Collision en mer du Nord : ce que l’on sait sur l’enquête cinq jours après le drame
L’enquête se poursuit après l’accident du Stena Immaculate et du Solong survenu ce lundi aux alentours de 10h en mer du Nord, au large des côtes du Yorkshire en Angleterre. Le choc a engendré de gigantesques incendies à bord des deux bateaux. Ils étaient en grande partie éteints ce jeudi soir même si de «petits foyers» étaient toujours signalés sur le pont du cargo, selon les garde-côtes. Leur chef, Paddy O’Callaghan, indiquait à l’AFP qu’en fin de journée, des experts «sont montés à bord pour procéder à une première évaluation des dommages afin de garantir un accès en toute sécurité aux deux navires».
L’un des membres du Solong est toujours porté disparu et présumé mort. Le capitaine, un ressortissant russe de 59 ans, a été arrêté ce mardi pour «suspicion d’homicide involontaire par négligence grave». Ce vendredi, après une première prolongation de 36 heures, les forces de l’ordre britannique ont annoncé que sa garde à vue avait de nouveau été prolongée pour 24 heures. Ce temps supplémentaire est «impératif (...) en raison de la complexité de l’incident qui concerne des navires en mer, du nombre de témoins impliqués et de l’établissement de tous les périmètres pour rassembler des informations et des preuves», a expliqué la police du Humberside dans un communiqué.
Selon le Telegraph, le Solong a échoué à des contrôles de sécurité de routine en Irlande en juillet dernier. Des documents du Port state control (PSC), régime d’inspection des navires, montrent que plusieurs défaillances ont été relevées. La boussole de direction d’urgence était défectueuse et d’autres problèmes avaient été signalés, notamment au niveau des portes coupe-feu et des alarmes.
Un désastre évité de peu
Le pétrolier, baptisé Stena Immaculate, exploité par l’entreprise américaine Crowley, transportait environ 220.000 barils de kérosène quand il a été percuté par le Solong, un cargo battant pavillon portugais. Affrété par l’armée américaine pour livrer du kérosène à l’aviation militaire déployée en Angleterre, le pétrolier était en mouillage dans un brouillard habituel pour la région et dans une mer plutôt tranquille. Le calme ambiant a alors été rompu lorsqu’il a été accroché par le porte-conteneurs qui faisait route vers le sud des Pays-Bas. «Un navire massif est arrivé de nulle part» a raconté un marin américain, ne laissant que quelques secondes à l’équipage pour réagir.
Un des réservoirs du Stena Immaculate a été brisé dans la collision, faisant craindre une catastrophe pour la faune et la flore maritime de la région. L’entreprise Crowley a déclaré que les impacts sur la mer avaient été «limités en raison de l’exposition au feu et de l’évaporation» du carburant. Selon Greenpeace, un «désastre environnemental semble avoir été évité de peu», même si le docteur Paul Johnson des laboratoires de l’Université d’Exeter indique à la BBC que le nettoyage devra commencer «le plus rapidement possible».
Concernant les équipages et hormis le disparu, les 36 membres des deux navires ont été ramenés à terre et seule une personne a été transportée à l’hôpital. D’après l’ambassade russe au Royaume-Uni, citée par l’agence de presse TASS, cinq Russes étaient à bord du Solong, dont le capitaine, et «tous les membres d’équipage (russes) sont en vie». «Aucun d’entre eux n’a été blessé», a précisé l’ambassade russe. L’équipage du Stenna Immaculate était de son côté tenu par des Américains.
Pourquoi le Solong n’a pas été capable d’agir pour éviter la collision ?
Ce mardi, un porte-parole du premier ministre Keir Starmer a écarté la piste criminelle, estimant qu’il n’y avait, à ce stade, «aucune raison de penser» qu’il s’agissait d’un acte de cet acabit. Les circonstances de cette rare collision restent tout de même inexpliquées et le secrétaire d’État britannique aux transports, Mike Kane a reconnu que quelque chose s’était «terriblement mal passé».
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Abdul Khalique, chef du Centre Maritime à l’université John Morre, à Liverpool considère que c’est un type d’accident «très rare» et se demande «pourquoi le Solong n’a pas été capable d’agir pour éviter la collision». «Le navire suivait une trajectoire rectiligne. Il aurait pu changer de cap pour éviter tous les navires présents au mouillage à ce moment-là, mais il ne l’a pas fait. De nombreuses occasions semblent avoir été manquées» a-t-il ajouté. L’enquête suit donc toujours son cours, l’inspecteur en chef Craig Nicholson assurant que «la police mène une enquête approfondie sur les éventuelles infractions pénales liées à la collision entre les deux navires».