4 choses à savoir sur la sécurité sociale du logement, ce système simple et efficace pour donner un toit à tout le monde

Les constats sur la crise du logement sont de plus en plus alarmants. « Un système de protection universelle est un sujet qui doit s’imposer dans l’actualité », martèle en réponse Eddie Jacquemart, président de la Confédération nationale du logement (CNL). Pour les quatre-vingts ans de la Sécurité sociale, cette association représentative des locataires en HLM publie un manifeste contenant une proposition ambitieuse : la Sécurité sociale du logement.

De la « garantie Visale » vers la caisse nationale de sécurité locative

Mettre en place un système public de soutien aux locataires est une proposition politique vieille de plus de vingt ans. Elle apparaît d’abord lors de la campagne présidentielle de 2002 sur recommandation de Marie-Noëlle Lienemann, alors secrétaire d’État au Logement au sein du gouvernement de Lionel Jospin. L’idée était d’instaurer une couverture universelle pour lutter contre les expulsions locatives causées par des impayés de loyers et de permettre aux plus précaires de bénéficier d’une caution assurée par l’État.

L’idée renaît en 2014 quand Cécile Duflot, ministre du Logement, propose d’instaurer une garantie universelle des loyers (GUL) dans le cadre de la loi Alur. Obligatoire pour les bailleurs, ce financement public était pensé pour les sécuriser en se substituant aux locataires en défaut de paiement. Jamais entrée en vigueur, cette réforme est remplacée par une mesure moins ambitieuse, la garantie Visale, dont les locataires peuvent bénéficier via Action logement quand ils en font la demande.

« Une garantie existe bien, explique par suite Eddie Jacquemart, mais la CNL propose de créer une indemnisation qui ne serait pas une ”Visale améliorée”, mais une allocation comme pour la perte d’un emploi avec l’assurance-chômage. » L’association préconise de créer une caisse nationale de sécurité locative, « un guichet unique », pour prendre en charge une partie du loyer impayé, via une aide qui serait déclenchée lors d’accidents de la vie (perte d’un emploi, baisse de revenus…).

Mutualiser les financements existants pour verser cette allocation

Mesure universelle à laquelle les locataires du parc social mais aussi privé pourraient avoir recours sans condition. Cette allocation serait encadrée : « Elle est limitée dans le temps, développe le président de l’association représentative des locataires, elle serait de vingt-quatre mois, et dégressive. » La CNL propose que le montant de l’aide soit plafonné en fonction du prix du mètre carré, du montant du loyer ainsi que des charges liées directement au logement.

Si la création de cette caisse est portée par la CNL depuis une dizaine d’années, la nouveauté du manifeste est d’avoir chiffré précisément le financement de la mesure. « Il n’y a quasiment pas de surcoûts pour l’État si on mutualise les ressources existantes », s’enthousiasme Eddie Jacquemart.

La garantie Visale, le fonds de solidarité pour le logement et les aides au logement versées par la CAF en cas d’impayés seraient redirigés vers la caisse. Les taxes sur les logements vacants et l’impôt sur la fortune immobilière y seraient aussi réaffectés. « Ça fait des années qu’on donne de l’argent au secteur privé, plus d’un milliard d’euros. Nos impôts paient la rente foncière des multipropriétaires », s’énerve-t-il.

Créer de nouvelles sources de financement

La CNL propose également de créer un livret logement sur le modèle du livret A pour garantir une épargne dédiée au financement du logement social. Pour ce faire, elle propose de « révolutionne (r) le système du dépôt de garantie : comme en Belgique, il ne sera plus versé sur le compte du propriétaire, mais dans une banque ». En plus de créer de nouveaux financements, il « sécurisera la restitution du dépôt de garantie », indique Eddie Jacquemart, soulignant qu’un tiers de l’accompagnement de son association consiste à défendre des locataires dont les propriétaires refusent de rendre la caution.

« On propose seulement la création d’une taxe en plus », plaide-t-il, sur le modèle du droit au bail, dispositif supprimé qui était payé par le propriétaire et le locataire. Pour compléter, la CNL recommande enfin la suppression ou la réorientation de niches fiscales dédiées au logement qui ont représenté, selon Oxfam, un manque à gagner de 28 milliards d’euros sur les douze dernières années. Sans aucune efficacité.

« Sécuriser le logement » et « freiner l’inflation des loyers »

Mettre en place cette caisse ne serait pas une mesure isolée. La Sécurité sociale du logement comprend « aussi tous les dispositifs permettant de sécuriser le logement et de freiner l’inflation des loyers, par exemple la généralisation de l’encadrement des loyers », développe Eddie Jacquemart. Renforcement du parc social, transformation des logements vacants, aide à la rénovation, régulation des Airbnb… de multiples mesures complètent ainsi le dispositif.

La CNL veut convaincre qu’on est loin d’avoir tout essayé contre la crise des logements. Elle plaide pour que les villes deviennent des « laboratoires » en expérimentant la mesure avant qu’elle soit nationalisée. « Et on espère que ça va infuser dans les programmes des candidats à la présidentielle », sourit le président de l’association.

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