Roland-Garros : pour l'hommage à Nadal, des larmes, du rire, le "Big 4" et des surprises...

Entre pluie et sourires, entre rayons de soleil et larmes, le ciel parisien, à l'image du public de Roland-Garros, ne savait plus quoi ressentir en ce dimanche 25 mai. Une journée venteuse, avec des rafales qui emportent au loin nos souvenirs d'enfance et cette image d'airain d’un Rafael Nadal qui soulève inlassablement, année après année, la Coupe des Mousquetaires de Roland-Garros. Car cette journée de mai, qui ressemble à un mois d’octobre, était à la fois le début de l'édition 2025 du tournoi parisien mais aussi celui de l’adieu à celui qui aura marqué l’histoire de la porte d’Auteuil.

Sacré à Roland-Garros 14 fois entre 2005 et 2022, le palmarès du Majorquin porte d’Auteuil est hors norme. Il ne sera probablement jamais égalé.

Des spectateurs venus que pour lui

Preuve de son influence sur le tournoi du Grand Chelem parisien, il n’a pas attendu ses derniers coups de raquette sur place pour y avoir sa statue. Pour l’éternité, un Nadal métallique, inauguré en 2021, accueille les milliers de visiteurs qui viennent se délecter des affiches sur terre ocre. Mais, ce dimanche, la foule n’avait d’yeux que pour lui, guettant son arrivée, sa visite au Tenniseum et l’exposition qui lui est consacrée. Qu’importe l’entrée en lice victorieuse de Sabalenka ou de Musetti, relayés à de simples levers de rideau avant la cérémonie.

Une fois le match de l’Italien terminé, le spectacle peut enfin commencer. Les spectateurs du court Philippe-Chatrier ne font même pas semblant d’écouter l’interview d’après-match de Lorenzo Musetti, trop occupés à revêtir les T-shirts ocres floqués "Merci Rafa. 25.05.2025", distribués par le tournoi en l’honneur de la véritable star du jour. D’autres s’habillent de blanc, formant dans les tribunes latérales les messages : "♡Rafa♡" et "14 RG".

Dans l’attente de l’entrée en scène de la légende espagnole, l’ambiance du court Philippe-Chatrier, si froide tout au long de la journée, monte enfin d’un cran. Les olas se succèdent, ponctuées de "Rafa !", "Rafa !", "Rafa !"

Quand soudain, le palmarès à rallonge de Rafael Nadal retentit enfin. Et la longue énumération de ses 14 titres à Roland-Garros — "2005, 2006, 2007, 2008, 2010, 2011, 2012, 2013, 2014, 2017, 2018, 2019, 2020 et 2022" — fait chavirer la foule dans un merveilleux crescendo, conclu par l’apparition de la légende en personne, dans un costume noir impeccable, qui a longtemps pris le soin de savourer le moment.

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L’an passé, l’Espagnol avait refusé catégoriquement toute cérémonie d’hommage, laissant planer le doute sur une éventuelle nouvelle participation après être tombé dès le premier tour aux mains d’Alexander Zverev, futur finaliste. Il sera finalement venu donner quelques coups de raquette supplémentaires dans son jardin lors des JO de Paris, mais là encore, le poids des ans s’était fait sentir, le contraignant à se résoudre à la retraite.

Sa carrière a pris fin en novembre sur une défaite en Coupe Davis à Malaga. Mais la cérémonie, très sobre et organisée aux petites heures de la nuit andalouse, avait suscité des critiques, au vu du statut de la légende espagnole.

Du rire et des larmes

Roland-Garros avait donc la lourde charge de faire mieux pour honorer "Rafa". Une cérémonie minutieusement préparée, la légende ayant été consultée sur ce qu’il voulait et surtout ce qu’il ne voulait pas.

"La plupart des choses qui vont se produire sur le court seront des surprises pour lui, mais on a respecté sa commande : quelque chose de simple, d’authentique, de classe. Quelque chose qui lui ressemble finalement. C’est lui qui nous a orientés ", avait expliqué en amont la directrice du tournoi, Amélie Mauresmo.

