TEMOIGNAGES. "Jamais nous ne renoncerons à notre terre" : des milliers de Palestiniens regagnent le nord de Gaza, entre "joie" et "souffrance"

C'est une véritable marée humaine. Depuis 24h, les déplacés de Gaza peuvent rentrer chez eux dans le Nord. Toute la journée du lundi 27 janvier, une file ininterrompue de charrettes et de piétons surchargés de bagages avec des matelas, des sacs sur le dos, ont emprunté la route littorale. Ils sont des centaines de milliers à avoir retrouvé ce qu'il reste de leurs maisons, ainsi que les voisins et les amis qui ont survécu. 

Un moment empli de joie, mais également de beaucoup de tristesse à la découverte d'un territoire ravagé par 15 mois de guerre. franceinfo a pu recueillir des témoignages grâce au journaliste Rami Al Maghari, à Gaza.

Retour sur "la terre de ses ancêtres"

Il y a des sourires et des embrassades. Le fracas des bombardements s'est arrêté il y a dix jours et la guerre semble déjà loin. La musique et des youyous ont même résonné lundi dans ce qu'il reste des rues de la ville de Gaza. Pour Khaled, c'est un jour qui marquera l'histoire de l'enclave et de la Palestine. "Tous les mots de la langue arabe ne suffiraient pas à exprimer ce que je ressens. Nous revenons à Gaza, jamais nous ne renoncerons à notre terre. Le peuple palestinien a le droit de vivre ici sous ce beau soleil, sur la terre de ses ancêtres, la terre du peuple palestinien", confie-t-il.

Mais l'enthousiasme des premières heures tranche avec l'environnement. Il n'y a plus de rues, plus de vie, ni eau, ni électricité, la majorité des immeubles est à terre et les gravats n'ont pas été dégagés. Selon le gouvernement gazaoui dirigé par le Hamas, 135 000 tentes et caravanes sont nécessaires dans la ville et le gouvernorat du nord, où plus de 90% du bâti a été détruit par des mois de combats acharnés et d'intenses pilonnages israéliens. 

"C'est une souffrance"

Youssef, lui, n'a pas participé à la fête. "Les gens qui sont rentrés, au moins 80% d'entre eux ont perdu leur maison. Tu vas aller où ? Tu vas recommencer ta vie à zéro ? Que vont-ils faire sur les décombres ? C'est une souffrance, lâche-t-il. Tout le monde sourit, plein de joie, oui, je suis d'accord, ça me rend heureux de finalement rentrer à Gaza, chez moi, dans mon quartier. Mais quand tu rentres et que tu ne trouves rien, rien du tout, pas d'amis, pas de souvenirs, ça rend fou, ça ne rend pas heureux là".

L'homme, déplacé sept fois en 15 mois, ne veut pas quitter Gaza. "Ma priorité est de faire sortir mes enfants", explique-t-il. Son fils est bachelier et veut continuer des études, tandis que sa petite fille de 10 ans, n'a plus d'école. "Que va-t-elle faire ici ?", demande-t-il. Pour le moment, personne ne sort de Gaza, excepté des miliciens blessés du Hamas, qui, en vertu de l'accord de trêve, sont désormais soignés en Égypte.