Violences sexistes et sexuelles dans la culture : la commission d’enquête appelle à passer aux actes

Après les témoignages poignants, voici venu le temps des conclusions. La commission d’enquête relative aux violences commises dans les secteurs du cinéma, de l’audiovisuel, du spectacle vivant, de la mode et de la publicité a permis de crever l’abcès et de dénoncer l’omerta en vigueur. « La fin du premier acte, pas la fin de la pièce », a assuré le rapporteur, le député Erwan Balanant (Ensemble), en invitant les professionnels du secteur à se saisir des 87 propositions du rapport dévoilé ce mercredi 9 avril.

Fruit de six mois d’auditions de quelque 350 personnalités, le volumineux rapport dresse le constat de violences « systémiques » et « endémiques » dans la culture, qui « débutent dans les écoles, continuent dans les castings », a rappelé Sandrine Rousseau (les Écologistes), la présidente de la commission, tout en dénonçant « la complaisance avec celles et ceux qui commettent ces violences », qu’elles soient morales, sexistes, sexuelles, économiques aussi, physiques parfois.

« Le culte du talent et l’excuse du génie auxquels on pardonne tout »

Le rapporteur a, lui, remis en cause « le culte du talent et l’excuse du génie auxquels on pardonne tout ». « J’ai eu la chance d’avoir des projecteurs braqués sur moi. Quand j’ai pris la parole, on m’a regardé avec une forme d’obligation d’écouter l’espace d’un instant alors que beaucoup de gens prennent la parole sans qu’on ne les entende jamais », se désole Judith Godrèche.

Parmi les facteurs de risques, la précarisation généralisée, des conditions de travail où domine la promiscuité et où le corps tient une place fondamentale ont été identifiées. Le rapport pointe aussi la nécessité d’apporter une plus grande attention aux enfants, proposant l’extension du cadre juridique actuel de 16 à 18 ans, la prohibition de la représentation sexualisée des mineurs à l’écran, la présence obligatoire d’un responsable aux enfants dont l’honorabilité, ainsi que celle de tous ceux qui seront en contact avec les mineurs auront été contrôlées.

« Des centaines de témoignages écrits »

Signe de l’importance de cette commission pour la filière, les témoignages continuent d’affluer. « Au départ, personne ne voulait témoigner », explique Erwan Balanant. « On a ouvert un robinet, aujourd’hui, il coule. En plus des 400 personnes auditionnées, on a reçu des centaines de témoignages écrits. Il nous faut des statistiques au niveau du ministère de la Culture avec un baromètre des violences sexistes et sexuelles, annuel ou bisannuel, pour voir si la pression redescend. Si elle ne redescend pas, il faudra aller encore plus loin », poursuit le député. Sandrine Rousseau en appelle aux chercheurs et aux chercheuses pour avoir « une photographie objectivable qui dise l’intersectionnalité, le cumul des discriminations et des violences ».

Récemment confrontée à une affaire de viol présumé sur le tournage de Je le jure, impliquant le réalisateur Samuel Theis, la productrice Caroline Bonmarchand, également membre du groupe de travail Respect qui réfléchit aux problématiques de VSS, a également réagi. « Quand on fait peser aux victimes le poids de la culpabilité de la vie d’un film ou d’une entreprise d’une centaine de personnes d’un plateau, c’est une manière de les silencier. »

Et l’actrice Sara Forestier d’abonder : « Les assurances sont le nerf de la guerre. On ne vire pas un agresseur sur un plateau parce que cela coûterait trop d’argent de le virer. Jusqu’à présent, on mettait la poussière sous le tapis. La punition était toujours du côté des victimes. »

La commission espère avoir changé la donne. « Ce rapport s’attache à ce que les conditions dans lesquelles les signalements sont faits, l’accompagnement des victimes soient bien meilleurs, revendique Sandrine Rousseau. Mais nous devons concentrer notre attention sur le fait que cela ne se produise plus. »

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