Pari largement réussi. La cérémonie débute sur une longue vidéo rendant hommage aux exploits de "Rafa" dans le tournoi parisien. Elle s’est conclue sur une standing ovation tout aussi longue du public, qui a bien du mal à le laisser entamer son discours.

"Après avoir joué sur ce court pendant les 20 dernières années, après avoir profité, souffert, gagné, perdu et surtout après avoir été ému à chaque fois que j’ai eu la chance d’être ici", a entamé en français Rafael Nadal.

La foule des anonymes remerciés

Fidèle à sa réputation de gentleman sur et en dehors des courts, l’Espagnol a profité de son discours pour remercier longuement tous ceux qui ont compté tout au long de sa carrière. Pas seulement ses grands rivaux du "Big 4", Djokovic, Federer et Murray, mais aussi Richard Gasquet, "ami et rival d’enfance", ainsi que la foule des anonymes, petites mains du tournoi, hommes et femmes de l’ombre, médecins et autres masseurs, ramasseurs de balles qui ont marqué toutes ses apparitions porte d’Auteuil. Le tournoi en invitera plusieurs d’entre eux sur le court pour recevoir des franches accolades de Rafael Nadal.

Une large part de ses remerciements est allée à sa famille, sa voix se brisant même après avoir évoqué l’importance de ses grands-mères, 92 et 94 ans, mais présentes en tribunes, puis il a largement remercié son oncle Toni, "le meilleur entraîneur qu’il aurait pu avoir".

Mais, avec Rafael Nadal, le rire n’est jamais loin après les larmes. Il avoue avoir perdu une page de son discours, celle consacrée à sa compagne Marie. S’il assure pouvoir la réciter de mémoire, une ramasseuse de balles lui sauvera tout de même la mise en allant récupérer un exemplaire de rechange, sous les gloussements de la foule.

Nadal, Federer, Murray et Djokovic réunis sur le court

Après les remerciements vient le temps des hommages rendus. Miracle dans un sport moderne où tout se sait et rien n’est secret, les détails du cérémonial n’ont jamais filtré. Tout juste Novak Djokovic avait vendu la mèche sur le fait que le "Big 4", Federer, Nadal, Murray et lui-même, serait réuni pour cet hommage.

Les quatre légendes, 69 victoires en Grand Chelem à eux quatre, étaient bien là, sur la terre ocre du court Philippe-Chatrier où Rafael Nadal les aura tant fait souffrir au cours d’une carrière étalée sur 23 ans et 18 apparitions porte d’Auteuil. Ils ont rejoint leur rival et désormais ami au centre du court dans une image désormais gravée pour l’éternité.

"Finalement, on a tous accompli de grandes choses, nous étions des joueurs de tennis et on est parvenus à construire une immense rivalité – mais toujours d’une bonne manière. On a réussi à montrer au monde entier qu’en plus d’être rivaux, nous avions un respect immense les uns pour les autres ", a salué Rafael Nadal. "Cela représente tellement pour moi que vous soyez tous là, ici, aujourd’hui. Vous m’avez donné du fil à retordre sur le court, mais j’ai adoré ça ! Vous m’avez tous poussés à atteindre mes limites, mais finalement, le tennis n’était qu’un sport et aujourd’hui on est tous là, anciens rivaux et amis en dehors du court. "

Deux surprises pour Nadal

Après ce moment de fraternité entre les quatre légendes du sport est venu le temps des surprises.

Rafael Nadal a d’abord reçu un trophée spécial des mains d’Amélie Mauresmo, directrice du tournoi, et de Gilles Moretton, président de la Fédération française de tennis (FFT). La mention "Legend" est inscrite en lettres ocres avec les dates de ses 14 sacres.

Puis le cadeau auquel il ne s’attendait pas. Invité sur le côté du court opposé à l’arbitre, il est ébahi de voir révélée une plaque commémorative sur la terre battue, comprenant son empreinte, la Coupe des Mousquetaires et la mention 14. Ému une nouvelle fois aux larmes, il est rejoint par ses rivaux et amis du Big Four pour une dernière photo.

Il est alors l’heure de se dire au revoir. Rafael Nadal entame un tour d’honneur devant les tribunes parisiennes. Des dernières salutations à cette ville et à ce pays "qui l’ont fait se sentir comme un Français de plus".

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