Mercosur : "Si c'est signé en l'état, nous n'achèterons pas les produits venus d'Amérique latine", promet Dominique Schelcher, président de Coopérative U

Ce texte correspond à une partie de la retranscription de l'interview ci-dessus. Cliquez sur la vidéo pour la regarder en intégralité.


Jeff Wittenberg : Vous êtes l'un des acteurs principaux de la grande distribution avec les 1 800 magasins U que vous dirigez. Comment le secteur de la grande distribution, dont vous êtes l'un des acteurs principaux, réagit-il à cette crise agricole ? Êtes-vous solidaire des actions des paysans qui bloquent les routes, qui jettent du fumier devant les préfectures ? Est-ce que la fin justifie les moyens ?

Dominique Schelcher : Je comprends la colère et je compatis avec les agriculteurs qui ont eu leurs troupeaux éliminés, malheureusement. Si vous voulez, ce que je crois, c'est que l'agriculture est un trésor et qu'elle est en grand danger en France, et qu'il faut absolument soutenir le monde agricole plus que jamais, qui est attaqué de toutes parts. Bien sûr, il y a la dermatose et il faut trouver les meilleures solutions, mais pas que ça. Il y a le Mercosur dont on va parler demain. Qui est quoi ? Qui n'est rien d'autre qu'une grande concurrence déloyale pour le monde agricole. On ne peut pas demander aux agriculteurs de produire avec des exigences incroyables et importantes et avoir le risque demain de faire entrer des produits à des conditions moindres.

Est-ce que ces produits, précisément, on pense notamment à la viande venue d'Amérique latine, vous les toucherez dans vos magasins s'ils devaient être signés, ce qui est normalement prévu en fin de semaine avec l'Union européenne ?

Je vous le dis, si ça doit être signé en l'état sans grande protection et avec le risque d'avoir des produits peut-être de moins bonne qualité, en tout cas, pas de la qualité française, nous ne les achèterons pas chez Coopérative U. Nous ne les achèterons pas. C'est le moment ou jamais de protéger le monde agricole. Et la meilleure façon de le faire, et je lance un appel aux téléspectateurs, c'est d'avoir le réflexe origine France. C'est maintenant qu'il faut l'avoir. Il faut prendre le produit en main, le tourner, et s'il n'est pas français, il faut le reposer.

Mais c'est contre-intuitif parce que parfois, dans vos rayons, on trouve aussi des produits qui viennent de l'étranger. Par exemple, les pommes, à certaines saisons, elles viennent du Chili. On les trouve dans vos rayons.

Mais ce message s'adresse à nous aussi. Le combat, il est pour nous d'abord. Et on a cessé de progresser ces dernières années. Chez U, 78 % des fruits et légumes sont d'origine France.

22 % ne le sont pas, donc.

Oui, mais ce n'est pas toujours parfait parce qu'il y a des débuts de saison, il y a de l'inter-saison, il y a parfois des fruits ou des légumes pour lesquels nous n'avons pas les quantités nécessaires en France. Donc c'est un mix.

Mais le consommateur doit s'interdire de consommer ces fruits ? Je pense par exemple, nous sommes là dans la période des fêtes, on va en parler, on trouve beaucoup de fruits exotiques, par exemple les fruits de la passion, qui ne sont pas produits en France ou même en France métropolitaine ou dans les territoires de France.

Les fruits exotiques sont évidemment une des exceptions annuelles. Il ne faut pas s'interdire, au moment des fêtes, de se faire plaisir avec ces produits-là, qu'on ne trouve pas en France par ailleurs. On peut avoir des litchis de La Réunion, mais certains autres fruits ne pourront pas être français. Il faut qu'on progresse, il faut qu'on avance, il faut qu'il y ait ce réflexe de la part de tout le monde.

On parlait à l'instant de ces fêtes qui arrivent. On voit les rayons des magasins. Avez-vous observé, nous sommes le 17 décembre, sept jours, pile avant le réveillon de Noël, déjà une effervescence et, voire un décollage des achats de Noël de la part des consommateurs ?

Il y a beaucoup de monde dans les magasins U, mais il n'y a pas encore tout à fait l'effervescence de Noël. On espère qu'elle arrive maintenant. Alors, il y a des petits signes. Le foie gras et le saumon sont plutôt plus vendus que l'année dernière. Par contre, il y a un produit qui est presque un peu boudé, parce que je pense qu'on est tous allés trop loin, c'est le chocolat. Moi, il y a des clients qui m'ont encore dit samedi : je n’achète pas de chocolat, c'est trop cher. Je pense que les producteurs sont allés un peu trop loin.

Vous parliez du saumon, du foie gras, ce sont des produits chers. Y a-t-il des produits tendances pour ce Noël 2025, voire ce réveillon du 1er de l'an qui arrive aussi ?

Je prédis, une fois de plus, un Noël à la raclette. Ce n'est peut-être pas ce qu'on imaginait il y a quelque temps, mais depuis 2-3 ans, voilà, c'est un plat convivial qui réunit toute la famille, qui est facile à faire et qui a un très bon rapport qualité-prix. Donc on nous commande déjà des plateaux de raclette, plus que les autres années.

Cliquez sur la vidéo pour regarder l'entretien en intégralité.