf enfants. C’est le bilan de la dernière attaque russe sur Kiev, dans la nuit du mercredi 23 au jeudi 24 avril. Des missiles ont frappé un quartier résidentiel de l’ouest de la capitale ukrainienne. Cette frappe intervient alors que Donald Trump propose un plan de paix controversé, prévoyant notamment de céder la Crimée à la Russie. Un plan rejeté par le président ukrainien Volodymyr Zelensky. 

Il est une heure du matin quand une explosion secoue violemment ce quartier résidentiel de l’ouest de Kiev. Un missile s’abat sur un immeuble d’habitation. En quelques secondes, plusieurs étages sont soufflés. Une femme descend les escaliers disloqués, son bébé dans les bras. Un vieil homme, hébété, balaye déjà les débris devant sa porte, comme pour se raccrocher à une routine devenue absurde.

Ivan, soldat en permission, vit juste en face du bâtiment frappé. Lui aussi a été projeté au sol par le souffle. "Tout a explosé vers 1h du matin, tout s’est effondré dans le bâtiment", raconte-t-il. "J’ai des blessures au visage, aux bras, aux jambes", montre-t-il.

"Aucune cible stratégique"

Derrière les rubans de sécurité, des équipes de secours s’activent, secondées par des chiens renifleurs. À quelques mètres, Tanya, 34 ans, ingénieure, regarde fixement l’immeuble éventré. C’est là qu’elle habitait. Elle parvient à articuler quelques phrases, entre choc et sidération. "Il y a eu trois fortes explosions et la moitié de l’appartement a été soufflée, c’était vraiment effrayant, souffle-t-elle. Parfois, on peut imaginer comment cela pourrait se passer, mais c’était cent fois pire que tout ce que je pouvais imaginer." Tanya raconte les vitres qui volent en éclats, le chaos dans l’escalier, son petit frère qu’elle parvient à retrouver au milieu des gravats. Tous deux ont survécu, mais leurs voisins, leurs amis n’ont pas eu cette chance.

"Nous avons des amis dans l’immeuble frappé. Nous savons déjà que la moitié de la famille est morte, mais l’autre moitié est toujours recherchée."

Tanya, habitante de Kiev

à franceinfo

Et pourtant, insiste-t-elle, "il n’y avait ici aucune cible stratégique". Pas de base militaire, pas de dépôt d’armes, rien qui puisse justifier un tel bombardement. "Autant que je sache, il n’y a ici ni installation militaire, ni équipement, rien. Il n’y avait ici que des familles avec des enfants. Pourquoi ? Je ne peux pas l’expliquer. Personne ne peut l’expliquer", lâche-t-elle. Ici comme ailleurs, les Ukrainiens peinent à comprendre comment la trêve proposée par Donald Trump pourrait avoir le moindre sens alors que les missiles continuent de frapper des civils.