« Stand up for Science » : les scientifiques dans la rue le 7 mars face à l’offensive obscurantiste de Donald Trump

Depuis son investiture fin janvier, Donald Trump conduit des attaques massives contre les sciences, coupant à la tronçonneuse dans les budgets et dans les effectifs. Il a pris un ensemble de mesures contre la recherche scientifique et son financement, provoquant l’inquiétude et l’indignation de nombreux scientifiques. Le président américain multiplie les offensives contre tout ce qui a trait au climat, à la protection de l’environnement et à la santé publique.

Pour la seconde fois, il a sorti son pays de l’accord de Paris. Il a signé un décret pour interdire les programmes « diversité, équité et inclusion ». Il a supprimé un programme de la NASA destiné à la surveillance de la Terre. Il a fait retirer des sites fédéraux des milliers de pages internet mentionnant des sujets qu’il a interdits.

Donald Trump a dit vouloir réduire les effectifs de l’Agence américaine de protection de l’environnement et les recherches liées aux énergies renouvelables, à l’économie verte, à l’environnement et à la justice sociale. De nombreux financements ont été sabrés, notamment les fonds de l’agence USAID qui représente 42 % de l’aide humanitaire dans le monde.

« Une attaque contre la science est une attaque contre la science partout dans le monde »

Le 4 mars, souligne l’astrophysicien Olivier Berné, organisateur de la marche pour la science en 2017, Donald Trump a annoncé que « tout financement fédéral sera coupé pour les universités tolérant des manifestations illégales. Les agitateurs seront emprisonnés ou expulsés. Les étudiants américains seront exclus définitivement ou arrêtés ».

« Perte d’indépendance, perte de financements, censure… Le monde scientifique américain n’a jamais, dans l’histoire américaine, été autant attaqué par le pouvoir » signale Cédric Villani, mathématicien médaillé Fields 2010, qui a fait une partie de sa carrière aux États-Unis (Atlanta, Berkeley, Princeton). Face à cette offensive obscurantiste et liberticide d’ampleur et à ces multiples attaques contre la recherche scientifique et les universités, la sidération et l’indignation laissent désormais place à la résistance.

Dès le 25 février, la prestigieuse revue Nature a appelé la communauté scientifique mondiale à réagir en rappelant qu’« une attaque contre la science où qu’elle se produise est une attaque contre la science partout dans le monde ».

Aux États-Unis, vient de naître le mouvement « Stand Up for Science » (Debout pour la science). Et une journée mondiale de « soutien » aux sciences et à la recherche est organisée ce vendredi 7 mars dans le monde entier. En France, une mobilisation Stand-up for science France aura lieu dans chaque ville universitaire. Elle est initiée par l’astrophysicien Olivier Berné, le biologiste Patrick Lemaire et l’historienne Emmanuelle Perez-Tisserant et soutenue par une cinquantaine de scientifiques français de renom.

Olivier Berné rappelle que « les sciences représentent un horizon commun de vérité qui permet de distinguer les faits des opinions. Mais pour fonctionner, les sciences doivent disposer de la liberté académique qui les protège des influences économiques, politiques ou religieuses. Or les sciences sont de plus en plus attaquées par ces milieux, et aux États-Unis, ces attaques prennent des proportions inouïes ».

Se mobiliser pour ne pas sombrer dans l’obscurantisme

En France aussi, les institutions du savoir sont attaquées. Depuis une vingtaine d’années, on assiste à une suppression progressive des postes dans ces institutions, qui élimine les jeunes souvent très brillants et accroît la compétition et les inégalités entre les personnes, les territoires ou les disciplines scientifiques. « C’est d’abord en solidarité avec mes collègues que j’ai souhaité que les personnels de la recherche et des universités s’engagent en France, indique Olivier Berné. Il faut rappeler que la liberté académique – comme la liberté de la presse d’ailleurs – n’est jamais acquise, elle est toujours à défendre ».

En France, dès le 18 février, l’Académie des sciences a, dans un communiqué « exprimé sa solidarité avec le monde scientifique des États-Unis en cette période chaotique », précisant que « la censure exercée aujourd’hui va réduire la liberté de recherche dans les secteurs les plus porteurs… L’impact sur les générations futures, sur la biodiversité et la santé de la planète va se révéler catastrophique. Les dégâts causés en si peu de temps seront beaucoup plus longs à réparer. »

Ces derniers jours les appels se sont multipliés pour rejoindre le mouvement « Stand up for Science », et participer aux rassemblements du 7 mars. « Notre initiative s’adresse à toutes les personnes qui considèrent que défendre les sciences, c’est important dans une démocratie, précise Olivier Berné dans un entretien pour La Recherche. Défendre les sciences est un travail citoyen, car elles font partie du bien commun. En France, la situation n’est pas aussi grave qu’aux États-Unis. Néanmoins, il y a un glissement qui va dans cette direction. Si on ne veut pas sombrer dans l’obscurantisme, que faut-il faire d’autre que de mieux financer les institutions de la transmission du savoir ? »

Dans ce contexte, l’astrophysicien appelle « tous les acteurs du savoir, scientifiques, étudiants, enseignants, médiateurs et médiatrices et toutes les personnes qui se sentent concernées à venir défendre les sciences ce vendredi 7 mars près de chez eux ». À Paris, le rassemblement et la marche débuteront à 13 h 30 de la place Jussieu.

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