« C’est une nécessité sociale et fiscale » : la taxe Zucman sur les 0,01 % les plus riches examinée au Sénat
Pour faire ruisseler, il faut taxer. Les sénateurs examineront jeudi 12 juin une proposition de loi visant à instaurer une taxation d’au moins 2 % sur les patrimoines excédant 100 millions d’euros, inspirée par l’économiste Gabriel Zucman. « Il serait logique que les grandes fortunes contribuent au budget de l’État, comme les classes moyennes », défend le sénateur Thomas Dossus, du Groupe écologiste – Solidarités et territoires (GEST), qui a inscrit le texte dans sa niche parlementaire.
Car c’est l’un des paradoxes de la situation présente : « à partir d’un certain niveau de fortune, le taux d’imposition réel s’effondre par rapport à celui des taxes moyennes », explicite le sénateur. Les ultrariches ne contribuent que très peu à l’impôt. « La question posée à notre assemblée est : y a-t-il un niveau de fortune où on est exempté d’impôt ? », soumet le parlementaire. Lors d’une conférence de presse ce mardi au palais du Luxembourg, la sénatrice écologiste Ghislaine Senée ironisait, lançant « un appel aux millionnaires à se battre avec nous car, eux, ne seront pas touchés ».
Une mesure de salubrité budgétaire et sociale
Le dispositif proposé est simple. Il ne toucherait que les 4 000 contribuables les plus fortunés, soit les 0,01 % les plus riches, ceux dont le patrimoine excède 100 millions d’euros. Si la somme de leur impôt sur le revenu, de leur impôt sur la fortune immobilière, de leur contribution sociale généralisée (CSG), de leurs contributions au remboursement de la dette sociale (CRDS) et de leur contribution exceptionnelle sur les hauts revenus est inférieure à 2 % de leur patrimoine, ils se doivent de verser la différence. Le rendement escompté d’un tel prélèvement est de 15 à 20 milliards d’euros.
« Le patrimoine des plus riches doit faire nation. C’est une nécessité sociale et fiscale. C’est une volonté majoritaire des Français », estime le sénateur communiste Pascal Savoldelli, interrogé par l’Humanité.
En effet, la taxe dite Zucman est une mesure de salubrité budgétaire, alors que les exemptions fiscales depuis l’arrivée au pouvoir d’Emmanuel Macron en 2017 s’amoncellent, pour un total de 62 milliards d’euros. Environ quatre milliards d’euros sont ainsi perdus tous les ans du fait de la seule suppression de l’impôt sur la fortune en 2017.
La taxe Zucman est aussi une mesure de justice sociale. Les 500 premières fortunes françaises ont, ces dix dernières années vu leur fortune passer de 200 milliards d’euros à 1 200 milliards d’euros ! Celle du premier d’entre eux, Bernard Arnault doté d’un patrimoine de 144 milliards d’euros selon les calculs du magazine Forbes « équivaut au produit intérieur brut du Maroc », compare Ghislaine Senée.
L’un des enjeux du prochain budget
Le texte, déposé par la députée Eva Sas, est déjà passé à l’Assemblée nationale le 20 février, où il est passé, par 116 voix pour (venant des bancs de la gauche) 39 contre (venant des groupes macronistes, de la Droite républicaine et de l’UDR), et 31 abstentions (essentiellement sur les bancs du Rassemblement national). Les sénateurs écologistes espèrent un vote favorable à leur proposition de loi à la Chambre haute.
Si elle ne passe pas dans cette assemblée conservatrice, la bataille n’est pas perdue. « L’idée est de faire percer la question dans le débat public. La taxe Zucman reviendra de toute façon lors de l’examen du projet de loi de finances » 2026, dès l’automne, alerte Thomas Dossus pour qui le vote de ce jeudi doit « ouvrir un débat dans la société », pour faire pression sur les élus. Aux idées neuves de ruisseler.
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