Biathlon : on vous explique l'affaire Julia Simon, condamnée pour fraude à la carte bancaire et vol envers sa coéquipière Justine Braisaz-Bouchet

Julia Simon reconnue coupable. Plus de trois ans après les faits, la biathlète française devait répondre de ses actes devant le tribunal correctionnel d'Albertville (Savoie), vendredi 24 octobre. La décuple championne du monde (dont quatre en individuel), a reconnu la "totalité" des faits de vol et de fraude à la carte bancaire qui lui étaient reprochés, notamment par sa coéquipière en équipe de France Justine Braisaz-Bouchet. Cet aveu constitue un revirement pour la biathlète française la plus titrée de l'histoire des championnats du monde, qui avait jusqu'ici nié les accusations à son encontre.

Des faits qui remontent à l'été 2022

L'affaire remonte à l'été 2022, au Blink Festival. Lors de cette compétition de ski-roues organisée en Norvège, Julia Simon utilise la carte bancaire de sa coéquipière en équipe de France, la championne olympique et championne du monde de mass start, Justine Braisaz-Bouchet, pour des achats en ligne, notamment pour des produits de la marque Go Pro, entre août et septembre 2022. Des faits similaires ont également visé un membre du staff médical. Le montant du préjudice subi s'élève à environ 2 300 euros. 

Une enquête est alors ouverte à l'hiver 2022, après les plaintes déposées par Justine Braisaz-Bouchet et le membre du staff médical. L'enquête est dès alors confiée au parquet d'Albertville et aux gendarmes de la brigade territoriale de Beaufort ainsi qu'aux enquêteurs de la brigade de recherches d'Albertville.

Simon dénonce une usurpation d'identité

L'affaire n'éclate publiquement qu'à l'été 2023. Accusée, Julia Simon nie d'abord l'ensemble des accusations à son encontre et dénonce en août 2023 une usurpation d'identité. Elle dépose ainsi une plainte contre X. Dans un entretien accordé au média spécialisé Ski Chrono, le 24 août 2023, elle se justifie et balaye les faits reprochés. "Je ne reconnais absolument pas les faits qui peuvent m’être reprochés, c’est pour cela que je dois donner ma version des faits. Il y a des achats qui ont été faits par carte bleue avec mon nom dessus, mais aujourd’hui, je suis aussi victime de cette situation."

"Mon nom a été utilisé à mon insu. De mon côté, j’ai fait un dépôt de plainte contre X pour usurpation d’identité. Le fait d’aller déposer plainte permet de montrer que je suis aussi innocente et que je cherche à trouver la vérité."

Julia Simon, dix fois championne du monde de biathlon

à Ski Chrono, le 24 août 2023

Au même moment, elle indique à L'Equipe avoir "signé un document pour demander à [sa] banque de rembourser les sommes à Justine. Ça peut sembler comme un aveu, mais je voulais juste mettre ça derrière moi. Humainement, ce n'est pas évident. Certaines [de ses coéquipières] me reprochent d'avoir trahi leur confiance. Je n'y suis pour rien. J'ai essayé en décembre de leur expliquer la situation." En octobre, la biathlète est placée en garde à vue quelques heures, avant d'être relâchée.

De son côté, Justine Braisaz-Bouchet était revenue sur l'affaire auprès de la télévision norvégienne TV2 en août de la même année. "J'ai essayé de me réconcilier avec elle et la fédération mais ça n'a pas marché [...]. Je pense que la situation est vraiment triste, mais j'ai pris mes responsabilités. Si je n'avais pas de preuves, je n'aurais rien fait. Ce n'était bien sûr pas une décision facile", a-t-elle expliqué.

Dans le même temps, Lou Jeanmonnot prend à son tour position en faveur de Justine Braisaz-Bouchet. "L'année dernière, c'était très difficile, nous avons fait de notre mieux pour nous tenir au milieu entre Justine et Julia. Je suis déçue, cette affaire aurait pu être réglée en deux mois puis oubliée. Mais il y a eu beaucoup de mauvaises décisions de prises. Maintenant, je soutiens Justine. Julia a pris beaucoup de mauvaises décisions, au lieu d'accepter les mains que nous lui avons tendues."

Une mise en retrait avant une année 2024 éclatante sportivement

Après ce coup de tonnerre, Julia Simon, qui s'est mise en retrait de l'équipe de France à l'occasion de la préparation de la saison suivante (2023-2024), décide de s'entraîner seule. La biathlète, qui se dit également "victime" de la situation, évoque des tensions au sein du groupe de l'équipe de France. "J’ai gardé contact avec certaines personnes, mais c’est vrai qu’aujourd’hui la situation est compliquée, assure-t-elle dans cette même interview à Ski Chrono. Je sais qu’il faudra que je discute avec elles et que je m’explique vraiment, car je ne l’avais pas fait aussi profondément, j’avais du mal à mettre des mots sur mes émotions." Julia Simon reconnaît avoir "fait quelques erreurs", notamment celle d'avoir voulu "gérer toute seule cette situation" qu'elle a prise "à la légère au départ".

Malgré ce contexte, Julia Simon réalise lors de l'hiver 2023-2024 l'une des meilleures saisons de sa carrière. Elle glane quatre médailles aux Mondiaux de biathlon, dont trois titres (deux en individuel). L'hiver suivant, soit l'exercice précédent (2024-2025), est encore plus prolifique avec quatre titres mondiaux.

Le 24 octobre 2025, Julia Simon reconnait les faits et est condamnée à trois mois de prison avec sursis

Lors de son procès, la biathlète passe aux aveux, pour la première fois publiquement. Elle reconnait tous les faits qui lui sont reprochés. Devant le tribunal, elle se dit incapable d'"expliquer" son geste. "J'ai dû l'occulter, je n'arrive pas à conscientiser", dit-elle à la barre, indiquant travailler avec un psychologue pour "comprendre tout ça". "C'est un trou noir, avoue-t-elle, très émue. Tout ça est très flou pour moi. J'ai eu comme un mécanisme de défense de me recroqueviller sur moi et de me concentrer à 200% sur mon sport", lâche la jeune femme de 29 ans, qui présente ses "excuses" aux deux victimes et qualifie son comportement de "dérisoire et ridicule".

De son côté, Me Sarah Pereira, conseil de Justine Braisaz-Bouchet, se montre peu satisfaite de cette "reconnaissance sans explication" et assure "qu'il n'y a aucune animosité de [la part de sa cliente] mais une demande de reconnaître son statut de victime".

Julia Simon risquait jusqu'à cinq ans d'emprisonnement et 375 000 euros d'amende. Vendredi 24 octobre, la biathlète des Saisies est finalement condamnée à trois mois de prison avec sursis et 15 000 euros d'amende. La Fédération française de ski (FFS), qui s'est constituée partie civile lors du procès, pourrait elle aussi prendre une sanction envers la biathlète, et ce à trois mois des Jeux olympiques de Milan-Cortina, où elle vise un premier titre olympique.