Biathlon : que faut-il attendre des biathlètes tricolores en cette saison olympique ?

Une saison 2024-25 exceptionnelle : cinq Françaises dans le top 8 de la Coupe du monde et quatre Français dans le top 12 au classement général. Le biathlon tricolore, également victorieux des deux globes par nation et des deux classements du relais par genre, semble au firmament, alors que débute la saison olympique, samedi 29 novembre à Ostersund (Suède), deux mois avant les Jeux de Milan-Cortina.

Pourtant entre affaires extra-sportives et facteurs X en année JO, les cibles sont de nouveau vierges. Lou Jeanmonnot et Eric Perrot, 27 et 24 ans, auront-ils les épaules pour confirmer leur statut de numéro 1 français ? La force collective bleue raflera-t-elle les titres olympiques en relais ? L'équipe féminine saura-t-elle mettre définitivement derrière elle l'"affaire Julia Simon" ? Franceinfo: sport fait le point sur les perspectives et chances de l'équipe de France pour cette saison 2025-2026.

Deux leaders qui n'ont jamais fait les Jeux

A 27 ans, Lou Jeanmonnot vient de terminer les deux dernières saisons sur la deuxième marche du podium de la Coupe du monde, et a même offert un final haletant sur la toute dernière course l'an dernier, le gros globe de cristal se jouant dans les tout derniers mètres avec l'Allemande Franziska Preuss. Mais la Franc-Comtoise refuse l'adage "jamais deux sans trois" et arrive pleine d'ambitions : "Ce n'est pas un échec, si je suis capable de l'utiliser pour gagner plus tard", a-t-elle déclaré lors du stage terminal de présaison à Bessans, affirmant son envie de décrocher un titre olympique, "l'objectif numéro un de ma saison", a-t-elle encore dit.

Pourtant, la biathlète de l'Olympic Mont d'Or n'a jamais participé aux Jeux olympiques, puisqu'elle évoluait encore en IBU Cup lors de la saison 2021-22, l'échelon européen. C'est aussi le cas d'Eric Perrot, premier Français et troisième du classement général de la Coupe du monde la saison dernière, derrière les deux Norvégiens Sturla Laegreid et Johannes Boe, désormais retraité. Le Français, qui possède aussi la nationalité norvégienne par sa mère, fait partie des jeunes très prometteurs, lui qui n'a pas peur de clamer haut et fort qu'il joue dès cette année le gros globe de cristal et le titre olympique.

Le cas Julia Simon

Le titre olympique, c'est le seul qui manque à Julia Simon. Du haut de ses dix médailles d'or mondiales (dont les titres en individuel en 2025, puis en poursuite et en sprint en 2024) mais de la seule médaille olympique (argent en 2022), elle va vivre une saison particulière. Condamnée pour fraude à la carte bancaire et vol devant la justice, la biathlète des Saisies de 29 ans, victorieuse du classement de la Coupe du monde il y a trois saisons et troisième l'an dernier, purge une suspension d'un mois, prononcée par la Fédération française de ski (FFS).

Elle n'a pas le droit de participer aux compétitions et entraînements organisés ou autorisés par la FFS et l’IBU, "et suit un programme comme entre deux étapes de Coupe du monde", a affirmé le coach de l'équipe féminine, Cyril Burdet. La biathlète devrait être de retour sur l'étape d'Hochfilzen (Autriche), le 12 novembre.

Mais l'encadrement tricolore "jugera le moment venu quelle est la meilleure option pour qu'elle réintègre la compétition". Quid alors de ses ambitions olympiques et sur la Coupe du monde ? La question se pose aussi pour la composition du relais pour lequel Cyril Burdet a quatre prétendantes : Lou Jeanmonnot, Justine Braisaz-Bouchet, Océane Michelon et Jeanne Richard, qui ont fait leurs preuves. Mais Simon a remporté quatre titres mondiaux à Lenzerheide en 2025, dont trois en relais : le mixte, le mixte simple et le féminin. Et a fait partie des cinq compositions (sur cinq) du relais sur la Coupe du monde 2024-2025, qui a permis à la France de décrocher le petit globe de cristal de la spécialité.

