Roland-Garros 2025 : imperméable à la pression, Loïs Boisson transforme l'attente du public tricolore en force
Quatorze ans que le public tricolore attendait de revoir une Française dans le dernier carré porte d'Auteuil. Loïs Boisson a rendez-vous, jeudi 4 juin, avec l'Américaine Coco Gauff, numéro 2 mondiale pour une place en finale. Déjà devenue la joueuse invitée ayant réussi le plus beau parcours de l'histoire à Roland-Garros, Loïs Boisson représente désormais le plus bel espoir de revoir une Tricolore soulever la coupe Suzanne-Lenglen, vingt-cinq ans après Mary Pierce.
Ces statistiques pourraient faire tourner la tête de la Dijonnaise de 22 ans. Et la pression peser lourd sur ses épaules athlétiques. Il n'en est pour l'instant rien. La joueuse, qui dispute son premier tableau principal sur l'ocre parisienne, garde invariablement un visage impassible. "Chaque joueur ressent de la pression, peut-être davantage les Français à Roland-Garros. J'ai donc de la pression bien sûr, mais j'arrive à la gérer. Je fais de mon mieux", a réagi la Française, questionnée sur sa capacité à endurer les attentes quand tant de Français ont par le passé peiné à jouer leur meilleur tennis devant leur public. Si certains Tricolores ont pu se tétaniser devant la ferveur de 15 000 spectateurs du Central, Loïs Boisson n'y voit, elle, que "du plus".
"Le public ne me met pas de pression supplémentaire. J'adore jouer devant la foule, entendre des gens crier mon nom. Avoir le public pour soi, c'est vraiment un plus, même s'ils font du bruit entre les points."
Loïs Boisson, qualifiée pour les demi-finalesen conférence de presse
"Mais je peux comprendre que ce soit compliqué pour les joueurs étrangers", a confié la joueuse. Du bout des lèvres, la 361e mondiale a tout de même avoué avoir ressenti "des frissons" lorsque des spectateurs ont entonné La Marseillaise pendant l'échauffement. "Je ne m'y attendais pas."
En conférence de presse, sa future adversaire a glissé "espérer que tout le monde sera respectueux" lors de la demi-finale. "Si ce n'est pas le cas, ce n'est pas grave. Je pense que cela rend le sport enthousiasmant, et je ne peux pas m'agacer du fait que quelqu'un soutienne son héroïne locale, parce que je ferais la même chose", a assuré Coco Gauff, vainqueur de Madison Keys (6-7, 6-4, 6-1) en quarts de finale. "J'ai un peu d'expérience devant un public qui ne vous soutient pas, et j'attends ça avec impatience", a poursuivi l'Américaine pointant ses rencontres face à des Italiennes au tournoi de Rome.
De colérique à placide
Pour devenir cette joueuse de tennis au calme olympien, capable de claquer un ace ou poser une amortie pour défendre une balle de set contre elle, Loïs Boisson a dû engager un travail psychologique. Plus jeune, elle était connue pour ses colères sur le terrain. "Il fallait la calmer, même la mettre hors du court de temps en temps", car elle est "très perfectionniste, donc frustrée" quand elle perdait, s'est souvenu son ancien entraîneur Patrick Larose, au micro d'Ici Bourgogne.
"J'étais très émotive, beaucoup trop et ça me desservait. J'ai compris que je n'irai pas loin si je continuais comme ça. J'ai énormément travaillé sur moi pendant ma blessure, j'ai eu le temps et cela m'aide aujourd'hui", a détaillé Loïs Boisson en conférence de presse, citant le travail engagé avec une psychologue. "Il s'agissait de discussions pour prendre conscience des choses qu'on peut reproduire sur un court de tennis."
Dans sa bulle
Depuis le début du tournoi, même ses victoires ne lui décrochent que de rapides réactions. L'explosion de joie reste mesurée. On l'a tout de même vue s'allonger sur la terre battue du Central à l'issue de sa qualification en demi-finale. "Je ne vais quand même pas m'allonger par terre après tous les matchs, s'est-elle justifiée. J'étais assez tendue durant le match, j'ai tout retenu et tout s'est relâché à ce moment-là." Dès l'interview post-match sur le terrain, celle qui deviendra numéro 1 française à l'issue du tournoi avait retrouvé un visage fermé, les yeux souvent tournés vers ses chaussures.
"Mon rêve est de remporter Roland-Garros, pas seulement d'être en demi-finales", a rappelé Loïs Boisson, alors interrogée sur ses rêves d'enfant. Ultra-concentrée sur cette mission, la Française, qui pointait encore au-delà de la 500e place début mai, refuse de se projeter au-delà du prochain match. "Je ne pense pas vraiment à ce qu'il va se passer après. Je reste dans ma bulle, concentrée sur le tournoi. Je ne regarde pas les réseaux sociaux."
"Si elle continue de jouer aussi librement, si elle n'a pas peur, peut-être qu'elle peut gagner. Cela ne va pas être facile. C'est difficile à dire mais ça sera intéressant à suivre", a commenté Mirra Andreeva, après sa défaite face à la Française. La victoire finale passera d'abord par un nouvel exploit face à la numéro 2 mondiale.