Prodigieuses, Le Choix, Diamant Brut... Les films à voir cette semaine
Prodigieuses - À voir
Biopic et drame de Frédéric et Valentin Potier - 1 h 41
Elles sont jumelles et poussées par leur père à devenir les meilleures pianistes du monde. Claire et Jeanne Vallois pratiquent le piano comme un sport de combat. À Karlsruhe, les petites pianistes surdouées devenues jeunes femmes intègrent une prestigieuse université de musique. Un professeur, Klaus Lenhardt y sévit en tyran musical. L’intraitable enseignant auditionne Claire et rembarre Jeanne. Obsédé par la réussite, le père intensifie la pression sur ses filles pour vivre un triomphe par procuration. L’esprit de concurrence enflamme bientôt les jumelles qui s’éloignent l’une de l’autre, poussées par des aspirations divergentes. Mais le destin va se mêler de renverser cet échiquier de pouvoir et d’ambition bien ordonné. Alors que Claire enchaîne les sessions d’entraînement harassantes, elle ressent des douleurs au poignet. Celle qui devait être la soliste star du concert de fin d’année doit se rendre à l’évidence devant la sentence d’un médecin : elle souffre d’une déminéralisation osseuse grave qui use prématurément ses articulations. Le film bascule en quelques instants, en un mélodrame virtuose et résilient. Inspiré par l’histoire vraie des sœurs Audrey et Diane Pleynet, Prodigieuses touche juste en célébrant les vertus salvatrices de la musique comme un hymne à la créativité et à la sororité. À voir presto. O. D.
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Le Choix - À voir
Drame de Gilles Bourdos - 1 h 16
Un coup de fil, et sa vie a basculé. En une seconde, ce chef de chantier abandonne son poste. Il ôte son casque et prend le volant direction Paris. Ça n’est pourtant pas le moment. Le lendemain matin, à 5 h 25, aura lieu la plus grande coulée de béton de la décennie, des tonnes et des tonnes. Une centaine de camions sont attendus. Il ne s’attendait pas à ça. Le téléphone n’arrête pas de sonner. Ses fils voulaient voir le match de football avec lui. Sa femme ne comprend pas. Son adjoint panique. Il faut vérifier les pompes, s’assurer que le béton livré soit bien du C6. Son supérieur tempête. En Allemagne, la direction s’affole. Une menace de licenciement plane. Le conducteur est déchiré, entre sa famille, son métier, son avenir. Un choix s’impose. Sa destination approche. Il est seul, perdu. Sa vie était si plate. Il va y avoir du mouvement. Un cas de conscience lui tombe dessus. On lui raccroche souvent au nez. Il rappelle, discute avec un gendarme, une sage-femme, un employé de mairie. La caméra ne sort pas de l’habitacle.
Ce film de Gilles Bourdos réussit l’exploit de filmer Vincent Lindon pendant une heure et quart au volant de sa voiture sans jamais nous ennuyer. On l’écouterait même s’il se taisait. Là, il est filmé de face et n’arrête pas de parler. Il s’agit de magie pure. É. N.
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Diamant brut - À voir
Drame d’Agathe Riedinger - 1 h 43
Liane Pougy, cagole de Fréjus qui n’a pas froid aux yeux, se rêve en héroïne de téléréalité. Cette adolescente de 19 ans ambitionne d’échapper à sa petite vie minable en devenant une star de la télé. Tout son univers tient sur l’écran pailleté de son smartphone qu’elle ne lâche jamais. Short en jean à franges ras les cuisses, tee-shirt rose moulant, fesses et seins refaits, lèvres gonflées sous son maquillage à la truelle, cette ado au caractère bien trempé ne s’en laisse pas conter. Elle se façonne un physique de combat selon les critères de sa génération et passe son temps à hypersexualiser son corps. L’émission que rêve d’intégrer Liane Pougy s’appelle « Miracle Island ». Elle a envoyé une vidéo. Un jour, le téléphone sonne. Liane est prête à tout. Elle passe le casting en petite culotte devant une recruteuse qui la caresse dans le sens du poil et la pousse à s’exhiber sur Instagram pour multiplier le nombre de ses followers. Liane attend qu’on la rappelle. L’attente se mue en torture. Ses rêves de gloire gonflés au Botox s’effritent.
Agathe Riedinger frappe fort. Quant à la jeune Malou Khebizi, elle est attachante. Elle incarne avec réalisme et conviction cette jouvencelle virtuelle 2.0 assoiffée de reconnaissance qui n’aspire à être qu’« une heure, une heure seulement, belle, belle, belle et conne à la fois ». O. D.
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La Plus Précieuse des marchandises - À voir
Animation de Michel Hazanavicius - 1 h 21
Une pauvre bûcheronne et un pauvre bûcheron vivent sans enfant dans les bois, tenaillés par la faim et le froid. Autour d’eux, c’est « la guerre mondiale ». Les trains traversent la forêt enneigée. Des trains de marchandise transportant des hommes, des femmes et des enfants. Un père jette par une lucarne un bébé, voulant sauver l’un de ses jumeaux. La bûcheronne recueille cette « sans-cœur » contre l’avis du bûcheron, barbu bourru bientôt attendri par la fillette et juste sans le savoir. Un voisin, ex-soldat russe à la gueule cassée, lui donne du lait contre des fagots. Les autres bûcherons sont plus méfiants à l’égard de cet enfant apparu soudainement, puis franchement hostiles. Hazanavicius suggère plus qu’il ne montre frontalement les camps d’extermination, mais les signes ne trompent pas. L’étoile jaune, la fumée des cheminées des fours crématoires, les corps décharnés.
La Plus Précieuse des marchandises commence bien comme un conte cruel et joli, grave et poétique. Mais le conte ne résiste pas au réel. Le récit bascule et l’esthétique en même temps. Le train, Hazanavicius en fait un leitmotiv lugubre. Qu’il soit dessiné et animé ne change rien à son transport funeste. É. S.
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