TEMOIGNAGE. "Or a été assassiné à 6h49 de six balles dans la tête" : un an après le 7-Octobre, la colère de cette habitante d'un kibboutz, qui a perdu son fils aîné et son mari

Comment survivre aux traumatismes du 7-Octobre ? Sabine Tassa est Franco-israélienne. Le jour du massacre, elle était chez elle, à Netiv HaAsara, le kibboutz le plus proche de la frontière avec Gaza, au nord de l’enclave. En quelques heures, elle a perdu son mari et son fils aîné. Il lui reste ses petits garçons gravement blessés et traumatisés.

En une année, Sabine Tassa est passée d’une infinie tristesse, à une profonde rage : "Je n'ai peur de personne. Et moi, je vais montrer à tout le monde la vérité !" La "vérité" que Sabine raconte et montre à qui veut bien l’entendre, c’est, pour cette veuve, l’insoutenable vidéo du corps de son aîné, Or, retrouvé le matin du 7 octobre, sur la plage de Zikim : "Or a été assassiné à 6h49 de six balles dans la tête. Tout a été filmé par les terroristes. Ils ont tout mis sur Facebook." 

"Tout le monde savait que mon fils Or a été assassiné. Moi, comme je n'avais pas de connexion, j'étais la dernière à le savoir."

Sabine Tassa

à franceinfo

"Et il explose devant les garçons"

Trente-six minutes plus tard, le mari de Sabine, Gil, se réfugie dans un abri du kibboutz avec ses deux jeunes fils de 13 et 9 ans, Koren et Shay : "Gil a été assassiné. En fait, il a explosé avec une grenade à 7h25."

Gil s’est en réalité sacrifié pour sauver les deux garçons : "Ils viennent vers lui et immédiatement, ils jettent une grenade. Ils savent qu'il y a deux petits garçons là-bas parce qu'ils entendent les garçons pleurer. Gil prend la grenade. Il dit à Koren et à Shay : 'Je vous aime.' Il met la grenade sur son ventre pour essayer de sortir et voir s'il arrive à s'en débarrasser avant qu'elle explose. Et il explose devant les garçons...", raconte la mère de famille.

Les blessures physiques et psychologiques sont profondes. Sabine a depuis un an, mis sa vie entre parenthèses, pour s’occuper de ses petits : "Shay est resté aveugle d'un œil. Il est blessé partout, il est plein de cicatrices. Il est très traumatisé. Si je ne suis pas deux ou trois heures à la maison, il commence à paniquer. Koren ne regarde pas les gens dans les yeux, il a perdu confiance. J'en ai marre : chaque jour, je vois des psys pour Shay, Koren.... C'est ça ma vie aujourd'hui."

Un drame personnel et familial, qui n’empêche pas Sabine de se projeter : "Dès que je pourrai retourner, je serai la première à retourner et je vais retourner à Netiv HaAsara." Elle veut vivre de nouveau dans son Kiboutz, avec ses fils, pour être au plus près d’Or et de Gil et continuer à honorer leur mémoire.