Le procureur de la CPI accusé d’abus sexuels et d’avoir voulu museler la victime présumée

Le procureur de la Cour pénale internationale, Karim Khan.  Piroschka Van De Wouw / REUTERS

Connu pour avoir émis des mandats d'arrêts à l'encontre de Vladimir Poutine et de Benyamin Netanyahou, Karim Khan réfute ces allégations. Il est aussi accusé par le Guardian d’avoir tenté de faire taire la victime présumée.

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Au cœur des dossiers les plus chauds de sa carrière, Karim Khan doit en gérer un plus personnel et inattendu. Le procureur de la Cour pénale internationale (CPI), qui s’est récemment bâti une réputation en émettant des mandats d’arrêt à l’encontre de Vladimir Poutine, puis de Benyamin Netanyahou et des dirigeants du Hamas, doit faire face à des accusations d’abus sexuels. La semaine dernière, la présidente de l’organe de surveillance de la CPI a publié un communiqué concernant des allégations selon lesquelles le procureur britannique aurait harcelé un membre du personnel. Le Guardian  évoque, lui, des abus sexuels, et estime que le juriste a même tenté de faire taire la victime présumée. 

«C’est avec une profonde tristesse que j’ai compris que des informations sur une mauvaise conduite allaient être diffusées publiquement à mon égard», a déclaré Karim Khan le 24 octobre, dans un communiqué transmis à l'AFP. «Il n'y a aucune vérité dans des allégations d'une telle mauvaise conduite», a-t-il ajouté. L’Assemblée des États parties (AEP), l’organe qui supervise la CPI, avait indiqué avoir «été saisie de cette question sur la base d’un signalement d’une tierce partie». Le procureur britannique estime de son côté que cette affaire est révélée dans «une période où la CPI et moi-même sommes la cible d’attaques et de menaces de toutes sortes»

Pas de plainte officielle

Le mécanisme de contrôle indépendant de l'AEP a ensuite demandé «le consentement de toute victime présumée avant de procéder à une enquête». «Après conversation avec la victime présumée, le mécanisme n'était pas en mesure de procéder à une enquête à ce stade», a expliqué l’instance. Le rapport annuel du mécanisme de contrôle mentionne l'incident, signalé à cette instance début mai, selon le document. «La personne présumée concernée a refusé de déposer une plainte officielle auprès du mécanisme, y compris lorsqu'il a été suggéré que toute enquête pourrait être confiée à une entité externe», indique le rapport.

«Il est important de noter que la personne présumée concernée a refusé de confirmer ou de nier explicitement au mécanisme les faits qui avaient été rapportés par la tierce partie au même mécanisme», est-il encore écrit. «En conséquence, le mécanisme a déterminé qu'aucune enquête n'était nécessaire à ce stade, mais a recommandé certaines mesures pour protéger les droits de chacun à l'avenir, tant ceux de la victime potentielle que de la personne présumée concernée», peut-on lire.

Attouchements et abus sexuels

Dimanche 27 octobre, le Guardian  a néanmoins publié de nouvelles révélations. Selon le quotidien britannique, qui s’appuie sur le témoignage de 11 responsables actuels et passés de la CPI, ainsi que des sources diplomatiques, Karim Khan aurait tenté de museler la victime, en lui enjoignant de nier les accusations. Ce que, là encore, le procureur réfute, par le biais de ses avocats : «Notre client nie l’intégralité des allégations et nous très préoccupés par le fait que la révélation d’une affaire interne confidentielle vise à compromettre son travail de haut niveau en cours, à un moment délicat»

La victime présumée a refusé de commenter l’affaire auprès du Guardian. Mais ses proches indiquent qu’elle a rejeté les pressions de Karim Khan. Selon un document consulté par le quotidien britannique, elle aurait été victime d’attouchements non désirés et d’abus sexuels sur une longue période, comprenant un incident au cours duquel le procureur aurait «enfoncé sa langue» dans son oreille. La victime présumée se trouverait depuis en «grave détresse émotionnelle». En réponse à ces nouvelles allégations, Karim Khan a indiqué sur X qu’il demandait au chef du mécanisme de contrôle indépendant de la CPI d’ouvrir une enquête pour «désinformation». Il assure qu’il «coopérera pleinement à cette enquête»