À Lyon, l’Office français de l’immigration et de l’intégration refuse d’aider des demandeurs d’asile, sans hébergements ni revenus

Lorsqu’elle pénètre dans les bureaux lyonnais de l’Office français de l’immigration et de l’intégration (Ofii), Aïssata*, 24 ans, est enceinte d’un peu plus de trois mois. La jeune mère, d’origine guinéenne, espère alors avoir accès à une aide de l’État. Après tout, la loi française impose que l’institution propose à chaque demandeur d’asile des « conditions matérielles d’accueil », soit le versement d’une allocation et une solution d’hébergement.

Aïssata est allée à la rencontre de l’Ofii, le 2 octobre 2023. Elle n’emménage dans une chambre d’un appart-hôtel, situé dans le centre-ville de Lyon, qu’en janvier 2024… grâce à l’aide de la métropole. Entre-temps, sa situation a fait l’objet de six signalements – tous pour une intervention urgente -, elle a dû survivre plusieurs semaines dans la rue, puis trois mois dans un squat, et enfin quelques semaines chez un inconnu. Le 11 décembre 2024, le média d’investigation Disclose a interrogé l’Ofii de Lyon sur le cas d’Aïssata ; elle a reçu une proposition d’hébergement à Rouen le surlendemain de l’appel.

« 1 306 demandeurs d’asile toujours en attente d’un logement »

Son cas est loin d’être isolé, comme le révèle Disclose dans une enquête publiée ce mardi 17 décembre. Le média indépendant a eu accès à « un volumineux fichier numérique baptisé “signalements” ». S’y trouvait une liste des demandeurs d’asile inscrits dans les départements de l’Ain, l’Ardèche, la Loire et le Rhône, et en attente d’un hébergement, entre janvier 2023 et juillet 2024.

« D’après ce document, on compte 1 306 demandeurs d’asile toujours en attente d’un logement, dont 467 femmes isolées, résument les auteurs de l’enquête, Feriel Alouti et Léa Prati. Aux côtés d’informations confidentielles telles que la nationalité et le genre des demandeurs se trouve une colonne “commentaires”. Elle reprend des alertes émises par des assistant·es sociales, des membres d’associations d’aides aux migrant·es ou des riverains témoins d’un état de grande précarité. »

Les quatre départements rattachés aux bureaux lyonnais de l’Ofii comptent un nombre de places d’hébergement supérieur aux demandes déposées ces dernières années. Selon les données exploitées par Disclose, l’office disposait de 5 053 places pour 1 306 demandeurs d’asile, en 2023. « ​​Nous faisons face à une situation de non-assistance à personne en danger, déplore une ancienne salariée de l’Ofii de Lyon, interrogée par le média d’investigation. J’ai vu des centaines de personnes en situation de grande vulnérabilité, qui n’ont jamais été hébergées et qu’on a laissées livrées à leur sort. »

Surtout, sur les 1 306 demandeurs d’asile présents dans la région lyonnaise et en attente d’un hébergement, plus d’un tiers sont des femmes. « Contraintes de dormir à la rue, à l’hôtel ou chez des particuliers qu’elles connaissent à peine, leurs cas interpellent, lancent Feriel Alouti et Léa Prati. D’autant plus qu’à la lecture du fichier des signalements, aucune situation ne semble suffisamment alarmante pour que l’Ofii daigne se conformer à la loi. »

Disclose met notamment en avant que la gestion des dossiers par l’Office français de l’immigration et de l’intégration crispe à l’échelle nationale. « Multicondamnée, l’administration continue néanmoins de faire étalage d’une stupéfiante désinvolture, s’alarme le média en ligne d’investigation. L’Ofii de la ville de Paris a par exemple soutenu, dans un mémoire écrit pour sa défense en octobre dernier, qu’un couple dormant à la rue avec un nourrisson de deux mois ne constituait pas une situation d’urgence. » C’est donc bien un système dans son ensemble qu’il revient de questionner. Car, dans le même temps, des dizaines de demandeurs d’asile doivent lutter contre le racisme, le froid, la faim et l’insécurité.

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