Global Sumud Flotilla : malgré les difficultés, la flottille et les militants repartent de Tunisie pour rejoindre Gaza

Cap Bon (Tunisie), envoyé spécial à bord du Mia-Mia.

À l’issue d’une nuit perlée d’étoiles filantes sur une mer d’huile, le Mia-Mia a jeté l’ancre, ce lundi 15 septembre, dans une crique du cap Bon, en Tunisie. C’est le premier navire de la Global Sumud Flotilla à avoir quitté, la veille, les ports de Tunis et Bizerte. Le voilier de 42 pieds doit être rejoint, dans la journée, par une trentaine d’autres bateaux engagés dans cette initiative pacifiste internationale visant à briser le blocus imposé par Israël à la population gazaouie, en Palestine occupée.

Ce départ est vécu comme un soulagement par les équipages, après les attaques de drones incendiaires contre deux embarcations dans le port de Sidi Bou Saïd et une série d’incertitudes génératrices de tensions. Elles sont le pendant de la remarquable rapidité de mise en place de cette action imaginée au début de l’été.

En quelques semaines, militants, artistes, syndicalistes et citoyens de plus de quarante pays ont réussi à créer la plus grande flottille citoyenne jamais organisée. Mais les défis sont nombreux.

Débat sur la composition des équipages

La sécurité à bord est une priorité, mais sa définition peut varier selon les délégations composant le mouvement. « Lors d’une réunion, un responsable de la Sumud (regroupant les pays africains et asiatiques – NDLR) a reproché aux Européens leur souci du confort », explique une des responsables de la délégation française.

Sur le port de Gammarth, où sont préparés les bateaux tunisiens, turcs et libyens, ces divergences se traduisent concrètement. Qui doit financer les réparations, les équipements de sécurité et de traçage ? Tandis que les responsables débattent, les marins s’acharnent à coopérer fraternellement.

Sur le Mia-Mia, la délégation française décide de prendre les devants : « Il faut dépasser les divergences, insiste un de ses membres. L’objectif est commun : briser le blocus sur Gaza et changer ce monde. »

D’autres blocages, notamment sur la composition des équipages, contribuent à retarder le départ de la flottille. Les délégations du Sud veulent embarquer un maximum de ressortissants de leur pays, alors que le principe initial était la mixité des nationalités.

« Nous faisons en sorte qu’un maximum de Tunisiens montent à bord du Mia-Mia parce que nous ne comprenons pas pourquoi aucun d’entre nous n’est à bord d’un des navires amiraux de la flottille », dénonce une jeune militante en train d’acheminer des vivres à bord du voilier.

« Nous faisons surtout en sorte de s’assurer qu’aucun élément violent ne monte à bord d’une des embarcations », rétorque une des responsables internationales du mouvement. La liste des passagers du Mia-Mia n’est validée que vingt minutes avant son départ.

Des pressions extérieures, par ailleurs, compliquent encore la situation. Sur le quai du port de Gammarth, deux jours avant, un des responsables de la délégation française s’inquiète d’un nouveau report. Il contacte par téléphone une des responsables du mouvement.

« Elle vient de m’expliquer que les États-Unis font pression sur les autorités tunisiennes pour qu’aucun bateau de la Sumud ne prenne la mer, explique-t-il abasourdi. Il faut passer outre et partir dès que les listes sont validées. » Sur le même quai, un des marins s’arrache les cheveux.

Le skipper officiel assigné au Mia-Mia vient de jeter l’éponge face aux recommandations contradictoires reçues des différentes composantes de la flottille. Il n’est d’ailleurs pas le seul à avoir quitté le projet durant la semaine suite aux attaques de drones ou à ces désaccords entre dirigeants du mouvement.

Enfin le départ

Le 13 septembre, peu avant minuit, un accord est enfin trouvé sur les listes. Le Mia-Mia peut faire le plein de gasoil, charger le matériel humanitaire et les vivres pour quinze jours. À Bizerte, par contre, les autorités freinent l’avitaillement en carburant, mais la détermination des marins et la solidarité locale, ce 14 septembre, finissent ici aussi par débloquer la situation.

Peu avant le départ, un nouvel appel remet à nouveau en cause la composition de l’équipage du Mia-Mia. Trop tard : les passeports sont tamponnés, aucune modification n’est possible. Le voilier doit quitter le port avec les personnes déclarées à son bord. C’est parti ! Et ce départ sonne celui de tous les autres navires. 

Dans quelques jours, toutes les composantes de la flottille – parties de Barcelone, de Tunisie, de Sicile et de Grèce, une soixantaine de navires en tout – convergeront vers Gaza.

À bord du Mia-Mia, la première nuit se déroule dans l’enthousiasme. Neuf personnes de quatre nationalités du Nord et du Sud – journalistes, artiste, soignant, ouvrier, humanitaire et marins – voguent ensemble. Ils partagent chants révolutionnaires et recettes.

L’un d’eux répond au message d’une des personnes chargées de l’accompagnement de la mission à terre : « Ici, tout va bien. Nous venons de jeter l’ancre au point de rendez-vous avec les autres navires. Les incertitudes de ces derniers jours ont été très fatigantes mais nous voilà en mer et notre détermination est intacte. »

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