Pour la gauche, quelle attitude adopter face au budget Macron-Bayrou ? (1/2)
Il faut rompre avec la politique de l’offre et redonner les moyens aux services publics. Les députés France insoumise voteront la censure.
Mathilde Feld
Député FI de la Gironde
J’attends du budget 2025 qu’il rompe enfin avec une politique de l’offre qui a magistralement montré son inefficacité à faire ruisseler la richesse ailleurs que dans les poches des riches. Entre 2003 et 2022, le revenu annuel des ultrariches a plus que doublé, pendant que le taux de pauvreté de notre pays, 7e puissance mondiale, atteint plus de 14 %. Dix millions de personnes vivent avec moins de 14 600 euros par an ! Non seulement cette politique de malheur est incapable de redistribuer les richesses, mais en plus les gouvernements Macron ont creusé le déficit public de façon historique.
J’attends que nos services publics soient financés à la hauteur des besoins des Français. Éducation, santé, justice… les fondements de notre contrat social sont sapés depuis trop longtemps par une politique consistant à réduire les recettes de l’État au bénéfice exclusif des plus fortunés.
Nos services publics ne tiennent aujourd’hui que par le courage de celles et ceux qui exercent ces missions, au premier rang desquels nos soignants, nos enseignants et nos pompiers. Il faut leur garantir notre reconnaissance par un salaire digne et des conditions de travail décentes. L’austérité pour nos collectivités territoriales prévue par Bayrou n’a aucun sens, car elle les prive des moyens nécessaires pour faire face à leurs obligations : entretien des routes, des collèges, des lycées, des casernes de gendarmerie, dégradant ainsi les conditions de vie et de travail de nos agents et les services rendus à la population.
Les résultats piteux de la politique budgétaire d’Emmanuel Macron sont sous nos yeux, la rupture doit donc être totale. Nous devons refonder notre fiscalité pour que les gros payent gros et que les petits payent petit. La précarité et la pauvreté, notamment des travailleurs, ne cesseront pas en s’attaquant à celles et ceux qui ont encore moins, mais en organisant un véritable partage des richesses, qui est le préalable indispensable à la lutte contre le réchauffement climatique.
La France doit jouer un rôle de premier plan dans la lutte contre l’évasion fiscale. Aux antipodes des plans de communication des ministres macronistes successifs, il nous faut affirmer un volontarisme politique sans faille, se traduisant par des actes concrets. Garantir une imposition effective minimum des ultrariches en l’indexant sur leur patrimoine comme le propose Gabriel Zucman est à ce titre indispensable.
Enfin, tout budget amputant des crédits au ministère de la Transition écologique et à celui de l’Agriculture serait totalement irresponsable. Nous parlons ici des fondements de notre vie sur cette Terre. Il faut arrêter les politiques du coup par coup et planifier nos actions sur le long terme.
À ce stade, le texte discuté dans une CMP (commission mixte paritaire) majoritairement composée de parlementaires de droite et d’extrême droite ne remplit aucun de ces objectifs. Censurer Bayrou est une nécessité pour faire entendre enfin raison à Macron.
Opposés au budget, les sénateurs du groupe CRCE-K défendent dix mesures alternatives. Les députés GDR voteront la censure.
Pierre Barros
Sénateur CRCE-K du Val-d’Oise, membre de la commission des Finances
Pascal Savoldelli
Sénateur CRCE-K du Val-de-Marne, vice-président de la commission des Finances.
Les projets de loi de finances et de financement de la Sécurité sociale pour 2025 Attal-Barnier-Bayrou prévoient des coupes importantes dans les dépenses du budget de l’État et une baisse des moyens pour les services publics, les collectivités, la Sécurité sociale, déjà exsangues. Le refus de dégager de nouvelles recettes confine le débat parlementaire aux choix des dépenses à couper. Nous refusons cette parodie de démocratie.
C’est un autre budget que les groupes de la Gauche démocrate et républicaine de l’Assemblée nationale et du groupe Communiste républicain citoyen et écologiste – Kanaky du Sénat veulent proposer : un budget qui soit au service de la solidarité nationale et non au profit de quelques-uns, un budget qui crée une richesse vertueuse. C’est pourquoi nous venons de déposer une proposition de loi visant à instaurer diverses mesures d’urgence sociale et fiscale. Elles mettent en évidence que l’austérité pour tous est un choix politique et non une fatalité.
Face à l’urgence climatique et écologique, un sursaut est indispensable notamment dans les territoires dits ultramarins, en première ligne face aux conséquences du réchauffement climatique. Nous formulons dix propositions alternatives en faveur de la justice sociale : abrogation de la réforme des retraites, augmentation des salaires (Smic à 1 600 euros et salaires indexés sur l’inflation), évolution du traitement des fonctionnaires (point d’indice reconsidéré à + 10 %), revalorisation des pensions de retraite (fixation du montant minimum de retraite à 100 % du Smic net pour une carrière complète) et des minima sociaux à hauteur de + 10 %, amélioration du pouvoir d’achat des ménages (par un blocage des prix des loyers, des produits alimentaires…) et lutte contre la vie chère dans les territoires dits d’outre-mer (instauration d’un taux à 0 % pour les produits de première nécessité).
Dix propositions de justice fiscale viennent compléter le projet : lutte contre l’évasion fiscale grâce notamment à l’imposition des plus-values, mise à contribution des revenus du capital, doublement de la taxe sur les transactions financières, rétablissement de l’impôt sur les sociétés, abrogation des niches fiscales injustes, conditionnement des aides aux entreprises ou encore instauration de taxes sur les très hauts patrimoines.
Nous voulons aussi protéger les services publics et les collectivités locales par l’indexation de la dotation globale de fonctionnement des collectivités sur l’inflation. Ces propositions démontrent notre crédibilité financière.
L’enjeu consiste à sortir d’une société corsetée par la rente et l’héritage où l’accumulation stérile remplace l’élan collectif. Chaque fois, dans notre histoire, que les rentiers accumulent des sommes considérables, le pays s’appauvrit et les inégalités s’accentuent. C’est le respect du pacte social et fiscal que nous remettons au centre des débats afin que notre République et les valeurs universelles qui la fondent soient respectées.
Avant de partir, une dernière chose…
Contrairement à 90% des médias français aujourd’hui, l’Humanité ne dépend ni de grands groupes ni de milliardaires. Cela signifie que :
- nous vous apportons des informations impartiales, sans compromis. Mais aussi que
- nous n’avons pas les moyens financiers dont bénéficient les autres médias.
L’information indépendante et de qualité a un coût. Payez-le.
Je veux en savoir plus