INTERVIEW. Stade du PSG : "La vente sèche du Parc des Princes n’est plus un sujet", assure Pierre Rabadan, maire-adjoint de Paris en charge du sport

Au moment où le Paris Saint-Germain multiplie les pistes de lieux où construire son futur stade, la mairie de Paris maintient sa position. Le Parc des Princes n'est plus à vendre. Interrogé par franceinfo: sport, Pierre Rabadan, adjoint au maire chargé des sports, rappelle que la décision du Conseil de Paris, prise en février 2024, rend impossible la cession du stade au club de Ligue 1. L'écrin du XVIe arrondissement appartient "au patrimoine de la Ville".

Malgré les piques envoyées par les dirigeants du PSG par médias interposés, la mairie de Paris appelle tous les acteurs du dossier à "se remettre autour de la table" pour reprendre les négociations. "Il y a une manière de travailler différemment", insiste Pierre Rabadan, dont le seul contact avec le nouveau directeur général du PSG, Victoriano Melero, est "un mail sarcastique de ce dernier" le renvoyant à une étude du CDES sur l'impact économique et social du club sur son territoire.

Franceinfo: sport : En janvier 2023, Emmanuel Grégoire, alors premier adjoint à la mairie, disait être sûr à 100% qu'une solution serait trouvée pour que le PSG continue de jouer au Parc des Princes. La mairie est-elle toujours aussi confiante ?

Pierre Rabadan : Il avait dit ça parce que nous avons des solutions en dehors de la vente qui sont propices au développement du club et de ses ambitions, sans qu’il en devienne propriétaire. Le problème est qu’on n’a même pas pu leur exposer concrètement les tenants et aboutissants de cette proposition. Depuis qu’ils nous ont dit "On agrandira le stade que si nous sommes propriétaires" et qu’on leur a répondu qu’on n’était pas spécialement vendeurs, ils nous ont fait une proposition de 38 millions d’euros pour le Parc des Princes.

Dans ce cas-là, ce n’est même pas la peine de discuter. L’offre était ridicule et leur réponse était : “Si c’est comme ça, on arrête de discuter. Vous nous mettez dehors". Quand vous voulez convaincre de vendre quelque chose à quelqu'un, s’il n’est pas d’accord, c’est rare qu’en l’insultant il change d’avis. 

De son côté, le PSG avance que c'est la mairie qui a fait volte-face, en prenant la décision de ne plus vendre en plein milieu des négociations...

On avait des discussions régulières qui se passaient hors des radars médiatiques, tous les trimestres, jusqu'à ce que la faisabilité d’un possible agrandissement soit avérée. Ils nous ont fait comprendre qu’ils ne feraient pas de travaux s’ils n’étaient pas propriétaires à ce moment-là. Ça a changé la donne et ils sont arrivés avec cette proposition à 38 millions d’euros, quand notre estimation était entre 200 et 300 millions. Tout ça s’est produit au moment où Arctos [un fonds d'investissement américain] est arrivé au capital du club.

Autour du départ de Jean-Claude Blanc [ancien directeur général du club], je me suis posé la question de ce que voulait faire le PSG. On disait qu’ils allaient investir à Manchester United et le club n’est jamais venu nous présenter leur perspective de développement. La Coupe du monde 2022 est arrivée, avec une mauvaise compréhension de leur part de la position de la mairie, qui n’était pas dans une position de boycott. David Belliard [adjoint à la mairie de Paris] l’avait manipulée à des fins politiques [en regrettant que le PSG appartienne au Qatar]. J’avais re-spécifié les choses.

Depuis, il s’est passé un certain nombre de choses. Il y a eu un vœu puis une question posée au Conseil de Paris : qui est favorable à la vente du Parc des Princes ? Personne n’a répondu qu’il était favorable [au voeu relatif à la "non-cessibilité du Parc des Princes", il y a eu 64 votes pour, 86 abstentions]. Il y a bien eu des abstentions et on sait ce qu’elles veulent dire, mais le Conseil de Paris s’est positionné deux fois clairement, sans que personne ne vote en faveur d’une vente du Parc.

Vous dites que vous n’êtes "pas spécialement vendeur". En 2023, Emmanuel Grégoire disait qu’il ne s’agissait pas de "l’option prioritaire". La vente est-elle tout bonnement impossible ?

On est tenus par la décision du Conseil de Paris. Le positionnement est très clair. Il y a une solution pour que le PSG fasse des investissements, reste longtemps, améliore ses conditions d’accueil des spectateurs et son modèle économique en développant des loges. Le sujet de fond du Parc, ce n’est pas juste ajouter 10 000 sièges de plus. Ce qu’ils voulaient c’était doubler à peu près la surface d’hospitalité, qui leur génère beaucoup de revenus.

