Nouvelle-Calédonie : indépendantistes et non indépendantistes se déchirent déjà sur l'accord de Bougival, signé avec l'Etat

Emmanuel Macron avait reçu les négociateurs en grande pompe à l'Elysée le 12 juillet. L'accord de Bougival sur l'avenir de la Nouvelle-Calédonie, à peine signé, est pourtant déjà lourdement menacé. Il prévoyait notamment la création d'un "Etat de la Nouvelle-Calédonie", inscrit dans la constitution française. Cet accord suscitait de l'espoir sur place après les violentes émeutes de l'an dernier. Mais le principal parti indépendantiste de l'archipel du Pacifique Sud confirme son rejet d'un texte qu'il a pourtant signé il y a moins de trois semaines.

Les revirements de l'Union calédonienne, le parti qui refuse aujourd'hui cet accord, sont assez fréquents. En rentrant à Nouméa, les indépendantistes qui ont participé aux discussions de Bougival ont très vite été rattrapés par des militants plus radicaux. Pour ces derniers, les termes de l'accord négocié en métropole ne respectent pas les fondamentaux du combat pour l'indépendance, notamment le droit à l'autodétermination.

L'opposition de Christian Tein

L'une des principales figures indépendantistes, le Kanak Christian Tein, s'oppose à cet accord. "Cet accord aura des difficultés à avoir l'adhésion de tout le monde et surtout du peuple kanak, si on ne respectait pas sa culture. La notion même de peuple kanak a disparu au profit de celle de peuple calédonien. C'est tous ces ingrédients qui clivent notre manière de voir cet accord. On n'a pas fait tout ce chemin en politique au niveau indépendantiste pour nous renvoyer à quasiment 40 ans en arrière", a déclaré le leader du FLNKS (Front de libération nationale kanak et socialiste), mercredi à ICI RFM

Retour à la case départ, ou presque. "Il y a encore un chemin possible", selon l'entourage de Manuel Valls. Le ministre des Outre-Mer est très impliqué dans ces négociations et qui se dit toujours ouvert au dialogue, tant que les équilibres de cet accord ne sont pas remis en cause.

"On renégocierait avec qui ?"

En attendant, ceux qui refusent l'indépendance de la Nouvelle-Calédonie fulminent, notamment dans le camp de Sonia Backès, leader non indépendantiste, présidente de l'Assemblée de la Province Sud. "Les indépendantistes de l'Union calédonienne sont des menteurs nés, indignes de confiance", s'exclame l'un de ses proches. De quoi raviver les tensions sur place entre loyalistes et indépendantistes. "C'est dommage parce qu'on voit que l'une des six parties prenantes de Bougival, qui est le FLNKS, est pris en otage par sa branche la plus radicale. Mais finalement, cet accord fait l'unanimité des autres partis politiques calédoniens", réagit Virginie Ruffenach, vice-présidente du congrès de la Nouvelle-Calédonie.

Alcide Ponga, Kanak non indépendantiste, président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, renvoie dos à dos les radicaux des deux camps. "L'autre option, ce serait de renégocier ? Mais on renégocierait avec qui ?, demande-t-il. Ceux qui ont signé ont décidé de ne pas refaire les erreurs du passé." Et de conclure : "Même si quelques indépendantistes sont contre, il faut soumettre cet accord au vote des Calédoniens".