Médaillé d'or en service en salle, Denis Merlo revalorise un art difficile qui mérite de sortir de l'ombre

Vous souvenez-vous du visage de celle ou de celui qui vous a servi au restaurant la dernière fois ? Le chef, oui, vous êtes venu pour sa cuisine ; la sommelière était une femme, ça ne s'oublie pas ! Et le « porteur d'assiettes » ? Imaginez, pourtant, face à vous, une « gueule » de carême le sourire à la traîne, la main tremblante au-dessus du plat... Sans son professionnalisme, rien ne serait pareil. 

Dans cet art du sourire, de la découpe et du flambage, un Français excelle : Denis Merlo, consacré champion du monde aux WorldSkills de Lyon, le mois dernier. Un parcours de combattant : vingt-deux heures de compétition, en anglais, d'épreuves pratiques — en gastronomie, brasserie, bistrot, banquet. Face à 34 concurrents internationaux, le jeune homme de 21 ans a gagné ses jeux olympiques : « Ma médaille a la même valeur ». Que de persévérance, en effet, pour en arriver là. Intégrer l'équipe de France, préparer le concours a nécessité deux ans et demi d'un entraînement hallucinant. « On a un statut de compétiteur de haut niveau », précise cet ancien karatéka qui a mis à profit son expérience dans le sport.

Conserver la constance

Être le meilleur réclame « d'avoir la gagne, de s'engager totalement, d'élaborer une stratégie. Puis de gérer le stress, être précis, rapide ». Pour optimiser ses chances, le diplômé du lycée Le Corbusier de Soissons a aménagé son emploi du temps, s'est entouré de l'entraîneur national Serge Goulaieff, des professeurs Stéphanie Lemoine-Boutté et Rosalie Bojoly. Physique et mental ont été pris en considération. 

Hormis son travail de commis, le week-end, à L'Assiette champenoise, près de Reims, il a consacré tout son temps à répéter les rituels attendus, chez lui, au lycée, au Cifa de Lyonne, à Auxerre, en Finlande... En juin, Louis Cozette, vice champion du monde, le cornaquait avant un été studieux pour « conserver la constance » avant la consécration. Quelle fierté pour ce passionné qui, depuis gamin, se destine à un métier de service. 

Sa motivation ? « Les échanges avec le client, la maîtrise d'un savoir-faire d'excellence et de perfection, une polyvalence de plus en plus nécessaire. » Si sa profession n'est pas suffisamment valorisée, il constate un début d'évolution favorable. La publication d'ouvrages comme Éloge du service en salle, de Valérie Vrinat et Jean-Marie Ancher, y contribue. Depuis la rentrée, Denis Merlo officie comme apprenti sommelier à l'Hôtel de Crillon. Une compétence supplémentaire pour décrocher dans quelques années un titre de MOF. Et devenir le Steven Da Costa du service en salle.