L'ordre des avocats demande la fermeture d’un centre de rétention administrative de Lyon Saint-Exupéry

L'ordre des avocats de Lyon a multiplié les visites, au rythme d'une par an, depuis l'ouverture du CRA numéro 2, inauguré par Gérald Darmanin en 2022 et présenté comme un modèle du genre. Ministère de l'intérieur

Le barreau de Lyon a saisi la justice administrative d'un référé liberté pour demander la fermeture du CRA numéro 2 face aux atteintes répétées à la liberté des personnes retenues dénoncées depuis plusieurs années.

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Le Figaro Lyon

«Une situation qui perdure malgré des tentatives de dialogue». Après plusieurs visites au Centre de rétention administratives (CRA) numéro 2 de l'aéroport Lyon Saint-Exupéry ces dernières années, le Barreau de Lyon a saisi la justice administrative pour demander sa fermeture, selon une information de BFM confirmée au Figaro. Le référé liberté qui sera étudié ce lundi 21 octobre ne traduit «pas un positionnement politique» de l'ordre des avocats, assure ce dernier, qui pointe une montée des violences au CRA, l'insuffisance des repas et l'absence d'intimité des retenus. Le CRA numéro 1 n'est d'ailleurs pas visé par le référé.

«Nous n'avons pas de positionnement de principe contre les CRA mais en tant que défenseurs des libertés nous disons aujourd'hui que les conditions de retenue ne sont pas acceptables. Nous portons donc deux demandes, principalement d'ordonner la fermeture du CRA 2 dans l'attente de sa mise aux normes et, subsidiairement, nous enjoignons le ministère de l'Intérieur à faire cesser ces atteintes», détaille au Figaro Me Sara Kebir vice-bâtonnière. 

«Conditions de vie déshumanisées»

L'ordre a en effet multiplié les visites, au rythme d'une par an, depuis l'ouverture du CRA numéro 2, inauguré par Gérald Darmanin en 2022 et présenté comme un modèle du genre. À la suite de l'une d'elles, en avril 2023, l'ancienne bâtonnière, Me Marie-Josèphe Laurent, avait dénoncé une «situation dramatique», décrivant des «conditions de vie complètement déshumanisées» qui génèrent un «climat de violences inacceptables». Ce contexte a poussé le médecin du centre à démissionner au printemps 2023. Forum Réfugiés, une des ONG partenaires, avait aussi suspendu temporairement sa mission. 

Dans le détail, le rapport de l'Ordre des avocats pointe des difficultés d'accès aux soins, notamment psychiatriques, mais aussi une nutrition insuffisante, les retenus se plaignant de la faim, ou encore l'absence de portes de toilettes et de loisirs pour les retenus. Une situation également dénoncée par les parlementaires écologistes Marie-Charlotte Garin et Thomas Dossus, mais surtout la contrôleuse générale des lieux de privation de liberté, Dominique Simonnot, après plusieurs jours passés sur place. «L'hébergement et les conditions de prise en charge ne respectent pas la dignité des personnes retenues, concluait son rapport de juin 2023. Ces locaux, indignes dans leur conception même, ne doivent pas servir de modèle aux futurs CRA». 

Prégabaline et contention 

Construit sur le modèle carcéral, ce CRA numéro 2 de l'aéroport Saint-Exupéry connaît «des problématiques similaires» à celles des établissements pénitentiaires, selon Sarah Kébir, surpopulation et violences en tête. Des difficultés qui pourraient s'accroître avec l'allongement de la durée légale de rétention proposée par Bruno Retailleau après le meurtre de la jeune Philippine par un étranger sous OQTF. Bâti pour 25 millions d'euros à côté d'un premier centre, dit CRA 1, le CRA 2 affiche une capacité de 140 places, comme son prédécesseur. Les personnes qui y sont retenues en attente de retour dans leur pays d'origine, essentiellement le Maghreb et l'Europe de l'est, le sont au vu de leur situation administrative. Ils ne font pas l'objet de condamnation pénale.

Le rapport de Dominique Simmonot pointait également une surprescription de Lyrica, médicament contenant de la prégabaline et fréquemment détourné à des fins récréatives pour ses effets euphorisants. Elle notait aussi la présence de «matériel de contention de psychiatrie qui est utilisé par les policiers pour attacher au lit les personnes mises à l'écart». Une pratique illégale et dangereuse pour les fonctionnaires comme les retenus. Nourri de constatations et photographies, le rapport du Barreau de Lyon pointe enfin des manques financiers et humains au CRA numéro 2. Une situation également dénoncée par le syndicat Alliance alors que la police pallie depuis l’été l'absence des gendarmes du CRA détachés sur les missions de sécurisation des JO.