De nouveaux tirs israéliens meurtriers près d'un site d'aide à Gaza, l'armée ouvre une enquête

Vingt-sept personnes ont été tuées, mardi 3 juin, dans le sud de la bande de Gaza quand des soldats israéliens ont ouvert le feu près d'un centre d'aide humanitaire soutenu par les États-Unis, dans le sud du territoire palestinien. L'armée israélienne a indiqué dans la soirée avoir ouvert une enquête concernant ces tirs mortels.

Le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, a "condamné" ces tirs, évoquant des pertes de vies "inconcevables", deux jours après un drame similaire au même endroit, au cours duquel 31 personnes ont été tuées, selon les secours palestiniens. Le Haut-Commissaire de l'ONU aux droits de l'Homme, Volker Türk, a lui dénoncé des "crimes de guerre".

Israël fait face à une pression internationale croissante pour mettre fin à la guerre à Gaza. Les quelque 2,4 millions d'habitants du territoire palestinien assiégé par Israël sont menacés de famine, selon l'ONU.

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Mardi à l'aube, 27 personnes qui attendaient l'aide américaine près du rond-point dans la zone d'Al-Alam à Rafah, ville du sud de la bande de Gaza, ont été tuées, a déclaré à l'AFP le porte-parole de la Défense civile, Mahmoud Bassal, ajoutant que "les forces d'occupation israéliennes avaient ouvert le feu (...) sur des milliers de civils" venus chercher de l'aide humanitaire.

Le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) a confirmé dans la soirée le bilan des morts, sans mentionner l'armée israélienne dans son communiqué. Outre les 27 morts mardi à Rafah, la Défense civile a indiqué que 19 Palestiniens avaient été tués par l'armée israélienne à travers le territoire palestinien dévasté.

"L'armée a commencé à tirer intensément"

L'armée a indiqué dans la soirée que "des soldats avaient procédé à des tirs de semonce (...) en direction de suspects qui s'approchaient d'une manière qui mettait en danger leur sécurité", annonçant l'ouverture d'une enquête pour faire "toute la lumière" sur ce qui s'est passé.

De son coté, la Maison Blanche a indiqué "étudier l'authenticité" des informations faisant état de tirs mortels.

Dans le sud de la bande de Gaza, le mari et les enfants de Rim al-Ahkras, figurant parmi les victimes des tirs mortels à l'aube, étaient submergés par le chagrin.

"Comment puis-je te laisser partir, maman ?", a lâché son fils Zein, en enlaçant le corps recouvert d'un linceul blanc. Une fillette a saisi une main de la mère et l'a embrassée, d'autres petits enfants autour étaient en larmes au moment des adieux.

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Le rond-point où le drame est survenu se trouve à environ un kilomètre d'un centre d'aide géré par la Fondation humanitaire de Gaza (GHF), une organisation au financement opaque soutenue par les États-Unis et Israël.

Rania al-Astal, une déplacée de 30 ans, est partie tôt le matin avec son mari pour essayer de récupérer de la nourriture au centre GHF.

"Les tirs ont commencé par intermittence vers 5 h du matin. Chaque fois que les gens s'approchaient du rond-point d'Al-Alam, ils étaient la cible de tirs", a-t-elle raconté à l'AFP. "Mais ils ne s'en souciaient pas et se précipitaient tous en même temps. C'est à ce moment-là que l'armée a commencé à tirer intensément".

Mohammed al-Chaer, 44 ans, également présent sur les lieux, raconte lui qu'"un hélicoptère et des drones ont commencé à tirer sur la foule pour l'empêcher de s'approcher des chars. Il y a eu des blessés et des morts".

La neutralité de la GHF mise en doute

La GHF affirme avoir distribué des millions de repas depuis le début de ses opérations il y a un peu plus d'une semaine, après la levée très partielle d'un blocus total imposé par Israël pendant plus de deux mois, privant la population de Gaza de toute aide humanitaire.

Les États-Unis ont affirmé mardi que l'aide humanitaire apportée par cette organisation était une "réussite", reconnaissant qu'elle pouvait "s'améliorer".

"Ils ont réussi à distribuer des repas. Et en même temps, nous allons bien sûr examiner la situation et comment nous pouvons peut-être encore améliorer les choses", a déclaré Tammy Bruce, la porte-parole du département d'État.

L'ONU et de nombreuses ONG refusent de travailler avec la GHF en raison de préoccupations concernant ses procédés et sa neutralité, craignant qu'elle n'ait été créée pour servir les buts militaires d'Israël.

"Sept millions de repas ont été distribués. Je n'insisterai jamais assez sur ce point", a déclaré la porte-parole du département d'État mardi. "En attendant, il faut espérer que les choses s'améliorent", a-t-elle dit ajoutant que la situation serait différente "si le Hamas se comportait comme des êtres humains".

Avec AFP