Suppressions de postes chez ArcelorMittal : comment le dossier du géant de la sidérurgie devient éminemment politique pour le gouvernement
En meeting à Narbonne, jeudi 1er mai, Marine Le Pen a agité le spectre d'une "saignée sociale" et accusé le gouvernement de mentir en tentant de faire croire à la réindustrialisation du pays. La gauche, elle, accuse le gouvernement de s'être fait berner par le géant de la sidérurgie en accordant sans contrepartie des aides publiques et demande une nationalisation.
Le dossier ArcelorMittal - 634 suppressions de postes annoncées en France par le géant de la sidérurgie - devient politique. Tout le défi pour le gouvernement, c'est de contrer l'accusation d'impuissance.
Nationaliser Arcelor, "mauvaise solution", répond le ministre de l'Industrie Marc Ferracci. "Démagogique", évacue Bercy en coulisse : "À quoi bon placer une usine dans le formol qui resterait incapable d'écouler sa production. Ce serait transformer le parc industriel en parc d'attraction", juge une source ministérielle.
"Tout cela ne se fera pas d'un claquement de doigts"
Pour l'exécutif, c'est au niveau européen que tout se joue. Protéger l'acier français, c'est d'abord protéger le marché de l'UE. Plus de quotas, plus de taxes sur les importations... "Les solutions, je suis en train de les construire", plaide le ministre. Sa priorité dans les prochains jours : voir le commissaire en charge, Stephane Séjourné, qui comme lui est très proche d'Emmanuel Macron.
La gauche faisait pression à Dunkerque. Lui n'ira pas dans l'immédiat. Il assure pourtant être conscient de l'angoisse des salariés. Marc Ferracci attend d'avoir des annonces à faire. Le problème c'est qu'il le reconnaît lui-même : "Tout cela ne se fait pas d'un claquement doigts".
À l'échelle européenne, le géant mondial de la sidérurgie met notamment la pression sur la Commission européenne, à qui il demande une "application rapide" de son plan de soutien à la filière acier. Une impatience perçue avec un certain agacement à Bruxelles.
Au moment de la présentation du plan, personne n'a rien trouvé à y redire. Ni à son contenu, ni à son calendrier, s'agace la Commission européenne. Le commissaire à l'Industrie Stéphane Séjourné estime même avoir repris, dans les mesures proposées, l'ensemble des demandes d'ArcelorMittal.
Une clause de sauvegarde jusqu'à mi-2026
L'une d'elles porte sur la protection du marché européen, face à l'afflux d'acier à bas coût en provenance notamment de Chine. Une clause de sauvegarde a été introduite sans tarder le 1er avril. Elle est censée se prolonger jusqu'à mi-2026, ce qui laisse largement le temps d'inventer un mécanisme pour la remplacer d'ici là.
D'autres axes du plan de soutien prennent, en revanche, plus de temps, concède la commission. Mais comment peut-il en être autrement ? L'énergie à bas coût, dont ArcelorMittal semble faire un préalable pour électrifier ses hauts fourneaux. Les réacteurs, notamment nucléaires, ne se construisent pas en un claquement de doigts. Quant à la relance des commandes industrielles de secteurs très gourmands en acier, comme l'automobile : encore faudrait-il que leurs ventes repartent à la hausse… Ce qui n'est pas la tendance actuelle du marché européen.