Insoluble. C’est ainsi que peut se résumer l’équation sur laquelle doit plancher Sébastien Lecornu depuis lundi soir. Chargé par l’Élysée de « mener d’ultimes discussions avec les forces politiques pour la stabilité du pays » en quarante-huit heures, le premier ministre démissionnaire fait pour le moment face à un mur du côté de la droite avec « Les Républicains ».
« C’est comme dans un couple, la confiance est rompue », affirme la porte-parole du parti Agnès Evren. Son président, Bruno Retailleau, a refusé de participer à la réunion des cadres du « socle commun », qui semble enterré, et n’a daigné se rendre à Matignon que pour un face-à-face. Il joue les hommes trahis, parce qu’il n’aurait pas été mis au courant de la nomination de Bruno Le Maire aux Armées.
Jordan Bardella ouvert à un « accord de gouvernement » avec LR
Mardi 7 octobre, le Vendéen n’a toutefois pas fermé la porte à un retour au gouvernement. « À une condition, répond-il à CNews et Europe 1. C’est que ce soit un gouvernement de cohabitation. Ce qui est exclu, c’est que LR se dissolve dans une majorité macroniste. » Le ministre de l’Intérieur démissionnaire exige-t-il que son parti gouverne seul ?
Fait-il monter les enchères ? « Nous ne revendiquons pas Matignon, nous n’avons pas gagné les élections législatives », balaye François-Xavier Bellamy. Le vice-président de la formation, pour qui « Emmanuel Macron doit renoncer à gouverner le pays », n’envisage qu’une possibilité, très hypothétique : « Un premier ministre indépendant, de la société civile. »
Le camp macroniste ne sait qu’en penser. « Nous n’arrivons pas à comprendre la position des LR. Que veulent-ils ? s’interroge un élu Modem. Quand ils parlent de cohabitation, c’est qu’ils nous excluent. S’il y a un nouveau gouvernement, je les imagine mal participer. »
Les Républicains flirtent ouvertement avec l’extrême droite
Alors à quoi joue le parti de Bruno Retailleau ? « Pour comprendre LR, il faut regarder ses électeurs : ce qu’il en reste, c’est la partie la moins libérale et européiste, et la plus nationaliste, analyse Gilles Richard, historien des droites. La pente vers le RN est déjà amorcée, on l’a vu avec les reports de voix aux dernières législatives. LR doit marquer sa différence avec la Macronie vis-à-vis de sa base. »
Une lente bascule vers l’extrême droite, visible depuis de longs mois dans les discours et propositions du parti de droite, qui s’accélère. Bruno Retailleau a franchi un pas dans ce sens mardi matin. Interrogé sur la législative partielle qui, dans le Tarn-et-Garonne, voit un candidat PS affronter au second tour un concurrent de la coalition UDR-RN, il tranche : « Pour les LR, c’est pas une voix pour la gauche. » Fini le front républicain pour ce parti qui usurpe son nom.
Quelques heures plus tôt, c’est Jordan Bardella qui leur a tendu la main, en affirmant qu’en cas de majorité relative après de nouvelles législatives anticipées le RN serait « parfaitement disposé » à proposer à LR « un accord de gouvernement ». « C’est cela le vrai enseignement politique de la période, s’inquiète le député PCF Stéphane Peu. L’accélération d’une recomposition politique où la droite républicaine envisage sérieusement et concrètement son union future avec l’extrême droite. »
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