Suède : un taux de fécondité au plus bas depuis 1749, une tendance qui devrait se poursuivre "jusqu’à 2035 voire 2037"

La natalité est en baisse quasi généralisée dans toute l’Europe et même en Suède où le taux de fécondité a longtemps été l’un des plus élevés du continent. En 2023, le royaume a même enregistré son taux de natalité le plus bas depuis 1749. Une des conséquences directes, c’est la fusion et même la fermeture de plusieurs écoles dans le pays. Environ 12% des crèches pourraient fermer d’ici 2027. Cette tendance affecte surtout les zones rurales, mais aussi les grandes villes.

À Stockholm, des établissements scolaires ont déjà dû fermer faute d’élèves. C’est notamment le cas de l’école Égalia connue pour son avant-gardisme sur les stéréotypes de genre. Dans un autre quartier, 28 crèches sont actuellement inoccupées, mais pour Peter Bragner, directeur des écoles primaires de Stockholm, la situation reste pour l’instant sous contrôle. "Comme on le voit, dit-il, cette tendance à la baisse devrait se poursuivre jusqu’à 2035 au moins, voire 2037. On prévoit qu’il y ait 10 000 élèves de moins à l’école sur les dix prochaines années, c’est un défi qu’on peut relever, mais c’est vrai que les projets de construction qui ont été faits il y a cinq ou dix ans ont été mis sur pause. Je parle avec mes collègues, directeurs d’école à la campagne, et pour eux, la situation est bien plus compliquée".

Incertitudes économiques ou "changement de culture" ?

Pourtant, la Suède reste un laboratoire social observé par beaucoup pour ses politiques familiales parmi les plus généreuses au monde. Les parents bénéficient de 480 jours de congé parental à se répartir comme ils veulent. Même les grands-parents peuvent en bénéficier. Ils perçoivent aussi de nombreuses aides financières. Mais ça ne suffit visiblement plus à encourager les Suédois à faire des enfants. Alfred et Isabelle ont longtemps hésité avant de franchir le pas. En cause, l’inflation des dernières années, particulièrement forte en Suède.

"C’est clair qu’on hésite si on sait que ça va être beaucoup plus difficile économiquement, ça procure beaucoup de stress."

Isabelle, une jeune maman

sur franceinfo

"On pourrait faire plus en apportant un plus grand soutien économique aux futurs parents", suggère Alfred.

Pour le chercheur spécialisé en démographie Martin Kolk, les politiques familiales suédoises contribuent tout de même à minimiser la baisse de la natalité. "Si on regarde la différence entre les pays européens, explique-t-il, on voit assez clairement que les pays avec les politiques familiales les plus généreuses ont un plus fort taux de natalité. Si la Suède n’avait pas ces généreuses politiques familiales, la natalité aurait été plus basse et si elles étaient encore plus généreuses, peut-être que le nombre de naissances augmenterait un petit peu mais c’est surtout un changement global de culture qui affecte la natalité et la vision de la vie de famille."

Le taux de vasectomie a doublé en 10 ans

Autre chiffre parlant, celui des vasectomies. Leur nombre atteint des records en Suède. Il a doublé en 10 ans. Kerstin Karlqvist Falk est infirmière dans une clinique qui pratique cette stérilisation à Uppsala et elle, ce qu’elle remarque, c’est que les patients qui franchissent la porte sont de plus en plus jeunes et ont de nouvelles motivations.

"Ils se demandent pourquoi vouloir des enfants dans notre monde actuel ?"

Kerstin Karlqvist Falk, infirmière

sur franceinfo

"La vie est devenue très chère, souligne l'infirmière, les loyers augmentent tout comme le prix de l’électricité. On a eu une pandémie et des guerres. Les jeunes sont très conscients du réchauffement climatique, ils veulent un futur durable et pas surpeuplé."

Beaucoup s’accordent à dire, comme le chercheur Martin Kolk, que cette baisse du taux de natalité reflète un climat d’incertitudes économiques et sociales mêlé à des questionnements existentiels et des évolutions culturelles.