Après la polémique pédopornographique concernant Shein, liée à la récente découverte de poupées sexuelles à l’effigie de petites filles et d’armes sur le site de la marque, une couturière bordelaise a décidé de réagir. Propriétaire de la boutique Rue des rêves, qui dispense principalement des cours de couture, cette commerçante de la Bastide refuse désormais de retoucher les vêtements issus de la fast-fashion (Temu, Shein, Aliexpress, Primark). «Avant je ne connaissais pas ces produits mal coupés et mal faits, réalisés avec des matières de mauvaise qualité. En général, les jeunes filles qui m’apportent leurs robes sont désespérées. Il faut tout reprendre et la retouche coûte plus cher que le vêtement de base», explique Aurélie Delisle.
La quadragénaire, qui a sauvé de nombreuses tenues de mariages, de bals et de galas cet été est ferme sur son intention d’arrêter. «Quand j’ai vu la foule devant le BHV Marais (lors de son inauguration mercredi dernier, NDLR) et les commentaires des clients, j’ai été convaincue que cela ne correspondait pas aux valeurs que je prône», assume-t-elle.
Passer la publicitéAccusations plagiats
Cette dernière juge immoral de promouvoir «les vêtements jetables» alors que «de nombreuses créatrices made in France, qui respectent les réglementations et paient leurs taxes, s’entendent dire que leurs vêtements sont trop chers lorsqu’elles veulent les vendre sur les marchés». Une vision qui a suscité de nombreux commentaires agressifs sur les réseaux sociaux, émis par des internautes faisant écho aux propos de l’ancien ministre macroniste Christophe Castaner, qui déclarait en janvier que Shein «démocratise la mode pour tous» .
Un argument loin de convaincre Aurélie Delisle. La couturière reproche aussi à Shein de s’inspirer, voire de voler, les designs des créatrices françaises pour assurer sa production. En août dernier, l’illustratrice bordelaise Nolwenn Denis nous confiait ainsi s’être fait piller ses dessins, plagiés par Shein, Amazon ou encore Aliexpress.
Félicitations du maire de Bordeaux
Le maire écologiste de Bordeaux, Pierre Hurmic, a félicité Aurélie Delisle sur Instagram pour «cette décision pleine de sens». Pour les militants du boycott de ces marques, l’affaire a d’autant plus d’importance que les faibles prix proposés par Shein reposent sur la cadence imposée à ses salariés. En juillet, une étude d’ActionAid France avec l’ONG China Labor Watch, relayée par nos confrères de RMC, révélait ainsi que les vêtements vendus par Shein sont payés 6 à 27 centimes aux ouvriers qui travaillent 10 à 12 heures par jour pour les produire.
Il n’empêche, ces petits prix séduisent en masse les consommateurs français qui prétendent «ne pas pouvoir s’habiller autrement». En octobre 2024, les marques Temu et Shein composaient 22% des colis traités par La Poste contre moins de 5%, il y a cinq ans. Et 66% des colis en provenance des plateformes asiatiques présentaient un danger direct pour le consommateur selon Amélie de Montchalin, ministre chargée des Comptes publics.