Au Royaume-Uni, Nigel Farage promet un plan pour expulser 600.000 migrants illégaux

Mardi 26 août, à Oxford, en Angleterre, Nigel Farage, le leader du parti populiste de droite Reform UK  qui a le vent en poupe outre-Manche du fait de ses positions très fermes sur l’immigration, a prononcé un discours enflammé pour présenter son plan d’expulsion de l’ensemble des migrants irréguliers présent au Royaume-Uni en cas de victoire de sa formation aux prochaines élections générales. Dans un hangar à avions - tout un symbole - aménagé pour l’occasion, face à un parterre de journalistes et avec un immense Union Jack projeté dans son dos, le tribun, habitué aux marges de la vie politique britannique mais qui se rêve désormais en premier ministre, a notamment dénoncé le «fléau de l’immigration illégale» qui frappe aujourd’hui son pays, avant d’égrainer une liste de mesures pour le conjurer. «Il n’existe qu’une seule façon d’empêcher les personnes d’entrer illégalement au Royaume-Uni, c’est de les détenir et de les expulser», a-t-il affirmé dans une tribune publiée dans le Daily Telegraph le même jour.

Pour expulser «entre 500.000 et 600.000» migrants en situation irrégulière durant son éventuel premier mandat en tant que premier ministre, Nigel Farage s’est notamment engagé à quitter la Convention européenne des droits de l’homme (CEDH) et à ne pas appliquer trois autres traités internationaux qu’il qualifie d’«obstacles». En outre, il a promis que son parti adopterait une loi spéciale (l’«Illegal Migration Mass Deportation Act») afin de créer une obligation légale pour le ministre de l’Intérieur britannique de renvoyer les migrants clandestins, quelles que soient les convictions politiques de ce dernier. «Le non-respect de cette obligation constituerait une violation de la loi», a expliqué Nigel Farage. Un gouvernement sous ses ordres entreprendrait sous 18 mois la construction de centres de détention sur des sites militaires pouvant accueillir 24.000 personnes à la fois, sans possibilité de sortie ou d’une quelconque remise en liberté, pour permettre 288.000 expulsions par an, a-t-il ajouté.

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La proposition la plus controversée de son parti est sans doute celle d’utiliser un fond de deux milliards de livres (environ 2,3 milliards d’euros) pour convaincre des pays étrangers de reprendre leurs ressortissants indésirables, y compris certains États connus pour leurs violations répétées des droits humains, notamment l’Érythrée et l’Afghanistan, rapporte The Guardian . Mardi, après le discours de Nigel Farage, les Talibans ont déclaré être «prêts et disposés» à collaborer avec lui à l’avenir et à accepter le retour des Afghans qui seraient expulsés du Royaume-Uni, indique le Telegraph . Le gouvernement travailliste a lui-même laissé entendre dans la foulée que Keir Starmer n’exclurait pas un accord avec l’Afghanistan et l’Érythrée. «Nous n’écartons aucune option», a ainsi déclaré un porte-parole du premier ministre, cité par le quotidien britannique. Mi-juillet, l’Allemagne a repris les expulsions vers l’Afghanistan après avoir négocié un accord avec les Talibans, alors que Berlin ne reconnaît pas officiellement le régime de Kaboul.

«Le Royaume-Uni est en train d’être envahi»

Bien que le Parti travailliste au pouvoir ait rejeté l’essentiel du plan de Nigel Farage, le gouvernement actuel a lui-même considérablement durci sa politique migratoire depuis l’annonce par Keir Starmer en mai d’un «plan radical» pour «reprendre le contrôle» des frontières britanniques. Celui-ci a notamment conclu un accord sur l’échange de migrants avec la France entré en vigueur début août, avant que son gouvernement n’exprime, quelques jours plus tard, sa volonté d’expulser immédiatement les étrangers reconnus coupables d’un crime au Royaume-Uni.

Keir Starmer est en effet confronté à la pression croissante d’un groupe d’une quarantaine de députés travaillistes du «Red Wall» (le «Mur Rouge») - un ensemble de circonscriptions du centre et du nord de l’Angleterre historiquement favorable à leur parti - qui craignent de ne pas être réélus si le premier ministre ne fait pas de la réforme du système d’asile sa priorité, explique The Sun . Selon le dernier sondage de YouGov, le Parti travailliste est aujourd’hui largement devancé par Reform UK dans les intentions de vote (21% contre 28% respectivement) alors que le Parti conservateur (à 18%) est également en grande difficulté, une situation inédite. Ces dernières semaines, de nombreuses manifestations anti-migrants ont eu lieu à travers le Royaume-Uni, notamment devant les hôtels hébergeant des demandeurs d’asiles comme à Epping dans la banlieue londonienne. Cela ravive le spectre des violentes émeutes de l’été 2024.

Plus de 29.000 migrants ont traversé la Manche depuis le début de l’année selon The Guardian, soit une hausse de 50 % par rapport à la même période l’an dernier et le chiffre le plus élevé enregistré depuis les premières arrivées de petites embarcations en 2018. Par ailleurs, d’après le Home Office, 111.084 personnes ont demandé l’asile au Royaume-Uni entre juin 2024 et juin 2025, soit une hausse de 14% par rapport à l’année précédente et un autre record absolu. Parmi elles, plus de 32.000 sont aujourd’hui logées dans des hôtels financés par le contribuable britannique. Aucune estimation globale du nombre de migrants actuellement en situation irrégulière au Royaume-Uni n’est fournie par les autorités.