Roland-Garros 2025 : Stanislas Wawrinka, Gaël Monfils, Novak Djokovic... Moins fringants, les doyens du circuit repoussent la retraite par plaisir du jeu
Ils ont presque l’âge du film, et comme les Bourdelle, les papys du circuit font de la résistance. Novak Djokovic, Gaël Monfils, Richard Gasquet, tous les trois âgés de 38 ans, ou même Stan Wawrinka, 40 ans, repoussent la retraite, pour le plaisir du jeu. Ils seront tous les quatre présents au premier tour de Roland-Garros, qui débute dimanche 25 mai.
Le corps est davantage fatigué, les courbatures plus douloureuses, les résultats pas toujours au rendez-vous, mais reste l’amour du tennis. "C’est la passion du jeu, la passion de pouvoir jouer, de pouvoir évoluer sur des courts comme ça", commente Richard Gasquet au micro de franceinfo: sport, alors qu'il mettra fin à sa carrière après Roland-Garros. Une passion et un plaisir partagés par Gaël Monfils, même si "dans le mot plaisir, il y a plein de dérivés. Prendre plaisir à faire certains sacrifices, prendre plaisir à toujours essayer d'être au maximum, sachant que l'on n'est plus à notre prime, prendre plaisir dans des situations où on n'arrête pas de dire que tu es vieux", énumérait-il lors de l’Open d’Australie.
Cette histoire passionnelle connaît naturellement des hauts et des bas pour ces joueurs au fur et à mesure que les années passent. "Il y a des phases où ils saturent physiquement et psychologiquement, observe Meriem Salmi, psychologue qui suit de nombreux sportifs, dont des joueurs de tennis. Mais très souvent, quand ils prennent le temps de récupérer physiquement et mentalement, il arrive que certains ressentent un goût d’inachevé, l’envie de revenir et cette passion pour leur sport".
Ainsi, cinq joueurs de plus de 35 ans figurent toujours dans le top 100 mondial : Novak Djokovic, Gaël Monfils, Roberto Bautista Agut, Kei Nishikori et Jan-Lennard Struff. Elles sont trois dans le top 100 féminin : Tatjana Maria, Laura Siegemund et Victoria Azarenka. D’anciennes gloires figurent, elles, au-delà de ces 100 premières places, comme Stan Wawrinka, 40 ans, vainqueur de Roland-Garros en 2015, et Sara Errani, 38 ans, finaliste à Paris en 2012. "Moi, j’ai arrêté à 34 ans. C’est tôt désormais, mais ce n’était pas tôt à l’époque", souligne Arnaud Clément, retraité en 2012.
Aller sur des tournois par envie plutôt que par obligation
"L’envie de repousser les limites au niveau de l’âge et des résultats est là. Je suis passionné par ce que je fais, mais je suis conscient qu’aujourd’hui, je n’aurai plus jamais les résultats que j’ai eu dans le passé, mais je n’ai aucun problème avec ça", affirme quant à lui Stan Wawrinka, à franceinfo: sport. Le Suisse est invité à Roland-Garros, mais connaît plus de galères sur les tournois ATP, avec des éliminations régulières dans les premiers tours. Ses résultats sont meilleurs en Challenger, le circuit secondaire du tennis professionnel, avec par exemple une finale à Aix-en-Provence en avril.
"C’est vrai que tennistiquement, physiquement, je me sens bien, je m’entraîne bien, je fais beaucoup d’efforts, mais en match c’est un peu différent. Je reste positif avec ce que je fais. Quand je décide d’aller dans un tournoi, c’est parce que j’en ai vraiment envie, parce que j’ai envie de bien faire".
Stanislas Wawrinka, triple vainqueur de tournois du Grand Chelemà franceinfo: sport
"Effectivement, ces joueurs ne vont pas faire un tournoi parce qu’il faut le faire, confirme Meriem Salmi. Ils ont fait leurs preuves, et ils jouent pour se faire plaisir, pour retrouver le tennis qu’ils ont connu quand ils étaient enfants. Moi je dis à ces athlètes, tant que la réalité ne vous arrête pas, pourquoi s’arrêter ?". Sur la fin de sa carrière, Arnaud Clément a connu un an et demi entre la 90e et la 150e place mondiale. "J’ai pris beaucoup de plaisir pendant cette période, parce que tu te mets moins de pression, ta carrière est faite, et tu en profites plus", raconte le consultant franceinfo: sport.
"Après, il ne faut pas se le cacher, on a la chance d’avoir quelques wild-cards. Si je ne l’ai pas à Monte-Carlo, à Roland-Garros ni à Montpellier, je ne sais pas si je continue non plus, il ne faut pas l’oublier", reconnaît avec honnêteté Richard Gasquet. Et avec les augmentations du prize money, même en Challenger (28,5 millions de dollars vont être distribués en 2025 sur ces tournois, une augmentation de 135% par rapport à 2022), "les niveaux de rémunération pour des joueurs autour de la 150e place restent corrects par rapport à il y a 10 ou 15 ans, note Arnaud Clément. Avant, quand tu étais 150e, tu te posais un peu plus la question de payer un coach toutes les semaines, aujourd’hui c’est un peu plus facile".
Une après-carrière qui semble moins excitante
Au micro de france.tv, jeudi, Stan Wawrinka reconnaissait tout de même qu’"on a tous une date limite". Vient alors la question de l’après-carrière. "Pour certains, c’est assez clair, avec des envies et des projets, pour d’autres, je pense que ça fait peur et c’est difficile de le verbaliser. Ca peut être un moment de dépression, parce qu’on se cherche, parce que la vie nous semble beaucoup moins excitante qu’avant", observe Arnaud Clément.
"Ce qui leur manque le plus, c’est le rythme, les émotions, le dépassement de soi, se retrouver avec son public, l’intérêt des médias… Ils ont l’impression de ne plus exister, parce que ce sport fait partie intégrante de leur identité et ce depuis très jeune, ajoute Meriem Salmi. Le travail consiste à prendre conscience que d’autres mondes peuvent leur procurer des challenges, défis, émotions fortes. Ils ont une valeur en dehors du monde sportif".
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Dans ce panel de joueurs parmi les plus âgés du circuit, Novak Djokovic, lui, espère encore vivre des émotions sportives, et fait figure d’exception dans son sentiment à toujours avoir "le jeu pour être un des prétendants aux titres en Grand Chelem", comme il le déclarait à Genève, son tournoi de préparation pour Roland-Garros. Ses derniers résultats en dents de scie ont ouvert "un chapitre différent de (sa) vie", mais le Djoker, qui a fêté son 38e anniversaire jeudi, a encore "le désir de gagner les plus grands titres, de gagner les Grands Chelems et d’être un des meilleurs joueurs du monde". Le nombre des années n’atteint pas le talent.