Groupe Bernard Hayot : pourquoi des eurodéputés demandent à la Commission européenne d’enquêter sur le géant de l’agroalimentaire

La politique commerciale du groupe Bernard Hayot (GBH) va se retrouver au centre d’une enquête de l’Union européenne. Accusé d’instaurer des prix hors normes en Outre-mer, où il est hégémonique, le groupe industriel est visé par cinq eurodéputés écologistes, qui ont saisi la Commission européenne, selon les informations de Libération. L’objectif : alerter « sur les pratiques anticoncurrentielles » de GBH.

Envoyée à la vice-présidente chargée notamment de la concurrence, l’Espagnole Teresa Ribera, le 31 janvier 2025, la lettre des élus écologistes pointe « les prix excessifs pratiqués par la distribution dans les territoires ultramarins français causent une rupture d’égalité inacceptable avec les citoyens de l’Hexagone, soit entre citoyens de l’Union européenne ».

Une « concentration économique, verticale et horizontale »

Pour rappel, le groupe Bernard Hayot profite d’une position dominante dans la grande distribution, l’agroalimentaire et le secteur automobile aux Antilles, en Kanaky-Nouvelle-Calédonie ou à Mayotte. Un pouvoir qui lui a permis d’imposer des prix en moyenne 40 % plus chers qu’en France Métropolitaine – un gap qui peut même atteindre les 78 % en Kanaky-Nouvelle-Calédonie.

Cette saisine de la Commission s’articule ainsi autour de deux axes : l’abus de pouvoir de GBH, d’abord, que pointe un rapport de la commission d’enquête de l’Assemblée nationale sur le coût de la vie dans les collectivités territoriales ultramarines (juillet 2023) et une précédente enquête de Libération, ensuite, qui démontre que GBH n’hésite pas à cacher ses marges tant aux citoyens qu’à ses partenaires. Une « concentration économique, verticale et horizontale, dans un certain nombre de secteurs », donc, et une « situation de rente » dont profite GBH, regrettent les cinq eurodéputés.

« La pleine application du droit de l’Union en matière de transparence et de publication des comptes des entreprises, de bon fonctionnement du marché intérieur ainsi que de concurrence pourrait aujourd’hui s’avérer efficace pour résoudre le problème de la vie chère », poursuivent les élus européens. « Vue de Bruxelles et Strasbourg, cette situation apparaît d’autant plus ubuesque que le groupe Hayot reçoit depuis des décennies d’importantes aides européennes, notamment dans la filière bananière », rappelle de son côté le quotidien.

Autre sujet que les écologistes souhaitent mettre sur le devant de la scène avec cette enquête : l’opacité du groupe, qui n’a cessé de garder secret ses comptes pendant plusieurs années. Le groupe Bernard Hayot a fini par se résoudre à lever le voile – en partie – à la suite d’une assignation devant le tribunal de commerce de Fort-de-France (Martinique) par quatre citoyens. Soit une violation du droit de l’Union européenne en matière de transparence des comptes des entreprises. C’est pourquoi les cinq eurodéputés appellent à « l’ouverture d’une procédure d’infraction à l’encontre de la France pour avoir manqué de faire appliquer le droit communautaire », résume Libération.

Les élus écologistes espèrent aussi que leur initiative sera appuyée par d’autres groupes parlementaires – exceptée l’extrême droite -, afin de pousser l’État français à mettre GBH devant ses contradictions. Interpellé à ce sujet, le 22 janvier 2025, à l’Assemblée nationale, le ministre des outre-mer, Manuel Valls, avait dénoncé « l’opacité et l’accumulation des marges » et accusé GBH de jouer « un rôle d’étouffement de l’économie et du pouvoir d’achat ». En attendant, le groupe fondé en 1960 grâce à la fortune d’une famille de colons arrivée en Martinique en 1680 continue de plonger les Outre-mer dans la pauvreté… et ainsi d’accroître ses profits.

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