On maintient plus que jamais notre proposition de bail emphytéotique sur une échéance qui peut aller quasiment jusqu’à un siècle (99 ans maximum). C’est le modèle de ce qu’on a fait à Roland-Garros. 

De toute façon, ils ont une convention d’occupation et d’utilisation exclusive du Parc des Princes jusqu’en 2044. Quand je lis des déclarations qui parlent d’une nécessité d’avoir un nouveau stade sous quatre à cinq ans, c’est impossible. Même s’il y avait une faisabilité technique immédiate et qu’ils étaient acquéreurs du terrain, il y a une tonne de barrières à passer qui font qu’ils mettraient sans doute 10 ans à avoir un nouveau stade.

Pensez-vous que le club est engagé dans une forme de poker menteur ?

Nous, nous ne sommes pas dans une position figée. Malgré des mots fort désagréables de leur part par presse interposée depuis la Coupe du monde 2022, on n'a eu de cesse de dire qu’il faut qu’on se parle et qu’on se remette autour d’une table pour regarder toutes les options, en dehors de la vente. En tant qu’élu au Conseil de Paris, si je voulais vendre à titre personnel, je ne pourrais pas le faire sans l’accord du Conseil. Il s’est exprimé clairement pour clarifier toute ambiguïté et ne pas en faire un problème de personnes. La vente sèche n’est plus un sujet.

Au-delà du double discours, ils perdent du temps. Ils n’ont même pas traité l’autre option. En 2021, quand on a finalisé le projet d’agrandissement, notre idée était de commencer les travaux juste après les Jeux olympiques. Si le PSG finit par trouver une solution pour continuer au Parc, par l’achat ou non, ils auront perdu un temps précieux.

J’ai rencontré plusieurs fois les groupes de supporters. Eux disent qu’ils ne se voient pas ailleurs qu’au Parc des Princes. Personne ne veut partir à part le propriétaire, pour développer les revenus. Ce n’est pas un gros mot, je le comprends. Mais ce ne sera plus la même histoire.

Après les élections municipales en 2026, la fermeté sur le refus d’une vente sèche sera-t-elle immuable ?

Ce sera au Conseil de Paris de se prononcer. Pour que la vente revienne sur la table, il devra se prononcer dans l’autre sens. Est-ce que le nouvel exécutif voudra revenir sur la décision ? Au vu de ce qui a été voté, j’ai plutôt envie de dire non. Tous bords confondus, personne n’a été en faveur de la vente. Les choses peuvent changer, mais le Parc est un patrimoine national et parisien extrêmement précieux. 

Si le PSG finit par accepter votre proposition de bail longue durée, jusqu'à combien de places peut contenir le Parc des Princes ? Combien cela coûterait ?

Les études qu’on avait, c’était 57 000, donc 10 000 places de plus qu’actuellement, plus les hospitalités. Je n’ai pas d’estimation très précise du coût mais je dirais entre 300 et 400 millions.

Intégralement aux frais du PSG ?

C’est une discussion qu’il fallait avoir. Ils ont fait 75 millions d’euros de travaux avant l’Euro 2016 pour améliorer leur hospitalité et créer de nouvelles loges. On peut dire que le PSG a tout payé. C’est vrai. En échange, ils ont une convention d’occupation et d’utilisation exclusive du Parc des Princes qu’ils paient 1,2 million d’euros par an, c’est-à-dire quatre fois moins que l’OM avec le Vélodrome. C’est normal : si vous soutenez un investissement, la convention s’adapte pour que vous puissiez l’amortir sur la durée. 

C’est sur ce sujet qu’il y aurait sans doute quelque chose à faire évoluer, d’autant que le Parc des Princes est un sujet complexe techniquement. C’est un stade protégé, qui a une architecture unique au monde avec 52 voiles fixées les unes aux autres, situé au-dessus du périphérique. Forcément ça coûte plus cher que si vous prenez n’importe quel autre stade.

Ris-Orangis, Massy, Saint-Quentin-en-Yvelines… Trouvez-vous crédibles les pistes du PSG pour installer son nouveau stade ?

Je n’ai pas assez d’éléments. Je n’ai d’informations que par la presse. Certaines options, je le sais, ne sont pas crédibles. J’ai entendu n’importe quoi : le bois de Vincennes, l’hippodrome de Saint-Cloud… Ça ne marche dans aucun monde. Un terrain propice de 50 hectares, c’est quand même gigantesque. Cela pose des questions environnementales aussi. Peut-être que certains terrains pourraient s’adapter au projet, mais si vous n’avez plus la centralité du Parc des Princes, ce n’est plus la même histoire, celle que le PSG y a écrit. C’est pourquoi personne ne veut en partir.