«Le vendeur m’a garanti qu’elle avait appartenu à John Lennon» : Marc-Francis bichonne sa Jaguar de 1972
«Jeune adulte, je dessinais des Jaguar à l’échelle un dixième, pour en faire des reproductions techniques très précises», introduit Marc-Francis Bach, 78 ans, depuis sa résidence en Bourgogne. «C’était des mythes dans les années 60. Je collectionnais même les prospectus de concessions». Sa passion pour les Jaguar, Marc-Francis l’a tiré de grandes figures : «Enzo Ferrari disait que les Jaguar étaient les plus belles voitures du monde. Brigitte Bardot roulait avec dans ses films. Et il y en a toujours une dans les films de Louis De Funès ». Mais la figure qui a le plus nourri la passion de Marc-Francis reste Bob Morane et notamment ses aventures dans ses livres et bandes dessinées. «Bob Morane était comme moi, ingénieur, pilote d’avion et d’hélicoptère, et il roulait en Jaguar», s’enthousiasme-t-il.
Bref de cet imaginaire, il nourrit depuis son adolescence le rêve de posséder un de ces véhicules, mais sans l’argent nécessaire. Arrive l’année 78, où l’adolescent rêveur est devenu un passionné de mécanique, bien installé dans la vie active. Marc-Francis a 32 ans. «J’achète alors une Jaguar XJ6, un modèle 6 cylindres de 1966». Sans grand succès, les premières fois sont parfois des ballons d’essais. Des soucis de rouille et autres problèmes mécaniques apparaissent. «Je n’avais pas une grande expérience avec ces voitures, et les réparations coûtaient trop cher (dans les 10.000 francs), donc je l’ai revendue».
Une anecdote de roman
En 1980, sa passion pour les Jaguar prend une tournure que l’on raconterait bien dans un roman. « J’ai trouvé une annonce dans un journal suisse pour une Jaguar type E - V12 de 1972 qui aurait appartenu à John Lennon . Je n’ai pas réagi tout de suite car je ne connaissais pas vraiment l’artiste. J’écoutais plutôt Johnny Hallyday », sourit-il. Lorsqu’il se rend sur place à Lucerne en Suisse, le vendeur lui confirme que la voiture a appartenu à l’icône des Beattles. «À l’époque, je me suis juste dit “Bon, c’est bien, il y a son parfum dans la voiture”, mais c’est tout». Marc-Francis acquiert alors le modèle option John Lennon pour 25.000 francs suisses, soit environ 100.000 francs français (l’équivalent d’environ 57.000 euros aujourd’hui).
Il garde cette Jaguar jusqu’à aujourd’hui, 45 ans d’une histoire qui continue de s’écrire. Comme toute diva de l’automobile, le véhicule se révèle souvent capricieux. « Je ne compte pas les problèmes avec l’électronique, les soucis d’allumage », raconte Marc-Francis. La spécificité de ce modèle reste que le moteur chauffe beaucoup, (environ 100 degrés). Sous cet effet, les composants se dilatent et se rétractent facilement. «Cela coupe le circuit, et entraîne l’arrêt de la voiture. Il faut souvent se ranger au bord du trottoir et attendre 10 minutes. Ce n’est pas une voiture avec laquelle on peut vraiment rouler en été, il vaut mieux l’utiliser à la saison fraîche».
Des broutilles, mais surtout une passion
Un problème serait directement lié aux goûts très particuliers de l’ancien propriétaire. «John Lennon avait mis une figurine sur le capot, un aigle ou quelque chose comme ça», raconte Marc-Francis. La figurine avait depuis été enlevée, mais il restait des traces avec mastic qui avait servi à la fixer. «J’ai donc dû refaire le capot avec des pièces d’origine, ça m’a coûté une petite fortune, presque le prix d’une voiture», explique le retraité.
Après une période de dix ans où la Jaguar est restée au garage, entre 1985 et 1995, Marc-Francis reprend le volant de sa protégée. « Quand je suis allé la voir après tout ce temps, je me suis dit qu’elle était très belle. Quand on ne la voit pas, on oublie parfois. C’est comme avec les femmes : quand on les revoit, on se dit toujours “Ah, quand même, elle était chouette”. La Jaguar il ne faut jamais la brusquer. Entre collectionneurs on dit : c’est une vieille dame dont il faut prendre soin». Ce modèle n’est donc clairement pas fait pour les longues distances. « Je fais des petites balades, mais pas grand-chose. Si vous voulez faire de la route avec, il vous faut un mécanicien dedans ! », s’amuse-t-il.
À 78 ans, le collectionneur pose finalement un regard lucide et très détaillé sur cette relation. Avoir possédé une Jaguar fait partie des réalisations de sa vie. Pour lui qui a toujours été passionné par Bob Morane, c’est comme s’il avait vécu une aventure à la hauteur de son héros de jeunesse.