Deux collectifs au firmament ?

Outre l'aspect purement sportif, l'"affaire Julia Simon" pourrait laisser des traces dans une équipe féminine qui "réalise depuis deux ans des résultats exceptionnels", rappelle encore Cyril Burdet. Mais une "affaire réglée en interne" entre Jeanne Richard et Océane Michelon, révélée par Le Dauphiné libéré, a aussi agité le collectif, qui pourrait n'en avoir que le nom. Les cinq biathlètes du groupe A, - Lou Jeanmonnot, Julia Simon, Océane Michelon, Jeanne Richard et Justine Braisaz-Bouchet - ne sont pas non plus à l'abri d'être bousculées dans la hiérarchie par un groupe B avec quatre ou cinq "qui ont le niveau Coupe du monde et peuvent jouer un top 10 ou un top 15", affirme l'entraîneur principal.

Du côté du groupe masculin, la donne est différente puisque pour l'heure, quatre biathlètes se détachent - Eric Perrot, Emilien Jacquelin, Quentin Fillon Maillet et Fabien Claude - et trois poussent pour prendre le siège restant - Oscar Lombardot, Emilien Claude et le vétéran Antonin Guigonnat -. Et la différence se fait également à l'extérieur, avec des biathlètes qui affichent clairement leurs ambitions collectives, notamment sur le relais masculin.

"On l'a tous, je pense, dans un coin de la tête. Ce serait une belle manière de cimenter cette amitié qui règne dans l'équipe avec la plus belle des médailles, quatre ans après avoir décroché l'argent à Pékin."

Emilien Jacquelin

lors d'un stage équipe de France en octobre à Font-Romeu

Si l'objectif par équipes est clair, les hommes de l'équipe de France ont aussi des ambitions individuelles. "S'il y a une année où il faut être bon, c'est vraiment celle-ci", assurait avant le début de saison, Quentin Fillon-Maillet, héros des Jeux de Pékin en 2022 avec cinq médailles en six courses. Mais le Jurassien de 33 ans, vainqueur du gros globe lors de la même saison (2021-22), peine à confirmer depuis trois ans, même s'il a terminé à une jolie cinquième place l'an dernier.  

Sept biathlètes pour une qualification olympique

Avec Emilien Jacquelin, champion du monde de pousuite 2020 et 2021, et Fabien Claude (tous les deux 30 ans), ainsi qu'Antonin Guigonnat (34 ans), le groupe France repose sur une stabilité depuis plusieurs saisons. "J'aime l'idée que des biathlètes qui ont 12-13 ans de moins que moi doivent me mettre au défi pour me pousser dehors", plaisantait le vétéran lors d'un stage à Font-Romeu en octobre. Derrière Eric Perrot, "qui a exactement 10 ans de moins que moi, et qui est déjà très mature, peut-être même plus que moi" comme l'analyse Guigonnat, Emilien Claude et Oscar Lombardot font partie de la relève. Le premier, opéré d'une hernie discale à la fin du mois d'août, sera sur la première étape à Ostersund, tandis que le second devra patienter en IBU CUP, avec pour objectif "le top 10 en Coupe du monde et une sélection olympique".

L'objectif Jeux de Milan-Cortina est donc dans toutes les têtes, et sur le papier, à l'aube de cette nouvelle saison, le collectif bleu dispose de plusieurs armes dans sa manche pour performer. Toujours sans Russes ni Biélorusses sur le circuit Coupe du monde, comme sur les JO 2026, les biathlètes tricolores devront se méfier des éternels Norvégiens, même sans les frères Boe, des Suédois et des Italiens, qui, à l'image de leur star montante Tommaso Giacomel, de Dorothea Wierer sur sa fin de règne ou de la revenante Lisa Vitozzi, pourraient bien briller à domicile, sur le circuit d'Antholz-Anterselva, dans le nord du pays.