Le « dernier des géants », un « homme courageux », « une figure de la vie politique française » : l’extrême droite et la droite volent au secours de Jean-Marie le Pen
Avec le décès de Jean-Marie le Pen, dirigeant pendant quarante ans du Front national (FN), auteur d’exactions lors de la guerre coloniale en Algérie, c’est un représentant de ce que l’extrême droite – et nombre de représentants de la droite – a véhiculé de pire (racisme, antisémitisme, islamophobie, homophobie, etc.) dans les champs politique et sociétal français. Alors que son héritage continue d’empoisonner la société française et le débat public, nombre de représentants de son camp politique tentent de minimiser ses torts ou, même, de l’ériger en « héros ».
Les hommages au fondateur du FN – devenu Rassemblement national (RN) – se sont ainsi multipliés du côté de la droite et de l’extrême droite. Celui qui a fait de l’anticommunisme, de la xénophobie, du sexisme, de l’homophobie et de l’antisémitisme ses leitmotivs a « toujours servi la France, défendu son identité et sa souveraineté », affirme Jordan Bardella, héritier idéologique et président du RN, sur son compte X.
Obsédé par la supposée existence d’un grand remplacement
« Je pense aujourd’hui avec tristesse à sa famille, à ses proches, et bien sûr à Marine dont le deuil doit être respecté », a-t-il ajouté, alors que Marine le Pen ne s’est pas encore exprimée sur la mort de son père. De même pour l’ancien vice-président du Front national et député européen, Florian Philippot qui exprime son « émotion devant la disparition d’une figure de la vie politique française ».
Même son de cloche pour le fondateur de Reconquête !, multirécidiviste condamné à plusieurs reprises, notamment pour « injure à caractère raciste », Éric Zemmour : « Par-delà les polémiques, par-delà les scandales, ce que nous retiendrons de lui dans les prochaines décennies, c’est qu’il fut parmi les premiers à alerter la France des menaces existentielles qui la guettaient. » Celui qui a repris à son compte de nombreuses obsessions de Jean-Marie le Pen et qui est obsédé par la supposée existence d’un grand remplacement de la population française loue ensuite la « vision d’un homme, et son courage, à une époque où les hommes courageux n’étaient pas si nombreux ».
Son ancien porte-parole, qui a son rond de serviette dans les médias d’extrême droite, du magazine Valeurs actuelles à CNews, Jean Messiha, ose, quant à lui, dépeindre l’homme politique qui a minimisé les méfaits du régime nazi ou, même, l’existence des chambres à gaz, comme « l’une des plus lucides personnalités de la Ve République », mais aussi comme « le premier à nous avoir alerté sur les dangers de l’invasion migratoire et de l’islamisation de la France ».
L’antisémitisme revendiqué de Jean-Marie le Pen, justement, ne semble pas être un souci – hormis d’ordre stratégique – pour le polémiste d’extrême droite : « Il eut deux torts. Le premier est d’avoir eu raison trop tôt. Le second est d’avoir, par ses saillies antisémites, fait perdre 30 ans au camp national. »
Preuve de l’extrême-droitisation des champs politique et médiatique, nombre de personnalités estampillées à droite, voire au centre, de l’échiquier politique n’ont pas eu de remords à louer l’héritage de Jean-Marie le Pen. Comme le premier ministre et président du MoDem, François Bayrou, qui explique que, au-delà des « affrontements », le fondateur du FN « aura été une figure de la vie politique française ». Pareil pour le ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau, pour qui « une page de l’histoire politique française se tourne ». Ce dernier estime même que, « quelle que soit l’opinion que l’on peut avoir de Jean-Marie Le Pen, il aura incontestablement marqué son époque ».
Les médias ne sont pas en reste. Le magazine identitaire Frontières (ex-Livre noir) rend « hommage au dernier des géants », alors que le Figaro rend hommage à une personnalité qui « aura autant ouvert les yeux des Français sur les maux que peut charrier la démographie, qu’interdit, par ses outrances, à toute âme modérée de s’associer à son combat premier contre l’immigration ». Jean-Marie le Pen peut partir en paix, ses chiens de garde semblent prêts à poursuivre son entreprise de destruction.
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