REPORTAGE. "Tout ce qu'ils font, c'est nous terroriser" : à Washington, la présence des soldats de la Garde nationale angoisse les habitants
Depuis que les treillis de la Garde nationale déambulent dans les rues de Washington, pas une journée ne se passe sans une manifestation. "Troops out DC !" (les troupes en dehors de Washington DC), scandent les militants, pour demander aux soldats de partir. Quinze jours après avoir déployé plus de 2 200 membres de la Garde nationale et les avoir armés, Donald Trump a défendu sa décision lors d'une conférence de presse improvisée au Bureau ovale. Beaucoup d'Américains "aimeraient avoir un dictateur", a-t-il lancé lundi 25 août. Mais, "je n'aime pas les dictateurs. Je ne suis pas un dictateur", a ajouté le président américain.
S'il a mis en place un tel dispositif, composé des corps de réserve des forces de l'armée américaine et des policiers fédéraux, c'est parce qu'il estime que les rues de Washington sont "envahies par des gangs violents". Pourtant, les chiffres de la criminalité dans la capitale sont au plus bas depuis 30 ans selon la mairie. Le président, de son côté, estime que ces chiffres sont manipulés.
L'impression de vivre "dans un état policier"
Huit habitants de Washington sur dix sont opposés à la reprise en main fédérale du maintien de l'ordre, selon un récent sondage du Washington Post. "Tout ce qu'ils font, c'est nous terroriser", lance Hugh, un étudiant. "Ils occupent nos rues principales. Les fédéraux installent des points de contrôle arbitraires, ralentissent la circulation pour contrôler nos voitures. Nous vivons dans un état policier en ce moment", déplore-t-il.
"Je vois maintenant des militaires de la Garde nationale, armés, patrouiller dans les stations de métro que j'emprunte tous les jours à Washington."
Hugh, étudiant à Washingtonà franceinfo
Quelques kilomètres plus loin, les membres de la Garde nationale, des jeunes en majorité, font des rondes à l'extérieur et dans les allées de l'Union station, la principale gare de Washington. La scène est lunaire pour un fonctionnaire, qui se fait appeler Crystal : "Ici, il y a juste des gens qui font des trajets domicile travail, c'est ridicule. J'ai de la peine pour eux, ils n'ont probablement pas envie d'être là non plus".
L'Américaine assure s'être toujours sentie en sécurité. "Mais maintenant, avec tous ces militaires, j'évite ce coin le soir, car on ne sait jamais, j'ai peur qu'ils dépassent les limites", admet-elle. Originaire du Kentucky, Adah fait un stage dans la capitale et n'est pas non plus rassurée. "C'est bizarre de les voir se promener ainsi avec leurs uniformes. En plus maintenant, ils sont armés".
"C'est le peuple qui devient l'ennemi"
Alors que Donald Trump compte élargir ce dispositif à d'autres villes démocrates, comme Chicago, New York ou Baltimore, Adah craint des dérives. Pour elle, c'est "comme s'il n'attendait que l'escalade quand quelqu'un s'énervera contre eux et qu'ils pointeront leurs armes en retour".
L'omniprésence des militaires exaspère aussi Randy, un ancien vétéran. "C'est assez insultant de voir ça, lâche-t-il. Quand on est dans l'armée, on dit que son ennemi est l'ennemi de l'État, n'est-ce pas ? Et c'est contre eux qu'on a été formés à combattre, alors quand l'armée est déployée aux États-Unis, c'est le peuple qui devient l'ennemi".
"La garde nationale, pour Trump, c'est juste du spectacle."
Randy, vétéranà franceinfo
Lundi 25 août, Donald Trump a également annoncé son intention de rebaptiser le ministère de la Défense en "ministère de la Guerre". Cette appellation a existé aux Etats-Unis, de 1789 à 1949.