Réforme des retraites : les syndicats écartent tous l'idée d'un effort de guerre financé par un décalage de l'âge de départ

Comment financer l'effort de guerre face au désengagement américain en Ukraine ? Pour continuer à soutenir Kiev, le gouvernement français cherche des milliards d'euros pour financer ses dépenses militaires. Or ce débat sur l'économie de guerre vient percuter les discussions sur les retraites, qui réunissent tous les jeudis syndicats et patronat. Dans la revue spécialisée Telos, le président du Conseil d'orientation des retraites (COR) remet en cause la tenue de ces débats dans le contexte d'augmentation des investissements militaires.

Face aux efforts de guerre, Gilbert Cette juge dérisoires les débats sur l'âge légal de départ à la retraite. Il appelle les syndicats et le patronat à ne pas ignorer la gravité de la situation internationale et militaire dans le cadre de leurs discussions. Or l'ordre du jour de ce fameux conclave reste inchangé : cette semaine, par exemple, des débats sur l'âge et la durée de cotisation. Pour Gilbert Cette, ces discussions paraissent hors sol face à l'effort de guerre demandé par le gouvernement.

Le patron du COR affirme que "l'entrée dans une économie de guerre rendra secondaires, sinon dérisoires, les débats actuels" sur l'âge de départ à la retraite. Il avance même l'idée selon laquelle il faut plutôt se demander comment aller au-delà des 64 ans. Un argument qui plaît au Medef : son président Patrick Martin continue de plaider pour faire reculer l'âge, au-delà de la réforme de 2023, pour adapter l'économie au défi du réarmement de la France

Les organisations syndicales opposées à cette vision

Pas question de sacrifier les droits sociaux et le financement du régime des retraites à un effort de guerre, lâchent d'une même voix les syndicats. La sortie de Gilbert Cette agace au plus haut point la CGT. "Il y a toujours une bonne raison pour laquelle il faudrait repousser l'âge de départ, dénonce le négociateur CGT au conclave, Denis Gravouil. C'est scandaleux, non seulement de remettre en cause la concertation, mais en plus de plaider pour qu'il y ait encore une nouvelle réforme des retraites, sous prétexte d'effort de guerre."

Avis partagé par la CFDT, qui accuse Gilbert Cette de sortir de sa neutralité. Sur RTL, sa secrétaire générale Marylise Léon refuse d'opposer la défense au social, et appelle plutôt à ouvrir une conférence sur les finances publiques afin de discuter ensemble des financements possibles de cet effort de guerre. D'autant que les représentants des salariés ont déjà des propositions. "On va encore une fois faire financer cet effort de guerre par une seule catégorie de la population, les actifs, dénonce Cyril Chabanier, leader de la CFTC. Et on ne parle pas d'un effort équitable et partagé. Quid de l'effort de l'Etat dans une meilleure gestion de ses finances publiques ? Quid de l'effort des entreprises ?"

La CFE-CGC, elle, considère qu'il faut renforcer notre souveraineté dans l'industrie de la défense en formant par exemple les jeunes aux métiers des industries métallurgiques ou du nucléaire. Sa représentante au conclave, Christelle Thieffinne, assure que "nous allons avoir besoin de salariés qualifiés et de chercheurs".