TÉMOIGNAGES. "Le bébé est mort de faim" : dans la bande de Gaza, les médecins alertent sur la situation "la plus critique" au sein des hôpitaux
Plus de 110 personnes sont mortes à cause de la famine depuis le début de la guerre selon le ministère de la Santé de Gaza lié au Hamas. Près de la moitié des décès ont été enregistrés sur le seul mois de juillet. La famine s’étend et s’aggrave rapidement dans le territoire palestinien assiégé alors qu'Israël empêche l’entrée de la presque totalité de l’aide humanitaire dans l’enclave depuis mars.
Les établissements hospitaliers de la bande de Gaza sont saturés. Il n’y a plus de lits disponibles pour accueillir les patients, entre ceux qui souffrent de malnutrition et ceux qui ont été blessés par les assauts israéliens. "Nous atteignons maintenant la situation la plus critique, celle sur laquelle nous alertons depuis un moment. Malheureusement, nous y sommes maintenant, explique le docteur Ahmed El Farah qui dirige l’hôpital Nasser à Khan Younes, dans le centre de l’enclave. Ces dernières 72 heures nous avons vu de très nombreux cas arriver dans nos hôpitaux avec d’importantes pertes de poids. Et, malheureusement, nous en avons perdu certains."
"Ça me rend profondément triste, on ne peut rien faire"
Il y a quelques jours, de jeunes parents se sont présentés à l’hôpital Nasser avec leur bébé de trois mois, complètement dénutri. Faute de moyens disponibles, il n’a pas pu être admis à l’hôpital, la seule solution était un matelas à même le sol, ce que les parents ont refusé. "Le bébé est mort de faim, raconte le docteur palestinien. Il avait trois mois, il était très dénutri et il est mort de faim. Ça me rend profondément triste, on ne peut rien faire."
Ahmed el-Farah appelle les dirigeants internationaux à faire pression sur Israël pour permettre l’ouverture des frontières et l’entrée de l’aide humanitaire. Un cri d’alerte auquel se joint le docteur Moataz Harara, directeur du service d’urgences de l’hôpital al-Shifa, où s’est rendu le journaliste Rami Al-Meghari.
"Ces cas ne vont qu'empirer si la situation ne change pas. Le monde doit arrêter ça. Il faut rouvrir les points de passage et laisser entrer la nourriture. Sinon, les malades et les affamés vont continuer à affluer et les hôpitaux ne pourront plus répondre, ils vont s'effondrer."
Moataz Harara, directeur du service d’urgences de l’hôpital al-Shifaà franceinfo
"Il a la peau sur les os"
Dans son hôpital, une mère est venue accompagnée de son fils de 18 ans, à la santé fragile, et très amaigri. "Je leur ai demandé des compléments alimentaires mais ils les réservaient aux enfants de moins de 5 ans, raconte la mère de famille. Qu'est-ce qu'il va manger ? Mon fils n'a qu'un seul rein. L'eau qu'on boit est contaminée. Je n'ai plus rien à lui donner à manger. Maintenant, il a la peau sur les os", se désespère-t-elle.
Israël s'est défendu mercredi d'être responsable de la pénurie de nourriture dans la bande de Gaza et a accusé le Hamas d'avoir provoqué une crise humanitaire. Selon les Nations unies, plus de 100 000 femmes et enfants souffrent aujourd’hui de malnutrition dans la bande de Gaza.